« Ma famille afghane » de Michaela Pavlátová, César du meilleur film d’animation
La coproduction franco-tchéco-slovaque « Ma famille afghane » de la réalisatrice Michaela Pavlátová a remporté le César du meilleur film d’animation, vendredi dernier, sur la scène de l’Olympia, à Paris.
« Ma famille afghane » (en tchèque « Moje slunce Mad ») est le premier long-métrage de la réalisatrice tchèque de 61 ans que ses courts métrages d’animation fantaisistes et pleins de vie, dont « Tram », nommé aux Oscars et récompensé du Cristal du court métrage au Festival d’Annecy en 2012, avaient déjà contribué à faire connaître.
Le film raconte l’histoire de Herra, une étudiante tchèque qui tombe amoureuse de Nazir, son ami afghan de la faculté à Prague. Elle part vivre avec lui dans sa grande famille à Kaboul, à l’époque sous la férule américaine. La vie de la jeune Tchèque est également bouleversée par sa rencontre avec Maad, un petit garçon abandonné qu’elle adopte.
Le film est adapté du roman « Frišta » de la célèbre journaliste et reporter de guerre tchèque Petra Procházková. Dès les premières pages, ce récit aux éléments autobiographiques a séduit la réalisatrice :
« Ce livre avait tout ce que je recherchais pour mon nouveau film : un personnage féminin fort, l’intimité d’une famille, des relations humaines complexes. De l’aventure, du suspense, de l’amour (…) et de l’humour aussi », a expliqué Michaela Pavlátová aux journalistes à l’issue de la cérémonie des César. Le fait que « Ma famille afghane » se soit imposée parmi les films tels que « Le petit Nicolas » ou « Ernest et Célestine » lui semblait encore improbable, comme elle l’a expliqué au micro de Radio Prague Int. :
« J’étais absolument persuadée que nous ne recevrions pas ce prix. J’avais même presque oublié que le film était encore être en lice quelque part, parce qu’il est sorti en 2021 et qu'il a déjà été présenté dans de nombreux festivals. Tout était déjà derrière nous : les Oscars, les Golden Globes et les Lions tchèques… Je n’ai pas réalisé qu’il restait encore les César ! En fait, le film a été nommé aux César 2023 par ce qu’il est sorti en France en 2022, un an après sa sortie dans les salles tchèques. »
Avant cela, « Ma famille afghane » avait déjà reçu le Prix du jury au festival d’Annecy. La réalisation de ce long-métrage a occupé, pendant plusieurs années, une trentaine d’animateurs en Tchéquie ainsi qu’une dizaine de personnes dans les studios Gao Shan basés à La Réunion. Le film a été coproduit par Sacrebleu Productions. Michaela Pavlátová :
« Je suis très contente que le film soit coproduit par la France. Sans cette collaboration, il n’aurait pas vu le jour. Ces dernières années, les films d’animation tchèques sont presqu’exclusivement coproduits par la France. Comme la part de la production française de ‘Ma famille afghane’ a été assez importante, le film a pu être nommé aux César. »
Co-écrit par Yaël Giovanna Lévy, le film, dont la musique a été créée par le duo Evgueni et Sacha Galperine, existe en versions tchèque et internationale. Les dialogues en dari ont été enregistrés à Kaboul même, par des acteurs afghans. A une exception près : la voix du personnage principal, Herra, a été interprétée, dans toutes les langues, soit donc en tchèque, en dari et en anglais, par l’actrice tchèque Zuzana Stivínová. Pour la réalisatrice comme pour toute l’équipe, le tournage de « Ma famille afghane » n’est aujourd’hui plus qu’un souvenir d’une époque et d’un univers révolus :
« Il est vrai que pour moi, cela reste un film qui parle davantage d’une famille afghane et des relations au sein de celle-ci que de l’Afghanistan. Peu après la fin du tournage, les Talibans ont repris le pouvoir et nous avons tous suivi cela avec inquiétude, tous ces vols d’évacuation qui ont permis aux gens de fuir le pays… Aujourd’hui, la situation est toute autre, c’est le conflit en Ukraine qui est au premier plan. Cela m’attriste quelque peu. Qui se pense à ce qui se passe en Afghanistan actuellement ? »
Réputée dans son pays notamment pour ses reportages en Afghanistan et en Tchétchénie, la journaliste Petra Procházková, auteure du roman qui a inspiré le « Ma famille afghane », passe cette fin du mois de février justement en Ukraine, où, comme elle a écrit sur Facebook, elle « fête le succès du film en France avec du champagne, pour nos amis afghans et ukrainiens… »
Son premier roman « Frišta », publié en 2004, a été réédité dans son pays à l’occasion de la sortie du film.