L’absence actuelle et le passé glorieux du cinéma tchèque à Cannes

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Le cinéma tchèque est une nouvelle fois absent du festival de Cannes. Cette nouvelle revue de presse rappelle qu’il n’en n’a pas toujours été ainsi. Elle apporte également quelques détails concernant le dernier message du président Tomáš Garrigue Masaryk qui sera dévoilé au public d’ici neuf ans, avant de se pencher sur les éventuelles conséquences pour la République tchèque du prochain élargissement de la zone euro. La façon dont les écoles tchèques enseignent l’histoire et la face cachée du boom touristique seront deux autres sujets traités.

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En attendant la clôture du festival de Cannes 2018, le quotidien Lidové noviny s’est penché sur les raisons de la longue absence du film tchèque sur la Croisette. Il a également rappelé les moments où le cinéma tchèque y avait brillé :

« A noter d’abord que l’année 1968 a été légendaire pour les cinéastes tchèques, car le festival de Cannes a vu trois films tchèques se disputer la Palme d’or : Au feu les pompiers de Miloš Forman, L’été capricieux de Jiří Menzel et La fête et les invités de Jan Němec. D’après ce que ce dernier, enfant terrible et cinéaste de génie, prétend dans son dernier film Le Loup de Vinohrady, les films tchèques avaient de véritables chances de succès sur la Côte d’Azur. On peut évidemment émettre un certain doute là-dessus. Il est toutefois certain qu’ils ont perdu cette chance, car le festival, envahi par la fièvre contestataire de Mai 1968 et l’enthousiasme révolutionnaire des cinéastes français, avec en tête Jean-Luc Godard, a été annulé. Cette année-là, aucun prix n’a donc été décerné. »

Ce n’était pas encore la fin de la présence du film tchèque à Cannes. L’année suivante, deux films tchèques, Chronique morave de Vojtěch Jasný et La Fin du bedeau d’Evald Schorm, ont été en compétition. Et c’est encore en 1970 que les organisateurs du festival ont sélectionné un film tchèque, Les fruits du paradis, de la réalisatrice Věra Chytilová. Miloš Forman a par la suite présenté son film Taking Off, avec lequel il avait lancé sa carrière américaine. C’est le film Les Lampes à pétrole de Juraj Herz qui a, en 1972, achevé cette heureuse période du cinéma tchèque à Cannes. Le dernier long métrage tchèque sélectionné, le film L’Oreille du réalisateur Karel Kachyňa, en 1990, avait été créé au début des années 1970 avant d’être par la suite interdit de projection. L’auteur de l’article publié dans le quotidien Lidové noviny conclut sur le constat :

« Après la chute du régime communiste, le cinéma tchèque n’a vu aucun de ses films en compétition pour la Palme d’Or. Jadis, le festival de Cannes ouvrait ses portes aux films tchèques. Mais aujourd’hui, il se tourne vers d’autres régions, soit celles qui sont traditionnelles, soit celles qui proposent des films d’un certain niveau artistique ou d’un intérêt sociétal. On ne saurait dire si chaque film à l’affiche à Cannes est de meilleure qualité que les meilleurs films tchèques ou si la sélection des films respecte des règles justes. De toute façon, si un film tchèque est un jour de nouveau présenté à Cannes, on pourra s’en féliciter. »

Le dernier message de T. G. Masaryk sera connu en 2025

Le dernier message de T. G. Masaryk sera connu en 2025,  photo: ČT24
Les archives tchèques cachent un secret lié à Tomáš Garrigue Masaryk, fondateur de l’Etat tchécoslovaque en 1918 et premier président du pays. L’objet concerné est une lettre contenant les derniers mots que le président a confiés quelques jours avant sa mort, le 14 septembre 1937, à son fils, Jan Masaryk. L’hebdomadaire Respekt précise à ce propos :

« L’enveloppe contenant la lettre faisait d’abord partie des archives de Jan Masaryk, ancien chef de la diplomatie tchécoslovaque, mort en 1948 dans des circonstances qui demeurent à ce jour inéclaircies. Pour les protéger du pouvoir communiste, son secrétaire Antonín Sum a réussi à les faire transférer à l’aide de diplomates occidentaux en Ecosse. Dans les années 1990, les archives sont rentrées au pays. Mais ce n’est que neuf ans plus tard, un an avant sa mort, que le secrétaire Sum a cacheté l’enveloppe avant de la remettre au chef des archives nationales Jiří Křesťan et en indiquant de ne pas l’ouvrir avant le 19 septembre 2025. »

Les motivations de cette décision ne sont pas connues mais de l’avis général, le secrétaire Antonín Sum a tout simplement voulu garder secret le contenu de la lettre tant de son vivant que celui des petits-enfants du président Masaryk. Pour Jiří Křesťan cependant, cette décision aurait des causes plus graves. Désormais et pendant sept ans encore, cette énigme permet au public, aux historiens et aux archivistes, de donner libre cours à toutes sortes de spéculations. En attendant, la lettre est visible par le public dans le cadre de l’exposition intitulée Le Labyrinthe de l’histoire des pays tchèques aux Ecuries impériales du Château de Prague.

