Le monde feutré des maîtres hollandais à la Galerie Nationale

« Rembrandt & Co., Histoires de l'art au siècle de la prospérité » est la nouvelle exposition proposée par la Galerie nationale, au Palais Sternberg, à partir du 10 février et jusqu’au 27 mai prochain. Celle-ci se veut une plongée dans l’art des maîtres hollandais du XVIIe siècle et du début du XVIIIe siècle.

Esaias van de Velde
Il est une poésie et une aura de mystère dans la peinture hollandaise qui ne cessent de fasciner aujourd’hui encore, plongeant l’observateur du XXIe siècle dans une rêverie délicieuse d’autres temps. Ceux où l’on patinait sur la glace au pied des murailles d’une ville, où le velours des vêtements exhalait une douce chaleur, où la nature semblait une jungle touffue et irréelle, où sur les tables s’amoncelaient tranches de citron, grappes de raisin luisantes, rose coupée sur une nappe en taffetas.

Scènes de genre, portraits, paysages ou nature morte : tels sont les types de peintures par lesquelles les maîtres hollandais ont porté l’art à son summum. La Galerie nationale de Prague propose de plonger dans cet univers lointain dans le temps et pourtant étrangement si proche pour qui veut bien s’y arrêter un moment. Anja Ševčík est la commissaire de l’exposition Rembrandt & Co. :

Nicolaes Gillis
« Regardez les portraits ou les natures mortes : un écrivain a décrit ces peintures comme un royaume des objets. On peut en effet y admirer et y interpréter tellement de choses…Mais pour nous, ce qui était important, c’était de replacer la collection dans une société particulière, celle de la Hollande du XVIIe siècle. »

Et cette Hollande du XVIIe siècle qui voit naître le grand maître, Rembrandt, est une Hollande qui connaît un essor économique sans équivalent, un commerce international en plein boom, parallèlement à une autonomisation vis-à-vis des Pays-Bas. Tout ceci s’exprime dans les tableaux présentés à la Galerie nationale.

Rembrandt van Rijn
Mais ceux qui s’attendent à découvrir de nouveaux Rembrandt à cette exposition risquent d’être déçus : seuls le Savant dans son cabinet de travail, issu de la collection de la Galerie, ainsi qu’un Homme en costume oriental prêté par le Rijskmuseum d’Amsterdam y seront à voir. Anja Ševčík :

« Rembrandt était déjà une icône à son époque. Il avait un très grand atelier et a donc influencé de nombreux peintres. Autour de Rembrandt, nous avons des œuvres de ses élèves. Environ un quart voire un tiers des œuvres présentées ici sont clairement influencées par la création de Rembrandt quand bien même tous ces artistes ont pris ensuite une toute autre direction comme le plus grand concurrent de Rembrandt, Bartholomeus van der Helst, également présenté à l’exposition. »

Jan Josefsz van Goyen
Ainsi donc, c’est plus les peintres qui ont gravité autour de Rembrandt, ceux qui ont été influencés par lui, ceux qui ont été des continuateurs, que l’on peut découvrir à la Galerie nationale. Certaines voix se sont élevées pour critiquer une exposition dont le titre axé sur le maître de la peinture hollandaise prête à confusion, de même que sur le fait qu’il s’agit essentiellement d’œuvres de la collection de la Galerie. Celle-ci se défend en arguant qu’il s’agit là de présenter les plus belles œuvres restaurées au cours des cent dernières années. Il s’agissait plus de mettre en valeur le travail de recherche effectué sur la deuxième plus importante collection de peinture hollandaise de cette époque, après celle d’Amsterdam.

Pieter de Molyn
En tout état de cause, cette exposition, si elle n’a pas nécessairement l’ampleur de ce qui se fait à Berlin, Vienne ou Londres, permet au moins de découvrir des œuvres souvent réunies pour la première fois. Une plongée dans ce qui a fait la gloire de la peinture hollandaise : le quotidien, les saynètes touchantes ou amusantes, les portraits hiératiques, mais jamais sans âme…