Les auteurs de l’attentat contre Heydrich : « Les Tchèques ne se rendent jamais »

Ce lundi, une commémoration et une messe, en présence du président de la République Václav Klaus, se sont tenues sur le lieu du drame dans l'église orthodoxe Saints-Cyrille-et-Méthode, photo: CTK

Ce lundi 18 juin, 70 ans se sont écoulés depuis la mort des sept parachutistes tchécoslovaques qui ont participé à la réalisation de l'attentat contre le Protecteur de Bohême-Moravie Reinhard Heydrich. Recherchés pendant quinze jours par la Gestapo et finalement trahis par un autre membre de la résistance, les sept hommes sont morts au terme d’un combat sanglant mené pendant six heures avec 700 soldats de la SS. Ce lundi, une commémoration et une messe, en présence du président de la République Václav Klaus, se sont tenues sur le lieu du drame dans l’église orthodoxe Saints-Cyrille-et-Méthode, dans le 2e arrondissement de Prague.

Ce lundi,  une commémoration et une messe,  en présence du président de la République Václav Klaus,  se sont tenues sur le lieu du drame dans l'église orthodoxe Saints-Cyrille-et-Méthode,  photo: CTK
« Nikdy se nevzdáme », « Nous ne nous rendrons jamais », ou alors « Les Tchèques ne se rendent jamais » - tels seraient, d’après les témoins, les derniers mots prononcés avant leur mort par les parachutistes envoyés depuis Londres dans le cadre de l’opération Anthropoid. L’attentat a été perpétré le 27 mai 1942, dans la banlieue de Prague, par le Tchèque Jan Kubiš et le Slovaque Josef Gabčík. Historien aux archives de la ville de Prague, Vojtech Šustek rappelle pourquoi la résistance a visé précisément Reinhard Heydrich :

« La liquidation d'Heydrich était devenue une nécessité, une évidence ; ce Heydrich qui voulait exterminer la nation tchèque, qui avait fait arrêter 5 000 personnes et ordonnait des exécutions secrètes. L’objectif de la résistance était donc de se débarrasser de ce criminel dangereux mais aussi de réaliser un acte qui aurait un retentissement international. Un acte qui porterait un coup dur à l’intense propagande d'Heydrich qui faisait croire que les nazis avaient un contrôle absolu sur le pays. »

La crypte de l'église orthodoxe Saints-Cyrille-et-Méthode,  photo: CTK
Choqués et furieux suite à l’assassinat d’un de leurs plus hauts dirigeants (l’unique acte de résistance de ce genre effectué pendant la guerre en Europe), les nazis ratissent toute la ville de Prague. Sans aucune trace des auteurs de l’attentat, les Allemands rasent deux villages tchèques en représailles : Lidice et Ležáky. Josef Gabčík et Jan Kubiš, ainsi que cinq autres membres de la résistance tchécoslovaque à l’étranger qui ont contribué à la préparation de l’attentat, ont aussitôt trouvé refuge, comme cela avait été convenu, dans la crypte de l’église Saints-Cyrille-et-Méthode, rue Resslova, dans le centre de Prague. Mais un refuge d’où il était impossible de s’évader…

Jan Kubiš et Josef Gabčík
Les arrestations et les exécutions durant le mois de juin 1942 se montrent inefficaces. Finalement, c’est Karel Čurda, lui aussi parachutiste, qui permet à la Gestapo de localiser le groupe. Le 18 juin 1942, au petit matin, Kubiš, Gabčík, Opálka, Bublík, Valčík, Hrubý et Švarc sont assiégés par les troupes SS qui tentent d’abord d'inonder la crypte pour les noyer. Refusant de se livrer, les résistants finissent par se donner la mort. Responsable de l'ONG Post Bellum qui a récemment organisé à Prague une exposition dédiée aux familles et amis des parachutistes exécutés par les nazis, Mikuláš Kroupa refuse cependant de coller à Karel Čurda, lui-même exécuté après la guerre, une étiquette de traitre :

Karel Čurda
« Karel Čurda a pu croire que les autres parachutistes avaient eux aussi réagi à l’appel des autorités nazies diffusé par la radio : à savoir que chaque personne impliquée dans l’organisation de l’attentat qui se manifesterait auprès des autorités dans un délai précis - je crois que c’était du 12 au 16 juin - serait amnistiée. Et puis, Karel Čurda avait peur pour sa famille. Après le massacre de Lidice, il craignait que quelque chose de similaire puisse avoir lieu dans son village. »

L’évêque Gorazd
70 ans après l’événement, la presse tchèque rappelle également le sort tragique des représentants de l’Eglise orthodoxe, actifs dans la résistance et qui ont aidé les parachutistes. Parmi eux, le chapelain de l’Eglise Saints-Cyrille-et-Méthode Vladimír Petřek, ainsi que l’évêque Gorazd, tous deux exécutés en septembre 1942. L’Eglise orthodoxe était interdite sous le Protectorat.

Ce lundi soir se déroule, dans le quartier de Libeň, où l’attentat contre Heydrich a été perpétré, un concert en hommage aux auteurs de cet acte héroïque et dont le bénéfice servira à la rénovation de la maison natale de Jan Kubiš, située près de Trebíč, dans la région de Vysočina. Un musée dédié à cet épisode de la résistance tchèque devrait bientôt y ouvrir ses portes.