Le plus vieux métier du monde face à un vide juridique
Le gouvernement Rusnok a rejeté ce mercredi une proposition de loi visant une légalisation de la prostitution afin de la cantonner dans certaines zones précises. La situation est pourtant inquiétante puisque les autorités tchèques ne disposent pas à l’heure actuelle des moyens juridiques adéquats pour contrôler cette activité dans un pays qui compterait selon diverses enquêtes plus de 15 000 prostituées sur son territoire.
« C’est un approche basique sur laquelle repose ma propostion. Elle reprend les principes fondamentaux du libéralisme et souligne que la répression et l’interdiction de la prostitution à tout prix ne fonctionne pas, cela ne va pas de soi. »
Certaines villes de Bohême ont souhaité interdire purement et simplement cette activité, un non-sens pour de nombreux analystes puisque le terme ‘prostitution’ n’apparaît même pas dans la loi, ce qui la rend de facto autorisée, même si le proxénétisme est quant à lui puni par le code pénal.
L’offre de services sexuels est donc souvent tolérée par la police, notamment dans les lieux fréquentés par la clientèle internationale, aux frontières ou bien dans les grandes villes, comme à Prague. Cette zone grise juridique persistante irait donc à l’encontre de l’intérêt des municipalités et de l’ordre public. Un cadre légal qui serait également archaïque pour les travailleurs du sexe. Viktor Paggio se réfère quant à lui au concept de libre-arbitre :« Pour moi, la ligne de démarcation est le libre-arbitre. Si une femme se prostitue librement et volontairement, alors c’est légal. Si elle le fait de manière non libre ou sous la contrainte financière, c’est criminel. »
La prostitution deviendrait alors une profession à part entière avec ses droits et ses devoirs, ce qui est censé permettre une meilleure protection des individus, tout en facilitant le contrôle l’exercice de cette activité par les autorités. Les prostituées pourraient donc bénéficier d’une protection médicale et devraient payer des impôts. Un autre aspect important de cette proposition est lié à l’interdiction de l’exposition de femmes semi dénudées à des fins publicitaires pour des services sexuels dans les zones accessibles au public. Face à l’augmentation du nombre de ces vitrines en plein coeur des villes, beaucoup d’associations citoyennes dénoncent une atteinte aux bonnes moeurs et à la dignité morale de la société.
La question de l’enregistrement et de l’anonymat des travailleurs du sexe est aussi brûlante. Hana Malinová, la directrice de l’association Rozkoš bez rizika (Plaisir sans risque), s’inquiète de la création d’un registre nominatif si la prostitution venait à être tolérée par la loi :
« Le plus gros problème est lié à la conservation de l’anonymat des prostituées. Elles ne doivent pas être obligées de dire aux autorités qu’elles offrent des services sexuels. »
Après ce refus du cabinet Rusnok, une proposition similaire, énième tentative pour légaliser la prostitution, a été soumise aux représentants municipaux du premier arrondissement de la ville de Prague qui vont ensuite la présenter au gouvernement. Les deux initiatives seront bientôt débattues à la Chambre des députés. Mais force est de constater que la légalisation de ces services sexuels n’est pas un sujet porteur y compris pour les prostituées elles-mêmes. Dans des pays comme l’Allemagne ou les Pays-Bas, où une loi de régulation existe depuis 2000, seulement 20% des femmes la pratiquent légalement.