Le prix Karel Čapek attribué à la traductrice et écrivaine française Erika Abrams
Ambassadrice de la littérature tchèque dans le monde francophone - c’est ainsi que nous pourrions caractériser la traductrice et écrivaine Erika Abrams (*1953) qui a consacré une grande partie de sa vie à traduire des ouvrages d’auteurs tchèques en français. Son œuvre lui a déjà valu plusieurs distinctions dont la dernière, le prix Karel Čapek, lui a été décerné, mardi 9 janvier, par le PEN club tchèque.
« Erika Abrams est un phénomène. Elle a traduit la grande littérature tchèque, de grands auteurs tchèques, c’est à dire Jan Patočka, Ladislav Klíma, Václav Havel et autres. On a décerné le prix à Erika Abrams parce qu’elle est presque la seule personne qui, je dirais, mondialise la littérature tchèque par l’intermédiaire de la langue française. C’est quelqu’un qui travaille jour et nuit, qui est infatigable et très, très modeste, vous l’avez peut-être remarqué. Elle a accompli une œuvre immense dans le domaine de la traduction. »
Lors de la cérémonie à Prague, la nouvelle lauréate du prix du Pen club tchèque, a pris la parole devant l’assemblée. Elle s’est exprimée en tchèque et son intervention a été courte, pertinente et sans complaisance :
« Sincèrement, c’est un honneur tout à fait inattendu. Je me réjouis de le recevoir malgré le fait qu’en Tchéquie le journal de Karel Čapek Lidové noviny n’est plus indépendant, à l’époque où le monde de l’édition en France est régi presqu’exclusivement par des intérêts commerciaux qui rendent pratiquement impossible la publication des textes que nous pouvions encore publier dans les années 1980. Je me réjouis surtout d’avoir contribué par mes traductions aussi à la reconnaissance d’auteurs qui sont différents de Karel Čapek, auteurs indépendants et non commerciaux comme Ladislav Klíma et Richard Weiner dont les noms ont été cités ici, et même de ceux qui n’ont pas été cités comme Zbyněk Hejda et Ivan Matoušek. »Malgré les temps difficiles et le manque d’intérêt des éditeurs, Erika Abrams ne se laisse pas décourager, ne renonce pas à sa mission et poursuit imperturbablement son travail de traductrice. Jiří Dědeček constate :
« Elle continue à travailler et, ce qui nous attriste un peu, nous les auteurs contemporains, elle est très difficile. Elle ne traduit pas les ouvrages de tout un chacun. Elle fait son choix, elle choisit minutieusement les auteurs. Elle a découvert entre autres le poète philosophe Zbyněk Hejda. Oui, elle traduit tout le temps parce que la traduction est sa vie. Elle ne vit pas autrement qu’en traduisant. »
Dans quelle mesure le prix Karel Čapek pourrait-il attirer l’attention des institutions culturelles tchèques et de mécènes sur le travail d’Erika Abrams et éventuellement aider à soutenir financièrement son travail ?
« Je pense que son travail est suffisamment soutenu par le ministère de la Culture tchèque. Quand on parle de sponsors on pense toujours aux sponsors privés, aux entreprises et personnes privées. Là, je ne vois pas beaucoup de possibilités. Mais ce qui est très important, c’est que ce prix peut attirer l’attention des médias, vous en êtes un exemple, et grâce aux médias attirer aussi l’attention du ministère de la Culture qui doit constater qu’il y a quelqu’un qui mérite d’être soutenu, d’être aidé dans son travail. Pour le ministère de la Culture il est donc très important d’avoir l’écho des médias pour savoir ce qu’il faut faire pour Erika Abrams. »Nous évoquerons l’œuvre et la personnalité d’Erika Abrams, ce samedi dans la rubrique Rencontres littéraires, avec le chef du jury du PEN club tchèque Vladimír Karfík.