Un dernier regard sur 2016
366 jours exactement se sont écoulés depuis le précédent 31 décembre. C’était en 2015. Aujourd’hui, le doute n’est plus permis. Demain, le 1er janvier, marquera le début d’une nouvelle année, sans doute l’année 2017. Si tel est bien le cas, toute la rédaction française de Radio Prague vous souhaite à toutes et à tous ses meilleurs vœux de bonheur sur notre planète Terre pour cette nouvelle année à venir.
Une vieille recette du bonheur
A tout seigneur tout honneur, on débute avec Václav Richter qui constate que quand une année touche à sa fin, c’est le moment où l’on se pose beaucoup de questions du genre : « l’année écoulée a-t-elle été heureuse ? », « avons-nous été heureux ? », « que faut-il faire pour être heureux ? », etc. Une des réponses possibles lui a été apporté lors d’un entretien avec Dagmar Pichová, maître de conférences à l’Université Masaryk de Brno. Dagmar Pichová a en effet traduit en tchèque et annoté l’essai intitulé « Discours sur le bonheur ». Son auteure, la marquise Emilie du Châtelet, a vécu dans la première moitié du XVIIIe siècle mais ses idées ne manquent pas d’intérêt encore aujourd’hui…
Qu’est-ce que Emilie du Châtelet conseille donc surtout à ses lecteurs pour atteindre le bonheur ?« Emilie du Châtelet nous offre toute une recette du bonheur, c’est-à-dire, elle nous donne les conditions qu’il faut respecter. Pourtant, dans son essai, elle accumule aussi les contre-exemples. Elle nous montre les situations dans lesquelles le bonheur ne se présente pas malgré l’observation des conditions prescrites. A vrai dire, elle est plutôt pessimiste. Le bonheur est un état exceptionnel. »
Etre vertueux, selon Mme du Châtelet, mène à la satisfaction intérieure, c’est-à-dire à la santé de l’âme et au bonheur. La biographie d’Emilie du Châtelet démontre cependant qu’elle n’était pas une femme vertueuse dans le sens traditionnel du mot. Sa vie amoureuse a été riche et compliquée. Quelle a été donc sa conception de la vertu ?
« La conception de la vertu est différente au XVIIIe siècle. Etre vertueux pour Emilie du Châtelet ou pour Voltaire est se comporter bien avec les autres. Le fait de vivre avec Voltaire même avec l’accord de son mari, le marquis du Châtelet, n’était pas vu par elle comme un problème de vertu. Il fallait garder les apparences du mariage en raison des bienséances, pas en raison d’une morale liée par exemple à la conception de la chasteté et de la pudeur. »
Dans son discours, Emilie parle aussi de la condition de la femme et de ses possibilités d’atteindre le bonheur, possibilités qu’elle considère comme assez restreintes par rapport à celles des hommes. Que conseille-t-elle donc aux femmes de son époque?
« Oui, le bonheur des femmes est plus difficile à atteindre. Les ambitions des femmes, mais aussi leurs goûts et leurs passions sont nécessairement limitées par la société. Il leur reste l’étude où les femmes pourraient approfondir leurs intérêts intellectuels. Mais il faut noter que les passions intellectuelles restent toujours à l’ombre de la plus grande passion humaine - l’amour. »
Kamel Daoud, le crime et le châtiment
Normalement c’est Václav Richter qui s’occupe de littérature sur Radio Prague, mais il n’est pas le seul dans la rédaction à avoir un faible pour les belles lettres. A l’automne dernier, Magdalena Hrozínková a ainsi eu l’opportunité de rencontrer Kamel Daoud, le principal invité du 26e Festival des écrivains, qui était organisé dans la capitale tchèque cet automne et conçu cette année autour du thème du crime et du châtiment. C’était un thème tout trouvé pour le dernier roman de l’écrivain algérien, « Meursault, contre-enquête », inspiré par « L’Etranger » de Camus. L’occasion pour Kamel Daoud de discuter de ses inspirations :
Le thème central de ce Festival des écrivains est le crime et le châtiment. De quelle façon l’avez-vous traité dans votre roman « Meursault, contre-enquête » ? Et comment avez-vous eu l’idée de reprendre le sujet de « L’Etranger » d’Albert Camus et de le développer à votre manière ?« Nous avons des explications conscientes et des raisons inconscientes. Je suis quelqu’un qui aime continuer des livres. Je suis un lecteur frustré, je suis né dans un village où il n’y avait pas de livres. Parfois, je prenais juste des titres, à la fin du livre, et j’imaginais des histoires… J’aime bien cette façon de fantasmer, de continuer les histoires de chefs-d’œuvre. C’est une raison consciente. L’autre explication consciente est que je suis Algérien et que Camus fait partie de l’histoire douloureuse de l’Algérie. D’une manière ou d’une autre, à un moment où à un autre, un tel roman devait être écrit, par moi ou par quelqu’un d’autre. C’est une nécessité de l’histoire.
