L’art de la gravure sur verre tchèque mis à l’honneur à Paris
Un graveur tchèque de la société de verrerie Moser a été fait chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres par le ministre français de la Culture. La cérémonie s’est déroulée le 25 février dernier à l’ambassade de République tchèque à Paris.
« C’est un sentiment incroyable. Mais honnêtement, je le prends comme une récompense pour la verrerie dans son ensemble, pas uniquement pour moi. Pour moi, c’est par contre une distinction qui va de pair avec une certaine responsabilité. Cela m’oblige à faire mon travail aussi bien que jusqu’à présent, sinon encore mieux. »
Modeste, le graveur sur verre Tomáš Lesser, qui exerce son art depuis plus de 25 ans, a également rendu hommage à son maître, Vladimír Skála. Employé par la société Moser à Karlovy Vary depuis près d’un demi-siècle, il a formé son élève dès la sortie de l’école :
« Si j’ai réussi quelque chose, ici, à la fabrique, c’est justement Tomáš Lesser. Quand il est arrivé, il a dû apprendre le métier : assis toute la journée, utiliser les machines, mais aussi les gestes. Un graveur ne tient pas le verre dans la paume de ses mains, mais entre les doigts pour plus de souplesse dans les mouvements. »Tomáš Lesser a réalisé de nombreux ouvrages en verre avec des motifs figuratifs ou inspirés par la faune. C’est justement pour son travail d’exception sur un vase Art nouveau qu’il a agrémenté d’un paon que le graveur tchèque s’est vu sélectionné par le Comité Colbert qui nomine les récipiendaires. Ce comité, créé en 1954, rassemble des maisons françaises du luxe mais également des membres étrangers dont la société Moser. Mardi dernier, Franck Riester, le ministre français de la Culture a ainsi remis les insignes de Chevalier dans l’Ordre des Arts et des Lettres à dix artisans du luxe œuvrant au sein des maisons du Comité Colbert, dont Tomáš Lesser.
Le graveur tchèque n’a pas attendu cette distinction pour être reconnu : lui, tout comme certains de ses collègues maître-graveurs, travaillent tous les jours avec un agenda rempli sur au moins trois ans à l’avance. La production et la décoration de chaque pièce demandent en effet plusieurs mois de travail.Et Tomáš Lesser ne risque pas de se retrouver désœuvré : l’an dernier, il a été choisi pour représenter la société Moser dans le cadre d’un projet de coopération avec la marque française Hermès pour la confection de flacons de parfum personnalisés.
L’industrie du luxe ne connaissant manifestement pas la crise, l’artisan travaille actuellement sur un vase pour des clients de Taïwan, prêts à mettre la main au portefeuille pour posséder un objet issu du savoir-faire tchèque plusieurs fois séculaire dans le domaine de la verrerie. Un savoir-faire prisé puisque chaque œuvre créée est un objet unique au monde, comme le rappelle Tomáš Lesser :
« Ce qui est merveilleux avec le verre gravé, c’est qu’il s’agit d’un travail fait main. La moindre petite imperfection que vous retrouvez dans les traits rend tout de suite le travail plus humain. C’est quelque chose que vous n’aurez jamais avec une machine… »Moser est un des plus célèbres fabricants de verre en pays tchèques. Fondée en 1857 dans la ville thermale de Karlovy Vary, cette maison a fourni autrefois la cour impériale d’Autriche-Hongrie et le roi d’Angleterre Edouard VII.