Miloš Zeman, promoteur économique et combattant pour la civilisation
Ceux qui regrettaient l’absence d’indications sur la politique étrangère qu’entendait mener le nouveau président de la République tchèque dans son discours d’investiture ont été servis : les premiers jours de présidence de Miloš Zeman ont été riches en annonces.
« En tant que nouveau président, je tiens à énoncer dans un discours bref les principes de base de notre communication future. Tout d’abord : respecter nos valeurs et ne pas interférer dans les affaires intérieures des autres Etats. Ensuite, j’essaierai de soutenir le développement de la coopération et de la coordination entre la République tchèque et les pays que vous représentez. Cette coopération ne sera pas seulement basée sur l’échange de valeurs et d’idées mais aussi sur les échanges de jeunes, principalement d’étudiants, sur le tourisme et enfin, dernier élément et non des moindres, sur l’économie. »
Le renforcement de la coopération économique, « sujet très ennuyeux » – dixit Miloš Zeman – fait partie du noyau dur de son programme. Le président se pose en super-économiste. Sa mission : développer l’attractivité du pays pour les investisseurs étrangers et promouvoir les entrepreneurs tchèques à l’étranger. Son arme : les « brillants entrepreneurs » qu’il enverra à l’étranger et « ceux au bord de la faillite » qu’il gardera pour l’économie nationale. Sa cible : la Chine, le Brésil ou encore l’Inde. L’Union européenne passe au second plan en matière d’économie.
Le président ne s’arrêtera pas à ce rôle de VRP. Miloš Zeman entend bien être aussi « Super-Miloš » et entrer en guerre contre le terrorisme international qui « menace la civilisation toute entière ».
« Ce n’est pas une question de savoir si ce terrorisme est basé sur la religion ou sur des idéologies politiques, dans tous les cas le terrorisme tue des civils innocents et je suis intimement convaincu que [lutter contre lui] c’est là notre tâche commune. »
Miloš Zeman a déjà annoncé sa volonté de se rendre en Afghanistan pour y rencontrer les soldats tchèques, sans préciser de date mais en n’omettant pas une critique bien sentie contre le gouvernement de Petr Nečas qui fonctionne depuis décembre sans ministre de la Défense. Lors d’une intervention sur la chaîne télévisée privée Prima Family, le président a affirmé que la participation aux missions internationales fait partie des fonctions premières des soldats, et qu’il soutient le départ imminent de trente-quatre militaires tchèques pour le Mali.Sans peur et sans reproche, l’autoproclamé eurofédéraliste entérine la rupture avec son prédécesseur eurosceptique Václav Klaus. Au programme : lever de drapeau européen au Château de Prague et ratification du traité de Lisbonne augmenté du mécanisme européen de stabilisation financière. Rien de révolutionnaire toutefois puisque ce mécanisme ne concernera pas la République tchèque avant au moins cinq ans, délai minimum selon le président avant que le pays n’intègre la zone euro. De bien belles paroles, que même David Šeich, député ODS, le parti de la coalition gouvernementale et ennemi du président, a bien du mal à critiquer :
« Je pense que le drapeau à lui tout seul n’est qu’un symbole. Ça ne signifie pas que nous allons verser des larmes quand le drapeau de l’Union européenne flottera au-dessus du Château. Mais nous allons suivre attentivement cette partie de la politique étrangère du nouveau président Miloš Zeman envers l’Union européenne, voir si ce n’est pas une politique de compromis, une politique qui ne promeut pas les intérêts de la République tchèque à l’étranger, ce que bien sûr nous n’accepterions pas. »Après les paroles et les avis favorables, Miloš Zeman ne passe pas encore aux actes. La suite de son programme est encore réservée à la diplomatie et aux leçons d’étiquette puisque le président recevait mardi le Prince Edward d’Angleterre et son épouse Sophie, en visite en République tchèque pendant trois jours.