Nid de cigognes : l’ex-Premier ministre Andrej Babiš devant le tribunal pour fraude

Andrej Babiš

C’est un procès attendu depuis une dizaine d’années qui a débuté lundi à Prague, avec l’ancien chef du gouvernement tchèque et candidat présumé à la présidence Andrej Babiš sur le banc des accusés.  

L’une des affaires les plus suivies en République tchèque, qui est à l’origine du procès, porte le nom de « Čapí hnízdo ». Qu’est-ce que le « Nid de cigognes » ?

C’est le nom du luxueux complexe touristique qu’Andrej Babiš a fait construire, encore avant son entrée en politique, et situé non loin de Prague. Les travaux de construction ont été lancés en 2006. Quatre ans plus tard, les premiers doutes sont apparus au sujet du financement du projet.

Nid de cigognes | Photo: Filip Jandourek,  ČRo

Comment plus précisément l’ancien Premier ministre est-il impliqué dans cette affaire ?

Le centre hôtelier et touristique qui appartenait à l’origine au groupe Agrofert d’Andrej Babiš, a été transformé en société par actions, prétendument détenues par les enfants d’Andrej Babiš et sa future femme, pour bénéficier, en 2008, de la subvention européenne de 50 millions de couronnes (plus de 2 millions d’euros), destinée aux petites et moyennes entreprises. Une subvention à laquelle le complexe n’aurait pas eu droit en faisant partie du vaste conglomérat Agrofert qui regroupe plus de 250 entreprises des secteurs alimentaire, chimique et des médias.

Après avoir obtenu la subvention, le complexe du Nid de cigognes a été réintégré à Agrofert. Fondateur du groupe, Andrej Babiš a été son propriétaire jusqu’en 2015. Occupant à l’époque le poste de ministre des Finances, il l’a alors placé dans des fonds fiduciaires pour se mettre en conformité avec la loi sur les conflits d'intérêts explicitement surnommée « Lex Babiš ».

Fondateur et leader du mouvement populiste ANO et une des principales fortunes du pays, Andrej Babiš était déjà Premier ministre lorsque la police a ouvert l’enquête sur le Nid de cigognes, en 2015. Il a été inculpé en mars 2022, après avoir perdu les élections législatives quelques mois auparavant et après avoir été remplacé par Petr Fiala à la tête du gouvernement.

Ouverture du procès de l’affaire Nid de cigognes | Photo: Vít Šimánek,  ČTK

Qui sont les accusés ?

A l’origine, 11 personnes étaient poursuivies dans l’affaire du Nid de cigognes, dont plusieurs membres de la famille d’Andrej Babiš. Finalement, c’est l’ancien Premier ministre et son assistante de l’époque, Jana Nagyová, qui ont comparu devant le tribunal de Prague, ce lundi, au terme d’une enquête longue et compliquée qui a connu plusieurs rebondissements. Manager du complexe du Nid de cigognes, Jana Nagyová est accusée de fraude aux subventions et d’atteinte aux intérêts financiers de l’UE, tandis qu’Andrej Babiš est accusé de complicité de fraude aux subventions.

Quelle a été leur réaction et quelles peines encourent-ils ?

Devant le tribunal, ils ont tous les deux nié les accusations. Défendu par trois avocats renommés, Andrej Babiš a répété que ces poursuites à son encontre étaient « politiquement motivées ». « Je n’ai jamais volé quoi que ce soit. La subvention en question a été remboursée, personne n’a commis aucune fraude, personne ne s’est enrichi dans cette affaire », s’est défendu le député Andrej Babiš devant le tribunal. Celui-ci est présidé par le juge Jan Šott, connu entre autres pour avoir condamné pour corruption deux politiciens en 2012.

Jana Nagyová | Photo: Roman Vondrouš,  ČTK

Suivi de près par le public et les médias, le procès d’Andrej Babiš se poursuivra cette semaine par les auditions des témoins, dont l’épouse et le fils de l’ancien Premier ministre. Les deux accusés risquent entre cinq et dix ans de prison.

Tandis que Jana Nagyová est candidate aux élections sénatoriales prévues pour fin septembre, Andrej Babiš, 68 ans, figure parmi les candidats présumés à l’élection présidentielle de janvier 2023.

Le président du mouvement ANO entend se prononcer sur son éventuelle candidature à l’occasion de la fête nationale du 28 octobre. A noter qu’en Tchéquie, le président bénéficie d’une immunité et ne peut donc faire l’objet de poursuites judiciaires.