La montée de l’extrême droite allemande inquiète la classe politique tchèque
L’annonce des résultats des élections en Allemagne, dimanche soir, a immédiatement entraîné des réactions dans la classe politique tchèque. Au cœur de ces réactions se trouve bien entendu la nouvelle victoire de la chancelière Angela Merkel, mais aussi l’inquiétude face à la montée de l’extrême droite chez le voisin allemand.
Angela Merkel attendue
Le Premier ministre Bohuslav Sobotka (Parti social-démocrate - ČSSD) a été le premier à réagir en saluant sur Twitter la « nette victoire » d’Angela Merkel. « La chancelière devra former un gouvernement stable qui sera important pour l’Europe comme pour les relations tchéco-allemandes », s’est-il toutefois contenté d’ajouter. Au sein du gouvernement, le chef de la diplomatie et tête de liste du ČSSD pour les prochaines élections législatives s’est davantage réjoui de la victoire d’Angela Merkel. Une victoire que Lubomír Zaorálek juge propice à la stabilité :« Les relations tchéco-allemandes reposent sur des bases solides. Nous avons aujourd’hui un dialogue stratégique avec l’Allemagne. Je crois que nous le maintiendrons même après l’arrivée d’un nouveau gouvernement, parce que de bonnes relations bilatérales sont utiles et avantageuses pour les deux pays. Je crois aussi que cette coopération étroite se poursuivra, quels que soient les changements sur la scène politique allemande. »
La stabilité que sous-entend cette nouvelle victoire prévisible d’Angela Merkel rassure nombre de politiques tchèques. Ancien ambassadeur en Allemagne aujourd’hui en charge des affaires étrangères auprès du président Miloš Zeman, Rudolf Jindrak détaille ce soulagement politique :
« Le fait qu’Angela Merkel reste très probablement la chancelière allemande est une forme de garantie pour la continuité de la politique bilatérale entre l’Allemagne et la République tchèque. Les relations tchéco-allemandes ont été très bonnes ces dernières années. Je crois que cela continuera donc même après les élections. »A droite, les réactions vont dans le même sens. Petr Fiala, président du Parti démocrate civique (ODS), espère qu’Angela Merkel profitera de cette victoire démocratique pour « établir un gouvernement conservateur et corriger les quelques erreurs passées ». De son côté, Miroslav Kalousek, président de l’autre parti libéral TOP 09 se réjouit « de la victoire de l’humanisme face au populisme et à l’intolérance ».
La montée de l’AfD beaucoup commentée
Les deux autres principaux faits marquants de ces élections en Allemagne sont la percée historique du parti d’extrême droite Alternative für Deustchland (AfD) et la chute des grands partis traditionnels. La journaliste et politologue Bára Procházková détaille cette petite révolution :
« Le premier grand changement est le fait que les partis traditionnels perdent de leur popularité. Les chrétiens-démocrates ont connu la plus forte chute de leur histoire. Les sociaux-démocrates ont même réalisé leur pire résultat. L’autre grand changement est que le parti d’extrême droite AfD entrera au Parlement. Jusqu’ici ce parti n’avait été représenté que dans des assemblées parlementaires régionales. Maintenant, il sera donc aussi au Bundestag. »La droite tchèque s’inquiète de ce record électoral. Petr Fiala estime qu’il s’agit d’une réaction imputable à la politique migratoire allemande, là où Miroslav Kalousek préfère y voir les conséquences de la propagande russe. De l’autre côté de l’échiquier politique, Vojtěch Filip, président du Parti communiste de Bohême et de Moravie, déplore le succès des « populistes de droite ». Selon lui, le résultat de dimanche « n’est une bonne nouvelle ni pour l’Allemagne ni pour l’Europe et il est clair qu’il y a une grande désillusion dans la société allemande ».
Enfin, Andrej Babiš se veut, lui, résolument pessimiste : le leader du mouvement ANO, favori des élections qui approchent, désigne ainsi l’AfD comme le grand vainqueur de l’élection. « L’AfD a mis l’accent sur la question des réfugiés et de la sécurité » a-t-il noté. Par ailleurs, Andrej Babiš n’a pas oublié d’avoir une petite pensée pour les socialistes de Martin Schulz et du SPD, deuxièmes du scrutin avec un score décevant de 20% : « Les socialistes montrent que leur politique détruit non seulement eux-mêmes, mais aussi l’Europe dans son ensemble ».
Lundi après-midi, Miloš Zeman n’avait pas encore réagi à la victoire d’Angela Merkel. La semaine dernière, le président de la République s’était entretenu avec son homologue allemand Frank-Walter Steinmeier au sujet des relations entre les deux Etats, ces dernières étant peut-être appelées à évoluer après les élections tchèques en octobre prochain.