L'immobilier et la spéculation des étrangers...

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L'immobilier. C'est en Tchéquie, synonyme, pour le commun des mortels, de sens interdit. Acheter son propre appartement, en voici une chose difficile. La raison en est que les propriétaires avaient vite fait, dès 1990, sinon de reproduire les prix d'Europe occidentale - encore que ce soit vrai dans certain cas -, du moins de tendre vers ces prix dont ils se rapprochent de plus en plus.

L'immobilier. C'est en Tchéquie, synonyme, pour le commun des mortels, de sens interdit. Acheter son propre appartement, en voici une chose difficile. La raison en est que les propriétaires avaient vite fait, dès 1990, sinon de reproduire les prix d'Europe occidentale - encore que ce soit vrai dans certain cas -, du moins de tendre vers ces prix dont ils se rapprochent de plus en plus. Les Occidentaux, chefs d'entreprises et cadres, qui avaient commencé à s'installer en Tchéquie dès la chute du communisme, avaient favorisé cette tendance. Ils pouvaient et peuvent, par exemple, louer un appartement à Prague à 50 000 couronnes, soit environ 10 000 FF à l'époque et même aujourd'hui, alors que le salaire moyen en Tchéquie, en 2002, n'est que de l'ordre d'un peu plus de 14 000 couronnes.

Cette tendance se trouve de nos jours aggravée par des spéculateurs de toute l'Europe et même du continent Nord-américain, qui, sachant que l'immobilier est appelé à prendre une plus-value à l'admission de la Tchéquie à l'Union européenne, se sont rués sur des immeubles et des appartements dans les centres urbains les plus intéressants comme Prague, Karlovy Vary, Plzen, Ceské Budejovice et Ceské Krumlov, etc. Les Tchèques eux-mêmes, hommes d'affaires et autres préfèrent investir dans la pierre en prévision de l'extension de l'Union européenne à la Tchéquie. Le seul facteur susceptible encore de tirer les prix vers le bas est le voisinage. Certainement qu'un appartement se trouvant dans un immeuble habité par des Roms coûterait beaucoup moins cher qu'un autre, tout à fait identique, mais où, aucune famille rom n'habite.

Les spécialistes de l'immobilier écrivent carrément dans la presse, que désormais, en Tchéquie, le prix de l'immobilier dépend des étrangers. De plus en plus d'étrangers achètent des appartements ou des maisons. Dans certaines villes, notamment à Prague, il y a des quartiers où il y a une forte concentration d'étrangers. Et la seule présence de ces étrangers dans ces quartiers favorise la venue d'autres étrangers, vue la tendance au regroupement par nationalité. Aussitôt les prix flambent. La même tendance se manifeste actuellement à Budapest, à Ljubljana en Slovénie, ainsi qu'à Dresde et à Leipzig. Selon des agents immobiliers, en Tchéquie, c'est surtout Prague, Karlovy Vary et Liberec qui sont au centre de l'intérêt des étrangers. "A Prague les Américains, les Allemands, les Russes et les Vietnamiens se concentrent", a dit Ivo Gavlas, agent immobilier. Comme l'a indiqué Karel Zalsky de l'agence immobilière Interprospekt, la plus grande influence sur les prix de l'immobilier en Tchéquie, on la doit à la communauté américaine vivant à Prague. Les maisons familiales sont vendues ici, a-t-il ajouté, au prix minimal de 10 millions de couronnes, alors qu'une maison similaire ailleurs et même dans la banlieue de Prague, coûterait 4 millions de moins. L'augmentation des prix est aussi le fait de la grande demande.

Une situation contraire se présente dans des maisons ou vivent des Vietnamiens. L'intérêt des Tchèques, pour vivre avec cette communauté, est si bas que ces dernières trois années, les prix des appartements stagnent dans les immeubles où vivent les Vietnamiens. Exemple : quand un appartement de trois pièces, là où vit une communauté vietnamienne, est vendu à environ un million de couronnes, un appartement similaire, dans une maison où vivent les Allemands, coûterait 800.000 couronnes de plus. Les Américains et les Russes sont de bons clients pour les agences immobilières. Les Tchèques veulent connaître leurs voisins. Non seulement le prix, mais aussi le voisinage joue un rôle important dans le choix d'un appartement ou d'une maison. C'est une lapalissade, mais elle se trouve être, ici, une véritable loi.

La relation des Tchèques avec les étrangers influence de plus en plus le marché immobilier. Les Tchèques ne demandent pas à savoir uniquement le prix de la maison, mais aussi qui sont leurs futurs voisins. Le phénomène des cultures multi-linguistiques a commencé à prendre de l'importance sur le marché immobilier au cours des douze derniers mois. Les maisons familiales et les appartements sont de plus en plus achetés par les Allemands, les Américains et les Russes. Pavel Velebil de l'agence immobilière Tide Reality admet que les Américains, les Allemands, les Français et les Hollandais ne dérangent pas les nationaux. "Si nous répondons à nos clients que dans la maison où ils veulent acquérir un appartement, les gens de ces nationalités vont habiter, ils considèrent ce voisinage plutôt comme un plus", dit Velebil. Mais les Tchèques manifestent une certaine crainte des Orientaux. "La peur est ici sans objet", dit Petr Krajanek, porte-parole de la mairie de Prague 13, où vit la plus forte communauté russe de la capitale. "Nous n'avons pas remarqué de problèmes de cohabitation entre les nationaux, les Slovaques, les Russes et les Vietnamiens." Les agents immobiliers pensent que les communautés étrangères ont une certaine influence sur la demande dans l'immobilier en Tchéquie. D'une manière générale la collaboration avec les étrangers qui achètent ici l'immobilier est bonne dit Karel Biskup de l'agence immobilière Navatyp. "La société Navatyp a vendu quelques appartements à Prague à des personnes parlant russe. Tous ont payé leurs appartements au comptant" ajoute Biskup en précisant que la vente a été faite conformément à la législation tchèque.

Mais que veut dire, dans ce cadre, l'expression "législation tchèque" ? Elle veut dire que tous les acheteurs sont propriétaires par l'intermédiaire d'une société commerciale. Cette tendance est confirmée par Pavel Velebil de l'agence immobilière Tide Reality. "Certains cabinets d'avocat proposent à la vente des sociétés commerciales déjà créées qui ne développent aucune activité, et il est possible au cours d'une seule journée de la transférer au nom d'un nouveau propriétaire. Cette société ensuite conclut un contrat d'achat d'un appartement ou d'une maison", dit Velebil. Lors de la vente d'un bien immobilier, la nationalité de l'acquéreur ne joue aucun rôle en République tchèque. Ce sont les mêmes règles comme partout dans des économies de marché qui décident de la vente. Le bien immobilier est vendu à celui qui donne le plus ou qui vient le premier.

L'avocat Richard Pitterle de Stuttgart, qui, depuis plus de 10 ans, représente de nombreux entrepreneurs tchèques en Allemagne et leurs homologues allemands en Tchéquie, dit qu'il n'a eu affaire à aucun cas ou l'acheteur a été discriminé en raison de sa nationalité. Pitterle a une expérience similaire dans plusieurs pays.Par exemple, dans certains quartiers de Bruxelles, la majorité des maisons appartiennent à des étrangers. Dans ce cas précis aux riches commerçants marocains. Mais eux aussi vendent ou louent à celui qui payera plus et ils ne lui demandent pas ses origines.