Tariq Ramadan à Prague : il faut descendre le dialogue inter-religieux dans la rue
Encourager le dialogue inter-religieux. Telle était l'ambition d'une rencontre de représentants de différentes religions qui s'est déroulée, la semaine écoulée, à Prague, dans l'enceinte de l'ancienne église Sainte-Anne, appelée dorénavant Carrefour de Prague. Quel intérêt et quelle importance de ce genre de débat ? J'ai posé la question à l'intellectuel musulman Tariq Ramadan qui a figuré sur la liste des invités.
« Cela fait vingt ans que je suis impliqué dans ce travail-là. Donc, pour moi, c'est très important. Mais ce n'est pas très important par rapport aux gens qui sont sur le pannel, car entre nous, ce sont souvent des mots polis, les gens sont des spécialistes... Ce qui compte pour moi, c'est ce qui parvient au public, un public qui vient ici et qui voit que c'est possible de parler, que l'on a des valeurs communes, des voies communes, que parfois les différences ne sont pas toujours celles entre les religions, mais les différences à l'intérieur des personnes qui représentent la même religion. Le travail éducatif est donc très important. Il faut sortir ce dialogue inter-religieux du cadre des spécialistes, il faut le descendre dans la rue pour que les gens ce rendent compte combien c'est utile de se rencontrer ».
Quel est, aujourd'hui, le rôle d'un intellectuel musulman, rôle qui est le vôtre ?
« Il s'agit d'être enraciné dans sa propre tradition, c'est ce que j'ai d'ailleurs toujours essayé de faire... J'ai fait une formation en sciences islamiques, j'ai travaillé donc à l'intérieur. Pour être entendu de l'intérieur, il y a ce travail de formation personnelle ; au niveau académique, il faut écrire et produire une pensée qui apporte des réponses nouvelles à de nouveaux défis. Mais ce n'est pas tout. Je pense que les vrais intellectuels sont les intellectuels engagés. Il faut promouvoir au sein de la communauté musulmanne une nouvelle éducation, un esprit critique. Les musulmans croient que leur message est un grand message, mais tous les musulmans ne sont pas grands, parfois ils trahissent. L'important est de ne pas avoir une intelligence superficielle, il faut promouvoir la créativité avec des femmes et avec des hommes, pour développer une meilleure compréhension, un meilleur partenariat, une citoyenneté active, une présence confiante, à l'écoute d'autrui ».