« Naučím se, učím se, naučil jsem se česky » : immersion dans l’Ecole d’été des études slaves
Ce vendredi s’achève la 64e édition de l’Ecole d’été des études slaves (LŠSS) organisée par la Faculté des Sciences Humaines de l’Université Charles de Prague. Malgré les circonstances particulières, plusieurs dizaines d’étudiants ont néanmoins participé au programme.
82, c’est le nombre d’étudiants qui ont fait le choix de retourner sur les bancs de l’université pendant un mois cet été pour y suivre des cours intensifs de tchèque et y découvrir par la même occasion la culture du pays. Si d’ordinaire les effectifs avoisinent davantage les 150, ces derniers restent tout à fait appréciables et préférables à ceux de 2020, puisque l’école d’été avait alors tout simplement été annulée en raison de l’épidémie, une première depuis la guerre.
Au final, ce sont tout de même vingt-cinq pays qui ont été représentés cette année. Agés entre vingt et quatre-vingts ans, ceux qui ont eu la chance de pouvoir assister aux cours en présentiel étaient animés par des motivations bien différentes pour apprendre le tchèque, comme le note Svatava Škodová, la directrice de l’école d’été :
« Les plus jeunes sont ici car ils veulent étudier la bohémistique. Ils veulent avoir une bonne maîtrise du tchèque afin de pouvoir travailler d’une manière ou d’une autre avec cette langue par la suite. Ce sont des bohémistes déjà établis ou de futurs bohémistes qui commencent juste l’enseignement supérieur. Les personnes ayant autour de cinquante ou soixante ans sont souvent des gens que nous rangeons parmi la ‘communauté des compatriotes’, c’est-à-dire des individus qui ont des ancêtres ou des racines tchèques, ou simplement un lien très fort avec la République tchèque. Je remarque que ce lien est souvent musical : ce sont des personnes qui s’intéressent à la musique et notamment à la musique tchèque et qui l’aiment tellement qu’elles décident finalement d’apprendre la langue. Concernant enfin ce participant d’environ quatre-vingts ans, il s’agit d’un homme dont la femme était tchèque et qui, après sa mort, a décidé de participer à l’Ecole d’été en souvenir d’elle. Il était ici pour la dixième fois cette année. »
Dans cette 64e promotion de l’Ecole d’été figuraient une dizaine de Français dont Alice, 26 ans, originaire de Picardie, qui, tombée sous le charme de Prague lors d’un précédent séjour, a fait le choix d’y poursuivre ses études :
« C’est ma première Ecole d’été. J’ai fait une année d’Erasmus ici à Prague. J’ai adoré la ville et l’université. Je me suis bien entendue avec les professeurs, j’ai gardé contact et maintenant, deux-trois ans après, j’ai commencé un doctorat en cotutelle entre la Sorbonne et l’Université Charles et cela a été ma motivation pour apprendre le tchèque. »
L’Ecole d’été proposait aux étudiants un emploi du temps bien défini combinant cours intensifs de tchèque le matin et activités culturelles l’après-midi comme nous le raconte Delphine, 46 ans, habitante du Mans passionnée par la République tchèque :
« Nos repas du matin et du soir ont lieu au réfectoire à la cité universitaire. Nous avons des horaires définis pour prendre nos repas. Il faut y être entre sept et huit heures le matin. Les cours commencent tous les jours à neuf heures et se finissent à treize heures quinze. L’emploi du temps est divisé en trois temps avec deux pauses. Dans notre classe, on commençait par une discussion pendant une heure, puis on faisait des exercices de grammaire. L’après-midi, plusieurs sortes d’activités étaient prévues. Il y avait des activités touristiques : des visites de musées, des promenades dans la ville avec des thèmes comme ‘Les légendes urbaines et les rumeurs à Prague’, des leçons de phonétique et une fois nous avons même fait de la cuisine. »
La situation épidémiologique actuelle a toutefois obligé la directrice de l’Ecole d’été à procéder à quelques ajustements au niveau du programme pour s’adapter aux exigences sanitaires en vigueur. Evaluation de niveau en ligne avant l’arrivée, tests antigéniques réguliers une fois sur place ou encore groupes réduits lors des visites, tout a été mis en œuvre pour assurer au mieux la protection des étudiants. Une Ecole d’été de quatorze jours intégralement en ligne a même vu le jour pour celles et ceux n’ayant pu faire le déplacement jusqu’en République tchèque.
