L'escrime, une tradition en Bohême
Notre magazine culturel sera consacré, exceptionnellement, à une discipline sportive. Une discipline, pourtant, pas comme les autres. L'escrime se situe, sans aucun doute, à la mi-chemin entre le sport et l'art.
En escrime, la plus grande renommée en Europe centrale, revient à la confrérie de St. Mark de Löwenberk, connue en Bohême sous le nom les Frères Markus, dont le siège principal fut à Francfort-sur-le-Main. Ensuite, à la corporation des frères St. Guy, siégeant à Prague. L'existence des deux corporations se rattache du 15ème au 17ème siècle. On les considère en tant qu'écoles mères d'escrime. Les escrimeurs qui en étaient issus avaient la réputation des meilleures lames et étaient répandus en Europe entière. La corporation des frères St. Guy a été confirmée par l'empereur Rodolphe II, en 1607. L'empereur attribua à la corporation un blason de gentilhomme, dont l'écu orné d'une plume. La corporation est devenue L'ordre des escrimeurs indépendants de la plume. Conformément à la confirmation de l'empereur, seuls les membres de l'ordre, maîtres de la longue épée et de la plume, étaient autorisés à enseigner l'escrime et à préparer leurs élèves à l'examen général. L'examen avait lieu chaque année, le dimanche suivant St. Guy. Pour devenir maître, chaque élève devait passer l'examen des sept armes, donc toutes les disciplines d'escrimes. Les armes les plus utilisées à l'époque, étaient l'épée d'une longueur de 120 centimètres, le poignard en bois, un couteau de chasse, en allemand appelé le dusack et un bouclier munit d'une pointe aigu. La Salle royale d'escrime du pays tchèque a été constituée à la moitié du 17ème siècle. Le premier maître corporatif d'escrime du pays était François de la Touche, succédé par Jean-Baptiste de Trento, les deux de fines lames. Les escrimeurs étaient répartis en trois groupes suite à leur classe sociale : nobles seigneurs, chevaliers et bourgeois.
Avec l'arrivée des armes à feu, l'escrime est un peu en retrait. Les écoles d'escrime ferment leurs portes. En Bohême, l'escrime regagne de l'importance au 19ème siècle. M. Hergsell est nommé maître d'escrime du pays. Le Club d'escrime, l'école spécialisée la plus ancienne, est fondé en 1886.
Plus ou moins dans la même période, M. Riegel fonde une école d'escrime. Leurs écoles étaient les plus renommées. Ils enseignaient l'escrime surtout au fleuret, donc le style de l'école française.
Vers la fin du 19ème siècle, les escrimeurs préférant le style français, quittent G. Hergsell et fonde le Club tchèque des escrimeurs. Les maîtres les plus renommés en étaient Jean Bonnier et Rudolf Vanderlind, qui fondera sa propre école d'escrime six ans plus tard.
Au début du 20ème siècle, les escrimeurs de Prague participent à de nombreux tournois à l'étranger et organisent en Bohême des tournois à participation étrangère ; dont le plus prestigieux le Championnat du royaume de Bohême. En 1913, le Congrès International de Gênesa voté la fondation de la Fédération Internationale d'Escrime, ce qui suscitera la fondation de la Fédération tchèque d'escrime, qui concernait uniquement les escrimeurs de la Bohême et non ceux de la Silésie et de la Moravie. Vers la fin de l'année, le Club Riegel et le Club des escrimeurs tchèques deviennent membres de la Fédération Internationale d'Escrime, malgré la protestation des hongrois et des allemands. A l'époque, c'est une vraie vague de fondation de petites associations et clubs. La plupart n'ont pas survécu à la guerre. Le seul club à ne pas interrompre son activité pendant les années difficiles de la guerre était le Club d'escrime Riegel.Il convient de parler, aussi, de Miroslav Tyrs, auteur de la Terminologie de l'escrime (tchèque-français et allemand-tchèque), de se pencher sur l'évolution de cet art de combat noble qui opposant deux adversaires à l'épée, au fleuret, au sabre. A présent, ceux qui poursuivent la tradition de l'affrontement de l'adversaire au combat médiéval et de l'escrime historique pour faire revivre les temps les plus reculés, depuis longtemps enseveli par la poussière séculaire, sont nombreux!
