L’exposition « Flower Union » de Bruxelles à Prague: « Les fleurs peuvent être un outil politique »
Après être restée six mois au Conseil européen à Bruxelles, à l’occasion de la présidence tchèque de l’Union européenne, la ‘Flower Union’, une œuvre réalisée par neuf artistes tchèques, est de retour au pays, et fait l’objet d’une exposition à la Galerie nationale de Prague, jusque mai 2023.
Une collection de fleurs déclinées sous plusieurs formes pour représenter la présidence tchèque de l‘Union européenne. Tel est le résultat du travail d’un groupe d’artistes tchèques qui se sont réunis il y a plus d’un an pour ce projet. Des tapis, en passant par des meubles et jusqu’à des vêtements, la collection nommée Flower Union se veut pro-européenne et positive.
Tradition oblige, le pays prenant la présidence offre une œuvre d’art à l’Europe. Si la plupart des pays-membres apportent des tableaux ou des sculptures, il est possible de proposer une œuvre plus originale, comme la France qui avait proposé une chorégraphie au début de sa présidence, en janvier 2022.
La République tchèque s’est également démarqué pour son mandat, en proposant une collection de décorations en formes de fleurs. Jan Brož, l’un des neuf artistes à l’origine du projet, explique le raisonnement du groupe :
« Lorsque nous nous sommes rendus à Bruxelles pour voir les locaux du Conseil, j’ai eu l’idée de recolorer le drapeau de l’Union européenne en vert au lieu de bleu. Une de mes collègues au sein du groupe d’artistes, Valentýna Janů, a proposé de remplacer les étoiles par des fleurs. Puis nous avons discuté de quel type de fleur choisir, de leur signification et nous avons décidé que chacune d’entre elles devaient provenir d’un endroit différent en Europe. »
Les fleurs ont donc, chacune, leur propre signification mais partagent néanmoins le point commun d’être des plantes médicinales, pouvant être infusées pour soigner une maladie. Jan Brož explique notamment que l’un des thèmes principaux du projet, outre le respect de l’environnement, est « la guérison ». Qu’elle soit physique ou psychologique, le terme fait particulièrement sens dans un contexte de guerre.
« À Bruxelles, le salon présidentiel est la salle où les personnes les plus importantes se réunissent. Nous avons créé un tapis en forme de tournesol et l’avons placé à cet endroit, pour rappeler la situation en Ukraine. Nous considérons que les fleurs peuvent être un outil politique. »
Le tournesol est devenu un symbole de la résistance du peuple ukrainien suite à une vidéo virale datant des premiers jours de l’invasion russe. On pouvait y voir une femme ukrainienne demandant à un soldat russe, armé, de mettre des graines dans ses poches pour que des tournesols poussent après sa mort sur la terre ukrainienne.
Mais au-delà de porter des messages politiques, l’œuvre symbolisant la présidence tchèque devait aussi représenter le pays auprès des autres vingt-six autres membres. Le groupe d’artistes a choisi d’utiliser en grande partie des matériaux recyclés, tout en favorisant le savoir-faire et la main d’œuvre tchèques.
« Nous avons voulu représenter notre pays par le biais des matériaux utilisés lors du projet. Par exemple, les chaises et les porte-manteaux réalisés par Johana Pošová et Barbora Fastrová sont des pièces en bois plié provenant de Ton, une entreprise tchèque traditionnelle. Et les tapis ont été fabriqués dans une petite entreprise tchèque dans les montagnes. »
Il s’agissait seulement de la deuxième fois de son histoire que la Tchéquie prenait la présidence de l’Union européenne. Pour la première en 2009, le gouvernement tchèque avait commandé une œuvre à l’artiste David Cerny. Ce dernier avait alors décidé de créer Entropa, une sculpture représentant les pays-membres de l’Union européenne de manière satirique et stéréotypée. L’œuvre tchèque avait alors créé la controverse et attisé les foudres de nombreux pays. Le Portugal était, par exemple, représenté par trois tranches de viande pour chacune de ses anciennes colonies africaines et la Suède par une simple boîte en carton de la marque Ikea.
Pour cette deuxième présidence, les neuf artistes ont donc dû assumer cet héritage embarrassant pour éviter à tout prix une nouvelle polémique.
« Les membres du Conseil de l’Union européenne ont préféré utiliser le mot ‘décoration’ pour évoquer notre projet artistique. Ils ont également souhaité que notre œuvre soit modérée pour ne pas créer de choc ou de controverse. Entropa est donc une œuvre qui continue à avoir de l‘impact, mais d’une mauvaise manière. »
En relation
-
Présidence tchèque du Conseil de l’Union européenne
La Tchéquie a succédé à la France à la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne jusqu’à fin décembre.