Neige à Prague : entre détente et imbroglio politique
Prague, ses collines enneigées, des dizaines d'enfants dévalant les pentes de la colline de Petřín et… la police municipale. Retour sur une journée de mardi pas comme les autres qui s'est soldée par un désaccord entre le ministre de l'Intérieur et le maire de Prague sur l'opportunité de laisser les enfants pratiquer leur sport hivernal préféré : la luge.
Il n'y a rien de surprenant à ce que les chutes de neige impressionnantes de ce début de semaine à Prague aient enflammé les réseaux sociaux. Entre les embouteillages, les scènes amusantes occasionnées ou tout simplement la beauté de la ville dans son manteau blanc, il faut dire qu'il y avait de la matière.
Plusieurs médias ont d'ailleurs partagé la vidéo d'un homme visiblement peu sensible aux -10°C de la capitale, puisqu'il dévalait les pentes de la colline de Petřín à ski… quasiment dans le plus simple appareil, uniquement couvert par un maillot tiré du film « Borat ». Certains observateurs ont également rapporté que le funiculaire de Petřín d'ordinaire plutôt calme était bondé ces derniers jours, pris d’assaut par les skieurs qui s'en servaient comme d'une remontée mécanique.
Au micro de la chaîne de télévision privée CNN Prima, le ministre de l'Intérieur Jan Hamáček (ČSSD) avait fait part dès lundi de son intention de siffler la fin de la récréation : « Il n'y a pas, à ma connaissance, de piste balisée à Petřín. Alors, si quelqu'un fait du ski ou du snowboard en dehors des pistes balisées, je pense que ce n'est pas conforme à la loi. »
Mardi, des policiers municipaux sont donc intervenus pour rappeler à l'ordre aussi bien les skieurs que les enfants et leurs parents. Selon la porte-parole de la police de Prague, Irena Seifertová, ces activités constituaient une violation d'un décret de 2001 portant sur « la protection de la verdure publique ».
« Cela ne veut pour autant pas dire que c'est interdit partout. Les lieux sont définis avec précision », a-t-elle ajouté. Les contrevenants risquent jusqu'à 10 000 couronnes d'amende (400 euros), mais la porte-parole de la police de Prague a fait savoir que personne n'avait été verbalisé.
Dans une vidéo vue plusieurs milliers de fois sur Instagram, le journaliste Janek Rubeš a filmé l'intervention de la police. Un skieur commentait à son micro :
« Nous voulions prendre le funiculaire, ils nous l'ont interdit. Nous avons donc fait du ski de fond dans les collines. Puis un policier est venu et a voulu nous infliger une amende pour avoir outrepassé l'ordre du gouvernement de pas faire du ski de fond ici. »
Le maire de Prague Zdeněk Hřib (Pirate) s'est ému de la scène. Dans un message posté sur Facebook accompagné d'une photo dans laquelle il se mettait en scène… sur une luge :
« Le plaisir de la neige est le bienvenu à Prague ! […] Expulser les enfants des pentes de la colline est un non-sens. Il s'est avéré qu'il existe une sorte de décret municipal vieux de 20 ans qui interdit le ski ou la luge dans certaines parties de Prague, par exemple à Petřín. Mais je ne comprends pas du tout comment il a pu être approuvé à l'époque sous cette forme. »
Autre quartier, autre ambiance
Des pentes de Riegrovy sady à celles des hauteurs de Smíchov, les espaces ne manquent pas à Prague pour pratiquer, en toute légalité cette fois-ci, son sport de glisse préféré. Mardi, à Stromovka dans le quartier de Holešovice, plusieurs dizaines d'enfants et sans doute autant de parents profitaient de la neige. A chacun sa luge préférée : de la mini pelle en plastique à l'antiquité ressortie du grenier.
Simon, que nous avons rencontré, avait choisi son modèle : « Je préfère celle-ci, la rouge, parce qu'elle a un volant ! ». Âgé d'une dizaine d'années, accompagné par sa famille et des amis, il s'en est donné à cœur joie durant l'après-midi : « De la neige comme ça, on en a pas tous les jours ! ».
Sans police municipale à l'horizon, le seul risque était alors de se faire faucher par un enfant dévalant la pente à toute vitesse. Alors, inutile de dire que jusqu'au coucher du soleil – et malgré un froid glacial, les pentes n'ont pas désempli.