« C’était un grand bouleversement pour tout le monde dans la mesure où nous avons retrouvé nos étudiants après un an et demi d’absence. Nous avons dû bien sûr nous pencher sur les questions d’organisation. […] Depuis quinze ans, il existe une chorale à l’Ecole d’été qui chante pour la cérémonie de clôture. Nous avons dû malheureusement y renoncer, ainsi qu’aux soirées musicales, car chanter ensemble n’est pas autorisé. Mais nous avons eu à l’inverse plus de films. Ainsi, au lieu de chanter, nous avons visionné des films et en avons débattu. Nous avons également créé une application appelée TripFon grâce à laquelle nos étudiants ont pu s’inscrire à toutes les activités pour éviter les contacts et toujours ainsi conserver des effectifs réduits », précise Svatava Škodová.
Les étudiants que nous avons rencontrés ont semblé pleinement satisfaits par cette nouvelle formule. Ces derniers ont pu, entre autres, se rendre au musée Náprstek, à la Galerie nationale, participer à des visites guidées à travers la ville ou encore assister à de nombreuses projections de films qui ont ravi Neal, 28 ans, originaire de l’Essonne qui n’en est pas à sa première Ecole d’été en République tchèque.
« Le Filmový klub (ciné-club) nous a permis de découvrir des chefs-d’œuvre du cinéma tchèque, notamment ‘Limonádový Joe’, un western tchèque. C’est le meilleur moyen de connaître la mentalité tchèque, d’autant que ces films sont assez spéciaux et à nul autre pareils. »
Durant leur séjour, les étudiants ont pu prendre part à trois excursions en dehors de la capitale le week-end. Outre la pittoresque ville de Kutná Hora et le fascinant ossuaire de Sedlec inscrits à l’UNESCO, les apprentis tchécophones ont aussi visité Ústí nad Labem, à l’occasion de la commémoration du massacre du 31 juillet 1945 qui avait coûté la vie à au moins 43 Allemands des Sudètes, avant de prendre la route pour l’imposant château médiéval de Kokořín près de Mělník.
« L’objet principal de la visite était le château qui est particulièrement joli. Nous avons eu une visite avec une guide. Après nous nous sommes promenés dans la forêt voisine mais nous étions très nombreux, environ quarante. Nous n’avons donc fait qu’un petit tour près du château. »
L’Ecole d’été ne se borne cependant pas qu’aux cours dispensés par l’université et à quelques excursions, ce sont aussi des rencontres, un moment de partage et de convivialité, comme le relève à juste titre Alice :
« Certes tous les matins on travaille et l’après-midi on a des activités plus ou moins culturelles, mais le soir on prend le temps de boire des coups ensemble car c’est quand même cela l’intérêt de l’Ecole d’été : c’est de se faire des amis. Comme ici on dîne très tôt, aux alentours de dix-huit heures trente, on a toute la soirée de libre pour soit aller voir un film et boire des coups, soit pour faire des jeux. On joue beaucoup aux cartes, on joue aux Loups-garous et à plein d’autres choses ensemble. On a aussi régulièrement une session d’une heure ou deux durant laquelle on travaille notre tchèque car nous avons des petits examens, mais on se couche souvent à deux heures du matin après avoir bu de la bière tchèque et joué aux cartes dans toutes les langues qui existent. »
L’Ecole d’été s’achèvera par la remise des diplômes place Malostranská à Prague. Si Neal songe déjà à un éventuel retour en République tchèque, Delphine, elle, compte après l’Ecole d’été partir une dizaine de jours dans la Suisse bohémienne, près de Děčín, à la frontière avec la Saxe. Alice, enfin, quant à elle, reviendra en septembre à Prague afin de poursuivre ses études de doctorat en théâtre, littérature et politique à l’Université Charles.
(Le titre de l'article signifie : « J'apprendrai, j'apprends, j'ai appris le tchèque », ndlr)