Le 130e anniversaire de l'architecte slovène Josip Plecnik

Josip Plecnik

Tout d'abord, un accueil grandiose et des réactions favorables, puis la critique, le triste départ de Prague et des dizaines d'années de l'oubli total, car sa vie était, à jamais, lié au nom du premier Président tchécoslovaque, Tomas Garrigue Masaryk, une personnalité mal vue par le régime communiste. C'est ainsi que l'on peut caractériser en bref «l'épisode tchèque» du géant de l'architecture slovène, Josip Plecnik, qui a considérablement contribué à la création du visage du Château de Prague et des jardins qui l'entourent. Cette année, nous commémorons le 130e anniversaire de sa naissance.

Josip Plecnik
Originaire de Ljubljana, Josip Plecnik a fréquenté la célèbre école du professeur Otto Wagner, à Vienne, considérée, à l'époque, comme le centre européen de l'art nouveau. C'est là, qu'il fit les projets de plusieurs constructions, dont le palais Zacherl qui compte parmi les premières réalisations européennes modernes. Sur l'invitation de la société des artistes Manes, il est arrivé à Prague, en 1911, pour devenir professeur à l'Ecole des arts décoratifs. Au début, il devient un objet de risée à cause de son pardessus flasque et son chapeau ancien froissé mais, bientôt, il gagne le respect de ses étudiants qui commencent même à s'habiller comme lui. En 1920, le Président Tomas Garrigue Masaryk l'invite à participer au projet de rénovation des Jardins du Midi, au Château de Prague. Par la suite, Plecnik est nommé architecte du château, et se voit confier la reconstruction de la partie du Château qui se trouvait, à l'époque, dans un état de délabrement avancé.

Dans les années 1920-1936, Plecnik refait, avec grand respect, sensibilité et esprit inventif, la Première et la Troisième cour du Château, le petit jardin Na baste (Sur le bastion) et plusieurs locaux intérieurs - la salle d'entrée, dite des colonnes, ou Plecnik, près de la porte Mathias, et l'appartement avec le cabinet de travail du premier Président tchécoslovaque et de sa famille, situés au deuxième étage des ailes sud et centrale du Nouveau palais du Château. Dans son travail, Plecnik utilisa, souvent, des motifs empruntés à l'architecture méditerranéenne et s'efforça de faire du Château de Prague une résidence vraiment digne du chef d'un Etat démocratique. Il respecta, néanmoins, l'esprit de toutes les étapes qui se superposaient et s'interpénétraient dans l'histoire du Château, du style roman à l'historisme du XIXe siècle.

Quant à l'appartement du Président Masaryk, un ascenseur cylindrique en acajou dans l'escalier en colimaçon assurait l'entrée dans cet appartement. L'intérieur est complété par l'escalier des vases et la Salle des lions avec une fontaine. De l'appartement, on peut entrer dans le bureau de travail du Président Masaryk. En son milieu, il y avait un impluvium avec un bassin circulaire éclairé par une fenêtre elliptique du toit, qui servait de cadre à des moments de contemplation. Malheureusement, les pièces de l'appartement furent, en grande partie, détruites. Le cabinet de travail a été le plus endommagé, son décor original ayant été liquidé, dans les années soixante-dix. A l'époque, le Château de Prague a reçu son nouveau maître, le président communiste, Gustav Husak, qui a voulu changer le visage de sa nouvelle résidence. Le mobilier d'origine fut retiré, les bibliothèques en acajou, qui couvraient tous les murs, furent déménagées, les lustres d'origine et autres installations simples, mais impressionnantes, disparurent. Dans la moitié des années quatre-vingt-dix, le cabinet de travail a été, en partie, reconstitué et, à l'heure actuelle, il sert de bibliothèque au Bureau du président de la République.

Les travaux de reconstruction ont été effectués, aussi, dans le salon dit Vert qui s'enrichit de tableaux des peintres baroques tchèques V.V.Rainer et Jan Kupecky, puis dans le petit Salon de la Harpe d'or dont les murs sont lambrissés de lamelles d'or, et dans la Salle dite des armoiries, située par Plecnik dans l'espace moyenâgeux à l'intérieur de la Tour blanche romane qui s'est conservée dans l'aile centrale du Château. La Salle des armoiries, avec une table massive en bois de teck, servait, jadis, de cadre aux signatures d'importants traités et documents mais, durant l'ère communiste, elle devint un dépôt. En 1921, Josip Plecnik quitte définitivement Prague pour devenir professeur de d'architecture, à Ljubljana. Mais il aime revenir à Prague où il dirige, de loin, des travaux de construction.

Parmi d'autres monuments architectoniques que nous devons à Josip Plecnik, il y a l'église du Sacré-Coeur, sur la place Georges de Podebrady, dans le quartier de Vinohrady. En 1919, la mairie de Prague II lance un concours de construction d'une nouvelle église, mais la Société des architectes tchèques insiste à ce que ce projet soit confié à l'architecte slovène, Josip Plecnik, connu grâce, notamment, à son travail au Château de Prague. Parmi trois projets élaborés par Plecnik, les architectes tchèques choisissent celui élaboré en 1927 et qui comprend des éléments chrétiens. « L'étranger détruit le siège sacré des rois tchèques », pouvait-on lire à l'époque, dans la presse tchèque. Malade, Masaryk n'avait plus les forces de défendre son architecte préféré et c'est pourquoi, en 1935, Plecnik quitte définitivement son poste d'architecte du Château. Il est à noter que Plecnik n'a jamais touché un seul sou pour son travail au Château de Prague. Mais revenons à l'église du Sacré-Coeur. La première pierre de la nouvelle église a été posée, le 28 octobre 1928, à l'occasion du dixième anniversaire de la naissance de la Première république tchécoslovaque. Suivant l'exemple de la cathédrale du Sacré-Coeur parisienne, l'église pragoise a été, elle aussi, consacrée au Sacré-Coeur. Celui-ci était le symbole de la reconnaissance pour l'indépendance de notre pays. Durant les travaux de construction, l'église a reçu une visite précieuse, celle de Tomas Garrigue Masaryk. Enchanté par un style simple, mais marquant de la crypte, le Président prodiguait ses éloges.

Le style de construction non traditionnel de l'église du Sacré-Coeur marie les éléments empruntés à des anciennes basiliques chrétiennes à des éléments égyptiens et byzantins. La façade est faite de briques engobées qui alternent avec de petites pierres de taille de granit pour rappeler un manteau d'hermine. La construction a trois parties principales: une tour prismatique, haute de 42 mètres, englobant toute la largeur de la construction. Au centre de la tour, il y a une grande fenêtre qui sert d'horloge en même temps. Le diamètre du cadran est de 7,6 mètres. La deuxième partie de l'église est la sacristie, avec une salle de baptême. La troisième partie est une grande nef représentant l'arche de Noé. La nef est un ensemble non divisé, sans colonnes et chapelles, avec un grand autel en marbre blanc de Sumava. Au-dessus de l'autel, il y a une sculpture du Sacré-Coeur, grande de trois mètres avec, à ses côtés, les sculptures des saints tchèques, dont saint Jean Népomucène, sainte Agnèse, saint Adalbert, etc.

Auteur: Astrid Hofmanová
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