L’idée vient aussi d’un peu de colère, car je n’aime pas les débats qui sont menés sur Camus en Algérie et en France et qui se demandent à quel pays il appartient, quelle est sa nationalité. Camus était un grand interrogateur du XXe siècle. C’est un grand philosophe qui a vécu ses idées par la chair et pas seulement par l’aspect cérébral. J’aime cet aspect-là, cet équilibre très précis entre l’idée et la métaphore, par le style. C’est quelqu’un qui me touche. J’ai aimé l’interroger, le secouer, le pousser. J’ai aimé investir son univers pour continuer. C’est quelque chose qui me tenait à cœur, cela fait partie de ma façon d’admirer Camus, tout en étant insolent avec lui. »
Qu’en est-il du crime et du châtiment dans vos écrits ?
« Je viens d’un univers où le châtiment est plus grand que le crime. On est coupable d’être venu au monde, d’être né après l’indépendance et de ne pas voir fait la guerre de libération. Les monothéismes ont ce propre de culpabiliser la vie de l’homme de par sa naissance avant même qu’il ne fasse quoi que ce soit. L’idée chez nous, un peu chez vous, dans cet univers théologique de la Méditerranée, c’est que le châtiment est là, parce que le seul crime est d’être né, d’être tombé du paradis, d’assumer cette faiblesse humaine - qu’on qualifie de faiblesse mais qui ne l’est pas - de désirer aussi. Il y a aussi le châtiment pour révolte et rébellion politique. Nous vivons dans des espaces politiques très clos. C’était le cas de la République tchèque jusqu’au début des années 1990. On est tous coupables, on mérite tous le châtiment, jusqu’à preuve du contraire. Nos droits nous sont donnés comme privilège, alors que ce sont nos droits.
J’aime bien cette idée du crime et du châtiment parce qu’elle résume tout à la fois le complexe chrétien, la culture musulmane, l’aspect politique chez nous, ce rapport complexe à la vie, ce sentiment de culpabilité qui précède même l’acte, l’engagement. Cela conditionne beaucoup de choses dans nos vies. Je pense que la littérature est un exercice de reconstruction de l’innocence : je dois expliquer que je suis humain, alors que tout me condamne, parce que je suis humain. »
Vous avez été confronté à de nombreuses critiques, non seulement en Algérie mais aussi en France, notamment lorsque vous avez publié un article dans Le Monde après les agressions perpétrées aux femmes à Cologne, en Allemagne, la nuit du Nouvel An. Vous dites que ce qui représente le problème des pays arabo-musulmanes, c’est leur rapport à la femme, au corps, au désir, à la sexualité, à Dieu… Pourriez-vous expliquer votre vision de l’Islam ?
« Je pense que ce que j’avais à dire, je l’ai déjà dit dans cet article. J’ai dit que nous avons un problème profond avec le désir du monde, avec l’envie d’aimer et d’être aimé, avec la femme. On ne peut pas aimer le monde si on déteste la femme. On ne peut pas jouir du monde si on veut voiler la femme. On ne peut pas être heureux dans le monde si à la fois on refuse le désir que nous inspire la femme. C’est quand même la moitié de notre population ne fait rien, c’est la moitié de notre population qui est condamnée, voilée, cachée, enterrée, enfermée dans les maisons. C’est la moitié de nos forces et c’est notre meilleure moitié parce qu'elle donne du sens au désir. Qu’est-ce qu’un monde où je ne peux pas désirer ? Qu’est-ce qu’un monde où le désir est une honte ou un crime ? Cela veut dire que je vais vivre toute la vie comme un châtiment.
