Les Américains et la géographie : la Tchétchénie n’est pas la République tchèque !
L’information aurait de quoi faire rire si elle ne concernait pas un sujet aussi grave : une partie visiblement importante des Américains, journalistes chevronnés inclus, confondraient République tchèque et Tchétchénie, pays d’où sont originaires les deux coupables présumés de l’attentat du marathon de Boston. La confusion a pris une ampleur suffisante pour obliger l’ambassadeur tchèque aux Etats-Unis à réagir.
Quelques journalistes américains, dont on pourrait attendre un peu plus d’esprit critique et de déontologie, ont eux aussi repris l’information. On a ainsi pu entendre sur CNN, la plus grande chaîne d’information américaine, que « le plus jeune frère, Dzhokhar, porte un nom similaire à celui du premier président de la République tchèque », ajoutant plus loin qu’il s’agit d’une république islamique... Qu’il soit question de Vacláv Havel, premier président de la République tchèque après la partition en 1993, ou encore de Tomáš Garrigue Masaryk, premier président de la Tchécoslovaquie indépendante en 1918, la ressemblance est douteuse. Charlotte Garrigue, la femme de nationalité américaine de Masaryk, a dû en faire des sauts de cabri dans sa tombe.
La confusion entre Tchétchénie et République tchèque a en tout cas pris suffisamment d’ampleur pour que Petr Gandalovič, l’ambassadeur tchèque aux Etats-Unis, soit contraint de diffuser un communiqué rappelant que la République tchèque est une alliée de toujours des Etats-Unis dans la guerre contre le terrorisme et regrettant « ce malentendu extrêmement malheureux ». D’autant plus malheureux que la communauté tchèque aux Etats-Unis est en ce moment-même endueuillée après l’explosion dans une usine de la ville de West au Texas, peuplée à 75% de descendants d’immigrés tchèques. En attendant que la rumeur dégonfle, des diplomates tchèques ont connu quelques aventures dont il vaut mieux rire que pleurer, comme le raconte Lenka Šumová, de la Radio tchèque :« Nous avons appris l’histoire d’un diplomate tchèque aux Etats-Unis qui a été invité par un média américain, et quand la première question est tombée, il s’est avéré que le journaliste souhaitait mener une interview concernant les opérations militaires dans le sud de la Russie. »
Les efforts de l’ambassade tchèque et de quelques internautes navrés ont finalement fait mouche, permettant aux médias américains, où à certains d’entre eux en tout cas, de rectifier le tir. Lenka Šumová :
« Quelques usagers des réseaux sociaux plus instruits ont critiqué cette rumeur. Des Tchèques ici ou aux Etats-Unis se sont démenés pour attirer l’attention sur le fait qu’il s’agit de deux pays quand même assez éloignés, le premier étant membre de l’Union européenne et le second de la Fédération russe. Certains médias américains avertis ont diffusé une carte explicative. »
Trop tard pour éviter une avalanche de blagues comme celle d’un internaute polonais sur un général du Pentagone : « C’est parti pour bombarder ce pays bizarre avec un ‘tch’ dans son nom... tch... tch... Tchécoslovaquie ! – Monsieur, la Tchécoslovaquie n’existe plus – Vous êtes rapides ! Bon boulot ! »