Manifestation contre la nomination de Roman Joch, futur conseiller pour la politique étrangère et les droits de l’homme

Photo: Anne-Claire Veluire

Une petite centaine de manifestants s’est rassemblée ce mercredi matin devant le siège du gouvernement tchèque, pour protester contre la nomination de Roman Joch comme conseiller pour la politique étrangère et les droits de l’homme du cabinet Petr Nečas. Les deux organisations à l’initiative de la manifestation considèrent les opinions politiques de Roman Joch en contradiction avec les responsabilités qui lui sont attribuées.

Photo: Anne-Claire Veluire
« Vive Pinochet », « Tirez sur les manifestants », « La torture est parfois nécessaire » : tels sont les slogans ironiques affichés sur les pancartes des manifestants, ce mercredi matin, faisant ainsi référence à quelques déclarations choc du futur conseiller aux droits de l’homme Roman Joch. Roman Joch est depuis 2003 le très médiatique directeur de l’Institut civique, un organisme privé à but non lucratif qui organise notamment séminaires et conférences et publie un bulletin mensuel et de nombreux articles dans des périodiques politiques. Ce think tank est ouvertement orienté vers une pensée conservatrice et libérale. Dans les années 1990, Joch avait été secrétaire aux Affaires étrangères de l’ODA, un parti de la droite parlementaire relativement important à cette époque, avant de devenir au début des années 2000 vice-président du Parti conservateur, un parti lui aussi aujourd’hui disparu de la scène politique tchèque.

Roman Joch
Roman Joch publie régulièrement des bulletins d’opinion dans la presse tchèque qui déclenchent souvent de vives polémiques. Parmi celles-ci, l’idée de Joch selon laquelle la droite aurait le droit « d’installer un régime autoritaire » si « la civilisation occidentale était menacée de disparition en raison de l’impotence intellectuelle et politique de la gauche » ou encore celle, apparue dans un article de 2002, qu’un « gentleman peut posséder des esclaves. »

Pour les deux organisations réunies ce matin, ProAlt et les Etudiants contre le racisme, les opinions de Roman Joch ne sont pas compatibles avec un poste de conseiller aux droits de l’homme. On écoute Tereza Stöckelová, de l’initiative ProAlt :

Photo: Anne-Claire Veluire
« Roman Joch ne reconnaît pas du tout le concept de droits de l’homme. Il affirme que tous les droits et toutes les libertés sont transposables aux droits de propriété. Il publie systématiquement des opinions homophobes, où il soutient que les orientations homosexuelles ressortent de la vie privée, qu’elles n’ont pas à être reconnues dans l’espace public, qu’elles ne sont pas normales, pas naturelles, et qu’il s’agit d’une déviance. Ce qui est aussi choquant, c’est qu’il s’est prononcé pour la torture si cela est nécessaire, et dans un texte sur l’Utopie politique, il s’est même déclaré contre le droit de vote universel. Ces opinions ont leur place dans l’espace public. Je pense qu’il est important de cultiver la diversité des opinions, mais elles ne peuvent pas sortir de la bouche du conseiller aux droits de l’homme. »

Tereza Stöckelová
Tereza Stöckelová est sociologue à l’Académie des sciences tchèque. Elle est porte-parole de cette nouvelle initiative, formée en juillet dernier, qui entend exprimer sa désapprobation quant aux réformes annoncées par le gouvernement. Un certain nombre de politologues ont également manifesté leur inquiétude après l’annonce de la nomination de Roman Joch.

Néanmoins, ce dernier pouvait compter sur un petit nombre de partisans dans cette manifestation qui scandaient : « nous voulons au gouvernement un anti-Kocáb ». Le futur conseiller aux droits de l’homme a en effet souvent exprimé ses différences de vue avec l’ancien ministre des droits de l’homme et des minorités. On écoute Roman Joch, invité à la télévision publique tchèque :

Photo: Anne-Claire Veluire
« Mon opinion est que les droits de l’homme sont les droits de l’individu, de la personne, sans regarder leur sexe, la couleur de leur peau, leur orientation sexuelle. Le droits de l’homme sont ceux de la personne et non pas ceux d’un membre d’un groupe. Et surtout, à mon avis, les droits de l’homme sont la liberté, nos libertés de citoyen, c’est-à-dire notre espace, autour de nous, autour de notre vie et de notre propriété, que l’Etat et les autres citoyens doivent respecter. »

Roman Joch entend donc revenir sur certains programmes mis en place sous le gouvernement précédent pour favoriser certaines minorités nationales. Il sera chargé de proposer des changements législatifs au cabinet de Petr Nečas. Il devrait prendre ses fonctions au début de l’automne.