Ma vision de l’Islam, c’est une vision ouverte, réformée, libre qui restitue la dignité à l’homme, qui restitue son importance à la vie. La vie nous n’a pas été donnée pour être détruite et ignorée dans une sorte d’excès d’ascétisme à la manière chrétienne du XVe ou du XVIe siècle. Non. La vie nous a été donnée comme objet et comme sujet de jouissance. Donc, il faut en jouir. Je n’aime pas l’Islam des islamistes. J’aime l’Islam qui donne sa dignité, sa valeur à la vie. J’aime que l’homme soit libre. Je pense que la religion est un choix et non pas une obligation. »
Le retour de Georges Méliès
La littérature c’est bien, mais le cinéma ce n’est pas mal non plus. Surtout quand on met la main dans une collection privée sur un film qu’on croyait perdu de Georges Méliès, le grand maître illusionniste, un des pionniers du septième art. Ce sont les Archives nationales de République tchèque qui on fait cette découverte exceptionnelle. Le court-métrage a pu être projeté à Prague à l’automne grâce au travail de la restauratrice française Jeanne Pommeau, qui a détaillé les modalités de la trouvaille au micro d’Alžběta Ruschková :
« Il s’agit d’un petit film de Georges Méliès. Il manque en fait le début mais nous avons les deux tiers d’un petit film qui s’appelle ‘Match de prestidigitation’. Nous n’avons pas trouvé d’autres traces de ce film dans le monde. Il est réputé comme perdu et l’était déjà dans les années 1980 quand on a effectué une grosse recherche sur les films perdus. C’est donc un film que l’on n’a pas vu très probablement depuis une centaine d’années. »Comment l’avez-vous découvert ?
« C’était grâce à un don qui a été fait aux Archives nationales du film. Il y avait une bobine qui comportait trois petits films. Sur la boîte, il était indiqué qu’il s’agissait des ‘Transmutations imperceptibles’, un film de Méliès datant de 1904. Et c’est un film qui est relativement connu. Quand nous avons ouvert la boîte, nous nous sommes rendus compte que ce ne pouvait pas être ce film-là, parce qu’il ne s’agissait pas du tout des mêmes images.
Mais en regardant le film, nous avons appris que c’était bel et bien un film de Méliès. On a pu le voir grâce au fait que Méliès lui-même jouait dans le film, grâce au copyright au milieu de l’image et grâce à un photogramme à la fin du film que Méliès avait aussi utilisé comme son copyright et qui indiquait la date 1904. Cela nous a permis de regarder dans les scénarios perdus, et en particulier dans un livre édité par l’Association des amis de Georges Méliès qui s’appelle ‘158 scénarios de films perdus de Georges Méliès’. Cela était donc un premier pas pour identifier ce film. Ensuite, en recherchant dans le catalogue original américain qui se trouve à la Cinémathèque française à Paris, nous avons pu vérifier que le scénario de ce catalogue de Méliès correspond à notre film, tant du point de vue de l’histoire que du point de vue de la description du décor. »
Vous êtes-vous toute de suite rendue compte qu’il s’agissait d’un film perdu ?
« Oui, relativement vite. La filmographie de Georges Méliès est assez connue. De plus, nous sommes chargés du catalogage de ses films. Nous connaissons assez bien la documentation sur Georges Méliès. Nous nous sommes donc rendus compte assez vite que ce film-là n’existait nulle part et qu’il était vraisemblablement inconnu. Après, une petite recherche a suffi pour le vérifier. »
Cela a dû être un moment assez fort… Qu’est-ce que vous avez ressenti après la découverte du film ?
« C’était évidemment très excitant. Mais c’est aussi très troublant. Si une chose pareille arrive une fois dans la vie, c’est déjà un miracle. C’était donc un grand choc de faire cette découverte d’un petit film de Méliès. »
Avez-vous déjà présenté votre trouvaille en France ?
« Non. Puisque la découverte a été faite à Prague, il était très important pour nous de montrer le film pour la première fois à Prague, et plus précisément dans le cinéma Ponrepo. Cela est pour moi aussi très intéressant parce que ce cinéma s’est vu donner son nom d’après Viktor Ponrepo qui était au départ, lui aussi, un illusionniste, avant de créer la première salle de cinéma à Prague. Je trouve donc que cela fait sens, de lier ces deux personnalités là. »
Charles IV et le Grand-duc Henri de Luxembourg
Ce n’est pas tous les jours que l’on peut interroger un chef d’Etat, qui plus est en tête-à-tête. Guillaume Narguet a eu ce privilège un samedi de mai dernier avec Henri de Luxembourg, un cadeau de Noël avant l’heure. Présent à Prague pour les célébrations officielles du 700e anniversaire de la naissance de Charles IV, le Grand-duc lui a consacré une bonne vingtaine de minutes, juste le temps qu’il fallait pour évoquer la figure de ce grand souverain de l’histoire européenne, mais aussi quelques souvenirs de ses visites en République tchèque. Henri de Luxembourg au micro de GN :
Monseigneur, vous êtes à Prague pour les célébrations qui marquent le 700e anniversaire de la naissance de Charles IV, mais vous l’étiez déjà également en 2010 pour un autre 700e anniversaire, celui du couronnement de Jean de Luxembourg, dit l’Aveugle, qui avait marqué l’arrivée de la maison de Luxembourg sur le trône de Bohême. Dans quelle mesure s’agit-il d’événements importants pour vous en tant que chef de l’Etat luxembourgeois ?« Je crois que tout aspect historique doit toujours être souligné. Dans les deux cas, que ce soit en 2010 ou 2016, il est important de rappeler que ces deux personnages, parmi lesquels Charles IV est une personnalité très importante du Moyen-âge, sont issus du Luxembourg et ont régné à travers toute l’Europe, et notamment ici en Bohême. Tous deux ont grandement contribué à l’essor de la ville de Prague avec, entre autres, la fondation d’une université. Et au-delà, je trouve que ce sont deux événements très importants aussi pour relier nos deux pays. »
Que représente Charles, et peut-être plus encore son père Jean, pour les Luxembourgeois aujourd’hui ? Sont-ils aussi, comme ils le sont en République tchèque, des personnages marquants de l’histoire de votre pays ?