La Tchéquie en manque d’une stratégie pour l’adoption de l’euro

Photo: Ondřej Tomšů
La zone euro va désormais entourer la Tchéquie au nord, mais aussi au sud. C’est ce que titre un article publié dans l’hebdomadaire Ekonom en lien avec l’entrée prévue de la Bulgarie dans la zone euro et qui indique :

« Ainsi, la Bulgarie modifie la géopolitique de l’Europe, d’autant plus qu’elle ne semble pas être le dernier pays du sud à vouloir adopter la monnaie européenne. La motivation des pays comme la Croatie ou la Roumanie sont évidentes, car hésiter avec l’adoption d’une monnaie unique lorsqu’ils n’ont pas leur propre politique monnétaire n’a aucun sens. La Tchéquie se retrouvera dans une situation où sa couronne sera entourée de tous les côtés par l’euro. Seules la Pologne et la Hongrie, deux Etats ayant un cours flottant, resteront des alliées potentielles avec une monnaie nationale, et ce n’est pas beaucoup. »

D’après le magazine Ekonom, la démarche de la Bulgarie devrait être une incitation pour la Tchéquie à se pencher rapidement et sérieusement sur les questions stratégiques liées à sa volonté d’entrer un jour dans la zone euro.

Enseigner l’histoire autrement

Photo: Filip Jandourek,  ČRo
L’enseignement de l’histoire demeure enfermé dans la tradition. D’après ce que rapporte le supplément Orientace du quotidien Lidové noviny, en Tchéquie, l’histoire est toujours enseignée de façon chronologique, depuis la préhistoire jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale. En revanche, les événements dont les parents ou les grand-parents des élèves ont été témoins sont étudiés, dans le meilleur des cas, à la fin de la scolarité du premier degré ou de la scolarité secondaire. Or, l’enseignement de l’histoire en Tchéquie se déroule presque de la même manière qu’il y a vingt ou quarante ans. L’auteur du texte publié dans le magazine Orientace remarque :

« Tout indique que les responsables n’ont pas encore pris en compte l’importance de cette matière. En effet, ce ne sont pas les institutions chargées de celle-ci, en premier lieu le ministère de l’Education nationale, qui s’en occupent. Ce sont en revanche des institutions à but non lucratif comme l’Institut d’études des régimes totalitaires, Post Bellum ou People in Need qui y prêtent plus d’attentation en organisant, pour les écoliers, différents projets leur permettant de connaître l’histoire du XXe siècle. »

La face cachée du boom touristique

Photo: Barbora Němcová
Quel est aujourd’hui le sens des subventions publiques accordées au tourisme, au moment où non seulement Prague, mais également d’autres destinations font le plein de touristes ? Une interrogation soulevée dans l’hebdomadaie Reflex qui a écrit dans ce contexte :

« Jamais dans l’histoire les gens n’ont entrepris autant de voyages touristiques qu’aujourd’hui. Evidemment, ce phénomène ne concerne pas seulement la Tchéquie, car il est quasi planétaire. Jusqu’ici, tous ceux qui ne voulaient pas soutenir le tourisme et les voyages étaient perçus comme des esprits bornés, voilà pourquoi encore aujourd’hui, on peut entendre des voix qui invitent à suivre l’exemple des Etats et des régions qui débloquent plus d’argent pour ce secteur. Mais il y a aussi de plus en plus de personnes agacées par ce boom touristique et tout ce qui l’accompagne, comme les embouteillages, le tapage nocturne, ou la pénurie des places de parking. »

Le texte rappelle que le soutien et le développement du tourisme font d’habitude partie des promesses électorales. L’intérêt est donc de savoir si ce sujet sera également à l’affiche à l’approche des élections municipales qui auront lieu en Tchéquie en octobre prochain et, aussi, si les électeurs y seront sensibles. Et son auteur d’ajouter que seul un politicien irraisonnable voudrait plaider dans sa campagne en faveur du développement du tourisme dans des villes comme Prague, Brno ou Český Krumlov qui sont des destinations touristiques très prisées.