Mariage pour tous : une première étape validée mais la route reste longue
Le texte de loi permettant à deux personnes de même sexe de se marier était de nouveau au programme de la session de la Chambre des députés ce jeudi matin. Il a été envoyé en deuxième lecture mais le processus législatif est loin d'être terminé.
La Chambre des députés a validé ce jeudi le principe selon lequel le texte sur le mariage homosexuel va être examiné en deuxième lecture après analyse en commission. Cela représente une première étape importante et très attendue depuis plusieurs années par les partisans du mariage pour tous.
La configuration actuelle d’un gouvernement minoritaire mené par ANO, qui a été à l’initiative de ce changement législatif, et d'une législature qui arrive à terme dans quelques mois, laisse planer quelques doutes sur l'issue de ce processus législatif.
Par ailleurs, les députés tchèques ont dans le même temps envoyé en deuxième lecture le texte visant à inscrire dans la constitution le principe du mariage comme lien unissant uniquement une femme et un homme.
Quelles sont les forces politiques en présence ?
Même si leur formation respective n’est pas unanime sur la question, les deux partis qui forment l’actuelle coalition gouvernementale, le mouvement ANO du Premier ministre Andrej Babiš et le Parti social-démocrate ČSSD, sont les deux groupes les plus favorables au mariage pour tous, avec le Parti pirate, qui est lui dans l'opposition.
La ministre du Travail et des Affaires sociales Jana Maláčová rappellait jeudi sur Twitter que c’est le ČSSD qui a été en 2006 à l’initiative du partenariat enregistré, une sorte de PACS tchèque. Elle affirme que « la famille traditionnelle n’est aucunement menacée par le mariage des gays et lesbiennes ».
Dans le camp opposé, on retrouve notamment le Parti chrétien-démocrate KDU-ČSL, le parti d’extrême-droite SPD et le parti conservateur ODS, dont le député Marek Benda est celui qui est le plus monté à la tribune jeudi matin.
Il fait partie de ceux qui espèrent faire inscrire dans la loi fondamentale du pays le mariage en tant qu’union entre un homme et une femme uniquement. Voici ce qu’il nous avait dit sur la question en avril 2019 alors qu’il avait organisé au parlement un séminaire auquel avait été invitée Ludovine de la Rochère, figure bien connue de la lutte perdue contre le mariage homosexuel en France :
Marek Benda : « Il faut une inscription dans la constitution car sinon le danger qui nous menace est similaire à ce qui s’est passé aux Etats-Unis ou en Autriche, à savoir une décision prise par un juge venant modifier la définition du mariage en tant qu’union entre un homme et une femme. Le mariage est une union que l’on connaît depuis 2000 ans et qui a toujours été entre un homme et une femme. »
Jeudi matin, ce même Marek Benda a estimé que les débats étaient vains « car aucun des deux camps n’a de majorité », tout en ajoutant qu’il était prêt à mener « une guerre culturelle ».
Quelle suite pour le processus législatif ?
Le processus législatif est loin d'être terminé, d’autant que des députés ont déjà proposé d’allonger les délais pour l'examen du texte en commissions avant la deuxième lecture.
L’autre obstacle de taille pourrait être le Sénat, où les formations opposées au mariage pour tous ont la majorité. La législature actuelle prend fin en octobre, ce qui ne laisse que peu d'espoirs aux militants pour l'égalité des droits des minorités sexuelles que le texte puisse être adopté avant les élections.
Quant au président de la République, Miloš Zeman, dont la signature est nécessaire à la promulgation de la loi, il a déjà envisagé dans le passé d’y opposer son veto. Si et seulement si tous ces obstacles parvenaient à être franchis, la République tchèque deviendrait le premier pays post-communiste à autoriser le mariage homosexuel.
Le parlement slovène avait voté une loi dans ce sens en 2015 mais un référendum l’a invalidée quelques mois plus tard. Plus à l’Ouest, la Suisse vient d’annoncer ce mardi qu’un référendum sur la question sera bientôt organisé, après l’adoption du mariage pour tous par le parlement en décembre dernier.