Ministre de la Défense : « Un intérêt commun à une fin de la guerre, mais pas au prix de la souveraineté de l’Ukraine »
Poursuite de l’aide militaire à l’Ukraine, renforcement futur du flanc oriental de l’OTAN, possible médiation de la Chine pour une éventuelle paix en Ukraine ou encore accord de défense mutuelle entre la République tchèque et les États-Unis : la ministre de la Défense Jana Černochová s’est récemment exprimée à la Télévision tchèque sur plusieurs sujets actuels liés à la guerre en Ukraine.
Invitée dimanche du talk-show politique de la Télévision tchèque, face à son prédécesseur Lubomír Metnar, la ministre tchèque de la Défense (ANO), Jana Černochová, a déclaré que la Tchéquie disposait encore de matériel militaire dans ses entrepôts qui pourraient être envoyés en Ukraine. Une déclaration faite quelques jours après une interview du président Petr Pavel au quotidien allemand Süddeutsche Zeitung où ce dernier constatait que la République tchèque avait aidé l’Ukraine autant que possible en termes de livraisons d’armes et qu’elle avait peu de chances de continuer à aider le pays envahi par la Russie.
La ministre de la Défense doit à ce propos rencontrer le chef de l’Etat mercredi lequel s’entretiendra également avec le chef d’Etat-major des forces armées, Karel Řehka, qui doit l’informer de l’état réel des stocks dans les entrepôts tchèques, a déclaré Jana Černochová.
Cette dernière a toutefois précisé que le pays n’enverrait pas à l’Ukraine des équipements militaires dont l’absence dans les entrepôts tchèques menacerait les capacités de défense de la République tchèque.
Interrogée sur l’issue de la guerre en Ukraine, la ministre de la Défense ne cache pas son pessimisme :
« Malheureusement, je doute que ce conflit prenne soudainement fin dans les mois à venir. Les pays occidentaux, dont la Tchéquie, continuent d’aider l’Ukraine, via la livraison de matériel militaire. Malgré les nombreux problèmes de logistique, je peux dire que le matériel arrive bel et bien sur place : j’ai pu le constater de mes propres yeux il y a trois semaines en Ukraine. »
Jana Černochová a également rappelé les objectifs fondamentaux d’une fin de conflit, et les différents moyens pour y parvenir :
« Il faut continuer à fournir l’Ukraine en matériel militaire, lui offrir une aide humanitaire tout en ne négligeant pas une éventuelle négociation. Je pense qu’il est totalement égal que le médiateur de ces négociations soit un pays occidental ou un pays qui est proche de la Russie. Si c’est un pays à la fois respecté par la Russie et l’Ouest, pourquoi pas ? Notre intérêt à tous est que cette guerre se termine, mais pas au prix de la souveraineté de l’Ukraine ni si la Russie devait conserver les territoires qu’elle a annexés. C’est une éventualité inacceptable pour les pays occidentaux en général et la Tchéquie en particulier. »
Ce pays jouant un rôle de médiation pourrait ainsi tout à fait être la Chine, a précisé la ministre qui a souligné que dans ce cas précis d’un rôle diplomatique pour un conflit militaire, les considérations économiques et géopolitiques divergentes ne pouvaient pas être prises en compte.
L’ancien ministre de la Défense Lubomír Metnar s’est dit en accord avec Jana Černochová sur cette question, estimant même qu’il ne voyait pas d’autre initiative possible pour négocier la paix que celle de la Chine.
Au cours du mois d’avril, le gouvernement tchèque va discuter de la coopération bilatérale entre la République tchèque et les États-Unis en matière de défense. Les négociateurs ont finalisé le projet de contrat en février et attendent maintenant l’approbation finale des États-Unis. Selon la ministre, le document en question se concentre notamment sur une éventuelle présence de soldats américains sur le territoire tchèque ou sur la coopération entre les forces armées tchèques et américaines en République tchèque. Une fois le contrat avalisé par le gouvernement, il sera signé par Jana Černochová et son homologue américain Lloyd Austin. Il sera ensuite transmis aux députés, aux sénateurs et au président.
Enfin, suite aux déclarations de la Russie ces dernières semaines sur le déploiement d’armes nucléaires tactiques sur le territoire de la Biélorussie, la ministre a précisé que l’annonce d’un nouveau renforcement du flanc oriental de l’OTAN devrait avoir lieu lors du sommet de Vilnius en juillet :
« Indépendamment des paroles fortes de la Fédération de Russie et de la Biélorussie ces dernières semaines, le flanc oriental sera renforcé de toutes les façons. Lors du sommet de Vilnius, qui se tiendra dans trois mois, il y aura une annonce claire sur la manière dont cela sera fait et sur le nombre de participants. Ces récents développements et annonces ne font que renforcer ce que l’alliance planifiait déjà. Le but de la dissuasion nucléaire de l’OTAN est justement de faire en sorte que des armes nucléaires ne soient jamais utilisées. »
Sur cette question des armes tactiques nucléaires, la ministre s’est voulue rassurante, précisant que si « des armes tactiques devaient être utilisées en Ukraine par la Russie ou la Biélorussie, il n’y aurait pas de conséquences pour les habitants de la République tchèque. »