Des doctorants tchèques financés au lance-pierre

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Environ 23 000 étudiants sont en thèse en République tchèque. Mais, en moyenne, la moitié d’entre eux ne terminent pas leur doctorat. En cause notamment : le financement de leurs recherches. Les bourses sont insuffisantes et les méthodes d’attribution de cet argent varient d’une université à l’autre.

Alžběta Ruschková,  photo: Archives d'Alžběta Ruschková
« J’ai commencé il y a trois ans environ. A l’époque, les bourses étaient assez petites. On recevait environ 7 000 couronnes, à peu près 280 euros. Ce n’est pas beaucoup, vu les loyers et le coût de la vie à Prague. Et il faut aussi dire que, puisque j’avais 26 ans, l’Etat ne payait plus les assurances, l’assurance maladie et l’assurance sociale. »

Alžběta Ruschková réalise une thèse sur le théâtre contemporain dans la Suisse romande. Elle constate que les étudiants tchèques, du fait du système d’éducation local, débutent souvent tardivement leur doctorat par rapport à leurs homologues étrangers. Avec le faible niveau des bourses, cela n’est pas sans effet sur la conduite de leurs études :

« Je me suis retrouvée dans une situation où je devais payer presque un tiers de ma bourse pour les assurances qui sont obligatoires. Il me restait au final quelque 4 000 couronnes, ce qui n’est pas vivable en Tchéquie, même pour les étudiants qui habitent dans une résidence universitaire. J’ai donc été obligée de commencer à travailler. J’ai cherché un emploi, au départ à temps partiel. Mais comme les emplois à temps partiel sont quasiment inexistants en République tchèque, j’ai dû commencer à travailler à temps complet, et là, cela a commencé à être vraiment compliqué parce que mon travail me prenait pas mal de temps et j’ai été obligé d’étudier à côté. Cela a vraiment compliqué mon projet de recherche. »

Kateřina Cidlinská,  photo: ČT
La situation décrite par Alžběta, qui a même été contrainte de travailler pour Radio Prague, est commune à de nombreux doctorants, même si, selon elle, il est plus facile de trouver un financement pour une thèse dans les universités techniques. C’est pour y remédier que le ministère de l’Education a décidé au printemps d’augmenter de moitié la somme allouée aux universités pour chacun de leurs doctorants.

Mais d’après Kateřina Cidlinská, de l’Association tchèque des doctorantes et des doctorants, le problème réside également dans le système d’attribution des bourses, qui, lui, reste pour l’heure inchangé :

« Chaque faculté utilise les bourses aux doctorants selon ses propres critères. Ils ont donc des systèmes de motivation différents. Le système des bourses est exactement le même qu’auparavant, sinon que les écoles reçoivent plus d’argent. Mais elles le dépensent comme elles veulent. »

L’Etat paye aussi désormais les assurances des doctorants de plus de 26 ans, mais seulement sous réserve qu’ils ne travaillent pas. Aussi, le montant des bourses, à présent en moyenne de 11 250 couronnes par mois pour un étudiant (440 euros environ), restent insuffisant pour faire face au coût de la vie. Le ministère de l’Education, par la voix de sa porte-parole Adéla Klimešová, promet de nouveaux changements :

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« Le ministère prévoit de revoir le système d’attribution des bourses, non seulement en fonction du nombre de doctorants mais aussi sur la base d’autres critères de qualité. Pour cette qualité, une attention accrue sera également portée à l’évaluation et aux accréditations des programmes doctoraux. »

En attendant, avec des doctorants dont la thèse, normalement prévue pour durer environ trois ans, s’allonge dans le temps, et qui sont contraints de travailler en dehors des horaires de leur emploi, le soir et les weekends, la qualité de leurs travaux de recherche s’en ressent. Kateřina Cidlinská :

« La question du financement est fondamentale. Les doctorants tchèques ne sont pas plus bêtes que leurs homologues américains, mais les doctorants américains travaillent sur leur doctorat à plein temps. C’est la différence. Ils finissent donc leur doctorat plus tôt et c’est pour cela qu’ils sont de meilleure qualité. »