Plusieurs groupes se consacrent à l'escrime et à la simulation des tournois médiévales. L'un des plus connu est le groupe GOBARO. Le nom du groupe est une abréviation de trois époques, le plus souvent reproduites en spectacles : GOthique, BAroque, ROcaille - GOBARO... Des hommes à statures impressionnantes qui arrivent à créer une ambiance envoûtante d'un passé lointain, faire revenir l'histoire et la gloire effacée des tournois. Une escapade à travers des siècles !
Les tournois et affrontements dans le style médiéval transportent le spectateur en plein gothique tardif. Des hallebardes, haches et lances font place au décor de renaissance ou du 17ème siècle, l'époque romantique des mousquetaires d'A. Dumas. On peut admirer alors la maîtrise du couteau de chasse, de l'épée à pommeau, de la rapière et du poignard. Et encore, les escrimeurs de GOBARO nous déplacent au début du 18ème siècle, la rocaille, époque des décorations compliquées et tarabiscotées !
L'authenticité des représentations exige une parfaite maîtrise de l'escrime, du combat, mais également une connaissance approfondie de l'histoire. Les escrimeurs passent de longues heures à étudier les costumes et l'histoire des différentes époques présentées. Ils sont d'excellent cavaliers et toutes les armes utilisées aux combats, ainsi que les armures sont des répliques exactes de l'époque correspondante, oeuvres remarquables d'un armurier artisanal privé.
Les membres du groupe sont des professionnelles qui ont exercé l'escrime dans les groupes les plus prestigieux du pays, fondés plus ou moins dans les années soixante à des noms exotiques et romantiques à la fois : Rebels, Santelli, Dominik, Kadeti, Romantik, Burdyri.
Les activités de GOBARO sont multiples. Le groupe donne des spectacles sur commande, dans différents châteaux en Bohême et à l'étranger. Par exemple, il sera possible d'admirer leur art fin octobre, au château Krivoklat. Les escrimeurs ont participé à plusieurs reprises aux tournages de films de production tchèque ainsi qu'étrangère. Je ne citerai que le Yenkee de Connecticut à la cour du roi Arthur (Canada), Le roi Arthur (USA), La marche de Radecky (Allemagne), Pardaillan (France), dont le tournage s'est achevé au château d'Ecouen. Dans le film, les escrimeurs de GOBARO montaient les chevaux andalous du célèbre cascadeur équestre Mario Louraschi.GOBARO coopère également à long terme avec différents théâtres dans les pièces telles que Cyrano de Bergerac, Don Juan, d'Artagnan, les Trois mousquetaires. A l'étranger il a participé à la représentation de Cyrano de Begerac au Niederösterreichsicher Theatersommer à Baden, dans la pièce Don Juan, au théâtre Kleine Komedie, à Amsterodam. Il ne faut pas omettre la participation aux tournois internationaux à titre d'illustartion Kaltenberg, le Festival dramatique de Grenoble et les nombreux déplacements en France, en Autriche, en Suisse, en Allemagne... Parmi les activités les plus récentes, la présentation des scènes d'escrime dans le cadre du Dîner de gala des Rencontres franco-tchèques, organisé par la Chambre de Commerce Franco-Tchèque, en mai 2001, en présence sur scène de l'actrice Claude Jade et Jean Paul Zennacker, pensionnaire de la Comédie Française. Puis la publicité sur Canal+, une scène reprise du film Gladiateur, en mai 2002.
GOBARO, fait rêver, apporte un romantisme incontestable, une présence qui marque le spectateur !