Malgré une légère hausse statistique, l’antisémitisme reste marginal en République tchèque
Dans son rapport annuel publié début juillet, la Fédération des communautés juives en République tchèque a déclaré avoir noté une augmentation des actes antisémites dans le pays en 2018. Ces incidents restent toutefois peu nombreux et essentiellement virtuels, la Tchéquie restant ainsi toujours un pays sûr pour sa communauté juive.
Cette montée du sentiment antisémite en République tchèque est surtout visible sur Internet. Les messages publiés sur Internet et les réseaux sociaux constituent plus de 90 % de tous les incidents enregistrés. Le rapport note notamment la responsabilité de nombreux sites de propagande prorusse, comme l’explique Petr Papoušek, président de la Fédération des communautés juives en République tchèque :
« Vous avez différents types d’antisémitisme et nous voyons qu’une partie de l’antisémitisme vient de medias pro-Kremlin qui diffusent les théories du complot selon lesquelles les Juifs contrôlent les banques, les gouvernements et le monde. »
En parallèle de ces stéréotypes traditionnels, le rapport note la présence de messages visant à diaboliser l’Etat d’Israël, voire à nier sa légitimité ou son existence, une forme d’antisémitisme déguisé appelée « nouvel antisémitisme ». Dans le viseur de ce nouvel antisémitisme se trouvent notamment les membres du mouvement BDS (Boycott, désinvestissement et sanctions) qui réclament, entre autres, le boycott de l’Etat d’Israël.
Le rapport rappelle aussi la difficulté d’associer l’antisémitisme à un camp idéologique spécifique : les antisémites se trouvent autant du côté de l’extrême droite que de l’extrême gauche. Les islamistes, souvent mis en avant lors d’agressions antisémites en France, ne sont à l’origine que d’une infime partie des incidents et agressions en République tchèque, avec 0,9 % des cas.La fédération relativise toutefois cette montée de l’antisémitisme en République tchèque. Tout d’abord, il est trop tôt pour tirer des conclusions définitives d’un rapport qui survient après deux années sans la moindre donnée. Surtout, les cas d’incidents antisémites violents restent très rares : en 2018, il y aurait eu deux cas d'agression physique présentant un motif antisémite et neufs incidents comportant des menaces, du harcèlement ou des insultes, visant une personne en raison de son identité juive réelle ou supposée. La violence antisémite reste donc, pour l’instant, essentiellement cantonnée au monde virtuel.
Pour Petr Papoušek, le pays est préservé des problèmes que connaissent les Juifs en Europe de l’Ouest et en Europe centrale :
« En comparaison avec les pays d’Europe de l’Ouest, nous n’avons pas de grande communauté musulmane ou de communautés qui sont malheureusement liées au nouvel antisémitisme, ce qui explique pourquoi celui-ci est très faible ici. Mais nous n’avons pas non plus de fort antisémitisme de l’extrême droite comme chez nos voisins. Nous n’avons pas de montée en puissance d’une droite nationaliste antisémite comme en Pologne, nous n’avons pas de fort parti néonazi présent au Parlement comme en Slovaquie et nous n’avons pas non plus de Viktor Orbán avec sa campagne ambiguë contre Soros. »
Plus que l’antisémitisme, le principal obstacle à la survie de la communauté juive tchèque viendrait paradoxalement d’elle-même, toujours selon Petr Papoušek :
« Le futur est compliqué. La communauté est très petite et notre fédération ne regroupe que 2800 membres. Ce faible nombre est un problème pour l’avenir, car notre communauté n’est plus capable de se reproduire. Nous sommes arrivés à un seuil limite et il est inévitable de voir notre nombre diminuer. »