« Certainement que Jean l’Aveugle, Jang de Blannen comme nous l’appelons au Luxembourg, représente quelqu’un de très important. Au fond, c’est l’esprit chevaleresque qui ressort de ce personnage. Son décès à la bataille de Crécy est quelque chose de très connu. C’est pourquoi dans la mémoire populaire, Jean l’Aveugle ressort plus particulièrement. »
Les Tchèques considèrent Charles IV un peu comme « leur père ». Mais en tant qu’empereur romain germanique, son influence s’étalait bien au-delà du royaume de Bohême. A quoi donc, en tant que Luxembourgeois, associez-vous le nom de Charles ?
« Personnellement, je l’associe beaucoup plus à l’idée de premier véritable Européen. Il est né au Luxembourg avant de beaucoup se promener en Europe. Comme son père d’ailleurs, il se déplaçait constamment à cheval à travers toutes les contrées du continent, qu’ils ont réussi à unifier pour créer cette monarchie allemande et de Bohême qui a véritablement marqué profondément l’histoire de l’Europe. »
Vous avez été reçu au Château de Prague par le président Miloš Zeman. Le contenu de vos échanges a-t-il été marqué lui aussi par l’histoire et ce qui lie le Luxembourg et la République tchèque ?
« Je me suis déplacé assez souvent en République tchèque. La première fois, c’était pour une visite d’Etat en 2000, quand Václav Havel était le président. Lors de chaque visite, l’aspect historique ressort profondément. Les Tchèques sont attachés à ce lien avec le Luxembourg. Un des premiers voyages officiels de Václav Havel en tant que président de la République l’a conduit au Luxembourg… et la dernière visite d’Etat qu’il a reçue, c’était nous. Cela montre les liens tout à fait particuliers qui existent. Il y a aussi beaucoup de Tchèques qui se déplacent à Luxembourg, et ce déjà à l’époque du communisme, pour aller voir le père de Charles, Jean, dont la dépouille se trouve dans la crypte de la cathédrale Notre-Dame de Luxembourg. »
Vous étiez venu en 2010 et étiez de retour à Prague cette année, à chaque fois en de grandes occasions. A quand donc votre prochaine visite en République tchèque ?
« Peut-être viendrai-je de façon privée… Je trouve que Prague est une des plus belles villes au monde. Avec mon épouse, nous y étions venus il y a vingt-cinq ans de cela en voiture depuis le Luxembourg. C’était même encore assez difficile de passer la frontière, mais chaque visite est une redécouverte de la beauté de la ville. »
Quel regard portez-vous donc sur l’évolution du pays depuis ce voyage initiatique peu après la révolution ?
