L’affaire de l’alcool coupé au méthanol continue devant les tribunaux

Marek Ženíšek et Petr Hlava, photo: CTK

A Ostrava, le premier procès public dans l’affaire du méthanol s’est achevé ce vendredi. Deux hommes ont été condamnés à huit ans de prison pour la mise en circulation de dizaines de bouteilles de vodka non estampillées avec la présence du méthanol, qui a notamment entraîné le décès d’une personne et des lésions vitales à plusieurs autres consommateurs. Depuis le déclenchement de cette crise sanitaire en septembre 2012, cette affaire de méthanol a fait du dossier de la contrebande d’alcool en général le nouveau cheval de bataille de la police et des autorités tchèques.

Marek Ženíšek et Petr Hlava,  photo: CTK
Ce sont deux hommes originaires de la ville de Karviná, située dans la région de Moravie-Silésie, qui ont inauguré le premier procès d’une vaste série dans l’affaire dite de l’alcool coupé au méthanol. Selon l’acte d’accusation, le premier des deux accusés, Petr Hlava, avait acheté 77 bouteilles de vodka composées de plus de 50% de méthanol en septembre dernier. En compagnie de Marek Ženíšek, il avait distribué ces bouteilles à l’occasion d’une fête locale. A la suite de la consommation de cet alcool, un homme est décédé, quatre autres ont subi de graves lésions, certains d’entre eux perdu la vue. Utilisé comme solvant, antigel ou carburant, le méthanol est un produit particulièrement toxique et dangereux. Il peut entraîner la cécité et, si la consommation dépasse 30 millilitres, la mort. Lors de la première journée d’audience ce mardi, les deux accusés, amis proches d’antan, se sont mutuellement rejetés la faute. Le procureur David Bartoš souligne que les accusés étaient conscients du danger :

« A une époque où il était bien connu que de nombreuses bouteilles d’alcool contaminées par le méthanol circulaient en République tchèque, ces hommes ont vendu sans vérification de leur origine des boissons alcoolisées. Ces bouteilles auraient pu porter atteinte à la vie de trois cents personnes. »

Photo: Zsuzsanna Kilian,  stock.xchng
Les deux hommes ont finalement été condamnés à une peine de huit ans de prison dans un procès qui reste cependant mineur par rapport à l’ampleur du dossier. Près d’un an après le début de l’affaire du méthanol, 47 décès et les cas de plus de 130 personnes gravement atteintes dans leur santé ont été enregistrées. En septembre dernier, cette situation de crise sanitaire avait incité le gouvernement à interdire la vente et la consommation d’alcool fort à plus de 20%. Cette prohibition a ainsi entraîné une baisse de 25% de la consommation de boissons alcoolisées dans les restaurants tchèques lors de la prohibition et même si cette consommation se remet doucement en marche, elle reste encore de 4% inférieure à la moyenne de l’année précédente. Les autorités tchèques ont débusqué depuis de vastes pans d’un réseau tentaculaire du marché noir de l’alcool. Ces derniers mois, à l’assistance de géologues la police tchèque a ainsi découvert plusieurs cuves cachées sous le sol contenant au total plus d’un million de litres d’alcool de contrebande. Le président de l’Union des fabricants et importateurs de spiritueux Petr Pavlik se montre satisfait des avancées effectuées depuis l’automne dernier:

Petr Pavlík,  photo: CT
« Depuis le début de la prohibition et encore maintenant, des milliers d’inspections ont été menées par diverses autorités de réglementation. Et il ya eu une réduction significative des installations des fabricants du marché noir de l’alcool. »

La prévention est l’autre préoccupation des hommes politiques tchèques. La Chambre des députés a ainsi étudié une proposition de loi controversée visant à rendre les boissons non-alcoolisées moins chères que les alcools. De nouvelles règles plus strictes pourraient aussi être appliquées pour la vente de spiritueux à l’automne prochain. Désormais, la vérification des timbres fiscaux se fera plus intense si les distributeurs veulent obtenir des concessions. Václav Kučera, l’adjoint du Président de la police reste néanmoins réaliste sur les retombées de ces mesures :

« L’affaire ne finira jamais car l’alcool contaminé reste parmi par les gens, et demeure toujours une source d’empoisonnement. »

Les cas les plus sérieux dans cette interminable affaire de l’alcool frelaté vont commencer à être discutés à l’automne prochain. Sept personnes identifiées comme les cerveaux de ce réseau de contrebande, et poursuivies pour mise en danger délibérée de la vie d’autrui, sont passibles d’une peine de 12 à 20 ans de prison, voire de la prison à vie.