Le chef militaire français, Jean Louis Raduit de Souches, a sauvé Brno d'une conquête suédoise

Dans l'histoire de la Moravie du sud, on trouve d'innombrables traces de la présence d'éminents chefs militaires français: le plus connu est, sans doute, Napoléon Bonaparte qui a livré sa bataille victorieuse dite des 3 empereurs, à Austerlitz près de Brno. Moins connu, mais pas moins important, puisque ayant sauvé la ville de Brno de la conquête suédoise, est Jean Louis Raduit de Souches. Devant son buste, dans le parc du château de Spilberg, les habitants de Brno commémoreront, le 13 août, le 359e anniversaire de la victoire de leur ville sur les Suédois.

Jean Louis Raduit de Souches
Qui est Jean Louis Raduit de Souches? Né en 1608 à La Rochelle, dans une famille huguenote, et mort à Hluboke Masuvky, près de la ville morave de Znojmo, il a été dans une grande mesure prédéterminée à une carrière de militaire par la poursuite des huguenots dans sa ville natale. Sinon, difficile d'imaginer qu'il adhère à l'armée habsbourgeoise, car la France était en état de guerre avec les Habsbourg. Mais avant d'y arriver, il a débuté dans l'armée suédoise, qu'il a quitté à cause des différends avec son commandant, et contre laquelle il a finalement lutté.

Brno
Les invasions suédoises en Moravie ont commencé en 1642, dans le cadre de la guerre de Trente Ans qui a été une guerre pour le pouvoir en Europe entre les Habsbourg et la coalition de leurs adversaires. Jean Louis Raduit de Souches s'est donc placé du côté des Habsbourg dans cette guerre dite suédoise. Les troupes suédoises ont été commandées par le général Lennart Torstensson. Son objectif était de conquérir Vienne, et Brno constituait un obstacle sur le chemin de son offensive. Brno n'a pas alors eu de commandant permanent. La forteresse du château de Spilberg a été commandée par le colonel George Jacob Ogilvy, un Ecossais. Ce dernier a eu beaucoup de mal pour accepter la décision de l'empereur autrichien, Ferdinand II, qui a nommé, le 14 mars 1645, un Français, le colonel Jean Louis Raduit de Souches, commandant de Brno. Celui-ci s'est tout de suite concentré sur les préparatifs de la ville à sa défense. En 6 semaines, il a fait réparer les remparts et approfondir les fossés, en créant un passage clandestin entre le château et une place au centre de Brno permettant, entre autres, d'approvisionner les militaires en eau, lors de la chaleur étouffante qui a régné à Brno, cet août 1645. Raduit de Souches a aussi procédé aux vastes remaniements du terrain autour du château pour que tous les abris potentiels de l'ennemi soient éliminés, et il s'est procuré d'importantes réserves de munitions et de nourriture. Avec Jacob Ogilvy, il a passé un accord de coopération, ce qui est considéré comme un acte diplomatique réfléchi.

Lennart Torstensson
Le siège de Brno a commencé le 3 mai et ses habitants opposaient une résistance pendant 112 jours. L'armée suédoise a eu dans les 28 000 hommes équipés de technique militaire la plus moderne. Face à eux, et leurs tirs d'artillerie, les défenseurs de Brno étaient au nombre de 1476, dont 426 soldats de métier. Les Suédois ont reçu, en plus, des renforts de 10 000 hommes de la part du duc George Rakoczi. Brno, lui, a été renforcé par 400 cavaliers envoyés par le maréchal Colloredo. La date de la bataille décisive a été fixée par le général suédois, Torstensson, pour le 15 septembre. Pour les défenseurs catholiques de Brno, c'était un bon signe, car c'était le jour d'une grande fête catholique, celle de l'Assomption de la Vierge. Leur foi dans la victoire a été affermie. Ils ont réussi à repousser l'ennemi, et même à l'attaquer, sur plusieurs points. Les Suédois ont décidé de terminer le siège et quitté, le 23 août, Brno.

Olomouc
La défense héroïque de Brno fut exceptionnelle. La ville d'Olomouc a été prise par les Suédois après 4 jours, Jihlava en une seule journée, Znojmo s'est livrée sans combat. Dans toute la monarchie habsbourgeoise, Brno a été glorifiée et célébrée en tant que capitale de Moravie. Le commandant français, Jean Louis Raduit de Souches, a obtenu pour cette victoire non seulement une récompense financière. Encore durant le siège de Brno, on lui a confié la direction d'un deuxième régiment de l'armée impériale. Après le retrait des Suédois, il a été nommé général, élevé par l'empereur à l'ordre des patriciens libres et obtenu 10 000 florins autrichiens. Après qu'il ait définitivement repoussé les Suédois de l'Autriche, en 1647, il a été nommé commandant de Moravie et de Brno, et il a obtenu l'autorisation d'acheter le domaine de Jevisovice, région de Znojmo. Finalement, l'empereur lui a accordé le titre de comte. En tant que commandant, il est encore intervenu dans les événements de guerre notamment sur le front hongrois contre les Turcs. Il s'est fait remarquer lors de la fortification de la Moravie, la Silésie et la Haute-Hongrie. Le domaine de Jevisovice, autrefois endetté et abandonné, est devenu un siège riche et prospère. Au château de Jevisovice, il a créé une bibliothèque comptant plus de 3 000 volumes et réuni une riche collection d'armes. Jean Louis Raduit de Souches est mort à l'âge de 74 ans Masuvky, région de Znojmo. Il est inhumé dans l'église Saint-Jacques de Brno. Sa sépulture, une figure du général agenouillé, a été créée par le sculpteur Jan Christian Pröbstl. Depuis 1902, un buste, dans le parc du château de Spilberg, rappelle le leader militaire légendaire qui a sauvé Brno d'une destruction certaine.

La défense courageuse de Brno, le 15 août 1645, figure parmi les chapitres les plus glorieux de l'histoire de cette ville. Depuis 1995, lorsque la métropole morave a célébré le 350e anniversaire de l'événement, des festivités y sont organisées, au milieu d'août, sous les auspices du maire et de l'évêque de Brno, intitulées La Journée de Brno. Une légende s'attache à l'événement. Le tintement de cloche pour annoncer midi sonne à 11 heures à l'église Saint-Pierre et Paul. Car à l'époque du siège de Brno, le général Torstensson avait décidé de se retirer s'il ne conquit pas la ville avant midi au lendemain. Les habitants de Brno l'ont appris et ils ont commencé à sonner le midi une heure plus tôt pour sauver leur ville.