L’art français des XIXe et XXe siècles : la Galerie nationale expose des trésors au Palais des Foires
Le Palais des Foires (Veletržní palác) rassemble des œuvres d’art du XIXe siècle à nos jours dans un grand bâtiment fonctionnaliste. L’ensemble présenté est essentiellement de l’art tchèque, mais une section est consacrée à l’art européen en général et une autre section à l’art français, qui était autrefois exposé au palais Sternberg. Cette place d’honneur réservé à l’art français s’explique par la richesse de la collection de la Galerie nationale. Ariane Batou-To Van a rencontré la conservatrice Olga Uhrová qui nous la présente :
« Nous avons la chance d’avoir une très belle et importante collection française des XIXe et XXe siècles. Elle illustre des moments charnières de l’art français et débute avec Delacroix et les artistes de l’école de Barbizon, comme Corot. D’autres artistes représentés dans la collection ont compté pour leur influence en France et aux Etats-Unis : nous avons trois excellents tableaux de Paul Cézanne, quelques toiles de Claude Monet, des œuvres de Paul Gauguin, dont la célèbre toile ‘Bonjour, Monsieur Gauguin’ qu’il a peinte en Bretagne mais aussi d’autres œuvres de Tahiti. Nous avons aussi un paysage de campagne de Van Gogh. Le mouvement cubiste est représenté dans notre collection par des toiles de Picasso de 1906 avec le ‘Nu assis’ peint lors d’un séjour à Gosol dans les Pyrénées et de 1907 avec les ‘Demoiselles d’Avignon’, ainsi que les autoportraits peints à la même période. Il y aussi de nombreuses toiles de la période cubiste analytique de Picasso. »
« Cette section a une histoire à part entière. En effet, l’historien d’art, le collectionneur et le directeur de musée Vincenc Kramář a visité Paris en 1910 et a rencontré le galeriste français Ambroise Vollard et le jeune collectionneur allemand Daniel Kahnweiler. Il a acheté plusieurs œuvres à ces deux galeristes. Kramář est ensuite resté en contact avec Daniel Kahnweiler tout sa vie. Ils ont échangé de nombreuses lettres dans lesquelles Kahnweiler tenait Kramář au courant des nouveautés parisiennes en général et notamment celles provenant de l’atelier Picasso. Les artistes tchèques tels que Filla, Kubišta et Procházka aimaient le style cubiste qu’ils pratiquaient et avaient la chance de recevoir des informations, des photographies, des tableaux et des sculptures en provenance de France. Comme nous exposons ces artistes au à la Galerie nationale, nos visiteurs ont la chance de pouvoir profiter de la collection française et de la collection d’art moderne tchèque rassemblées dans un même bâtiment. »
Dans la collection française on trouve aussi des œuvres de Braque, de Matisse et d’autres artistes de l’école de Paris. La Galerie abrite également un merveilleux autoportrait du douanier Rousseau, des tableaux de Chagall et de Van Dongen, ainsi qu’une collection de sculptures de Maillol, Rodin et Braque. La Galerie nationale collabore également avec de nombreuses institutions françaises, comme le rappelle Olga Uhrová :
« La Galerie nationale collabore avec de nombreux musées à Paris, mais aussi à Lyon, Montpellier. Nous soutenons un grand projet : il y aura une exposition sur George Braque l’année prochaine au Grand Palais à Paris. La Galerie nationale va prêter deux natures mortes de grande importance datant de 1920, qui ont été achetées par le gouvernement tchécoslovaque. Nous pensons que c’est un projet très important et que Braque est quelqu’un d’exceptionnel qui a eu une grande influence sur l’art moderne tchèque. »
Au début des années 1990, juste après la révolution de velours, les liens entre Paris et Prague retrouvent une vraie vitalité : Olga Uhrová et le Centre Pompidou mettent à l’époque au point une exposition organisée au Château de Prague où sont présentés des œuvres de Jean Dubuffet.
Dans ces années-là, un autre projet du palais Veletržní en collaboration avec le centre Pompidou rend hommage à Daniel Kahnweiler. L’exposition a pour but de présenter ce personnage important de l’histoire de l’art et son rôle dans le milieu artistique par le biais de sa collection. Des œuvres sont prêtées par le Centre Pompidou et le Musée Picasso et la Galerie nationale présente en parallèle des œuvres achetées par Kramář à Kahnweiler.
La collection d’art cubiste se déploie sur deux salles donnant un large aperçu de ce mouvement grâce aux tableaux de ses représentants. Olga Uhrová nous en dit plus :
« Pour revenir sur la collection cubiste, je voudrais introduire deux artistes majeurs que sont André Derain et Picasso. Nous avons deux tableaux de Derain, le premier date de 1910. Derain essayait à cette époque de trouver sa voie auprès de Picasso et Braque, mais il est finalement resté le plus proche du réalisme. Notre collection d’œuvres de Picasso est très large, nous avons seize tableaux, deux sculptures et des gravures de la période ‘clown et arlequin’. La donation faite par Daniel Kahnweiler a enrichi la collection de la Galerie nationale de nombreuses gravures et de tableaux, tels que ‘L’enlèvement des Sabines’ et d’un tableau de Fernand Léger. On trouve dans sa collection un bon nombre d’œuvres du cubisme français. »
« Kahnweiler visita Prague en 1964 après la mort de Kramář à l’occasion de l’ouverture d’un musée dans la villa du couple Kramář. Kahnweiler a alors parlé de cette collection d’œuvres de Picasso et a dit que la collection de son ami montrait étape par étape le cheminement et l’évolution de la période cubiste de Picasso. Nous avons la chance de voir ses œuvres de Gosol qu’il a réalisées lorsqu’il se trouvait dans le nord des Pyrénées, c’est-à-dire ses autoportraits, les ‘Demoiselles d’Avignon’ ainsi que ses tableaux de la période du cubisme analytique, rassemblées au sein du musée. »
Nous vous invitons à visiter la très belle exposition permanente présentant les collections d’art français des XIX et XXe siècles au palais des foires pour découvrir ou redécouvrir des œuvres majeures et des dessins rares des plus grands artistes français. Plus d’informations sur le site de la Galerie nationale : www.ngprague.cz