« Forcément, il y a eu une évolution énorme. Je me rappelle encore de cette Prague grise avec ses façades enfumées. On voyait le potentiel, mais je dois avouer que c’était un peu déprimant. Aujourd’hui, c’est une ville lumineuse remplie de gens avec beaucoup de touristes qui profitent du cadre. Mais il n’y a pas que Prague. Il y a aussi tout ce qu’il y a autour. Avec sa chapelle, le château de Karlštejn est une de ces nombreuses merveilles qui valent vraiment la peine d’être découvertes. »
Comme dans les tableaux
Il a été question de littérature, de cinéma et d’histoire. La boucle ne serait pas bouclée sans une touche de peinture. Et l’événement en la matière cette année 2016, c’est l’exposition consacrée au Douanier Rousseau au palais Kinský, au cœur de Prague. C’est la toute première fois que ce peintre majeur du tournant des XIXe et XXe siècles, considéré comme le grand représentant de l’art naïf et connu pour ses peintures représentant des jungles luxuriantes et des combats de fauves et d’autres bestioles, bénéficie d’une telle rétrospective en République tchèque. L’exposition, dont sa commissaire Kristýna Brožová nous a offert une visite guidée, est encore ouverte jusqu’à la mi-janvier 2017…
Longtemps les toiles peintes par Henri Rousseau, ce natif de la ville de Laval qui a vu le jour en 1844, ont suscité l’incompréhension. La simplicité de son coup de pinceau, son absence de perspective, le caractère peu expressif des personnages qu’il peint, l’aspect enfantin de ses tableaux, tout cela fait l’objet de moqueries.Il faut atteindre la fin du siècle pour que le Douanier puisse se consacrer entièrement à la peinture et commencer à acquérir une reconnaissance qu’il doit grandement à la génération à venir, celle qui va amener les révolutions artistiques du début du XXe siècle. Voilà ce que nous a tout d’abord expliqué Kristýna Brožová, avant de revenir sur la genèse d’une exposition qui témoigne rétrospectivement de l’importance de l’influence de la peinture de Rousseau :
« Il y avait plusieurs jeunes peintres qui ont commencé à aimer ses œuvres, par exemple Pablo Picasso, Félix Vallotton, Robert Delaunay… Ces jeunes peintres ont commencé à aimer ces tableaux plutôt à la fin de sa vie. En 1906-1907, il a fait la connaissance de plusieurs peintres et galeristes et il a commencé à vendre des tableaux. »
Qu’est-ce qu’ils ont trouvé dans ces tableaux ? Qu’est-ce qui leur a plu dans ce style assez unique ?
« Quand on voit un tableau du Douanier Rousseau, on sait que c’est le Douanier Rousseau, parce qu’il simplifiait toutes les choses mais pensait être un peintre réaliste, car il voulait peindre tous les détails, toutes les couleurs. Et ses tableaux sont un peu vivants. »
Ces tableaux sont actuellement montrés à Prague dans le cadre de cette exposition, « Le Douanier Rousseau et ses paradis perdus ». C’est une exposition qui a été montré auparavant à Venise et à Paris. Comment la Galerie nationale a-t-elle organisé l’exposition et la montre à son tour ?
« L’exposition est organisée grâce à la coopération avec le musée d’Orsay. Les auteurs de l’exposition Gabriella Belli et Guy Cogeval ont beaucoup aidé pour préparer cette exposition, ainsi que les commissaires de l’exposition à Paris, Claire Bernardi et Beatrice Avanzi en ce qui concerne les prêts des œuvres. Ce sont en effet le musée d’Orsay et le musée de l’Orangerie qui ont prêté plusieurs tableaux. »
L’exposition permet de tordre le cou à certaines légendes autour du Douanier Rousseau. Quelles sont ces légendes ?
« Par exemple en réalité, le Douanier Rousseau n’était pas douanier, il travaillait à l’octroi. Une autre légende qui est très connue, c’est que beaucoup de gens pensent qu’il est allé au Mexique. Mais ce n’est pas vrai, il est resté toute sa vie en France. »
Il y aussi la question de son académisme. On a prétendu ou il a prétendu qu’il était autodidacte, qu’il avait appris la peinture tout seul. Or ce n’est pas tout à fait exact…
« Ce n’est pas tout à fait exact parce qu’il a reçu des conseils de deux peintres académiques, de Gérôme et Clément. Et aussi, grâce à Clément, il a reçu la carte de copiste pour les galeries françaises. Il pouvait par exemple faire des copies au musée du Louvre et dans les autres galeries. »
Ainsi Henri Rousseau doit son surnom du douanier à son ami, ce farceur d’Alfred Jarry. Jusqu’en dans les années 1890, il travaille en effet, non pas comme douanier, mais à l’octroi de Paris, une institution chargée de collecter les taxes sur les marchandises entrant dans la capitale. Auparavant, il était dans l’armée, où il s’était engagé comme volontaire. De là provient cet autre mythe associé à la figure de Rousseau, selon lequel il aurait été de l’expédition militaire française au Mexique dans les années 1860, expérience qui aurait influencé ses travaux de peinture. S’il a pu discuter avec des soldats ayant participé à cette aventure, il n’a jamais traversé l’Atlantique pas plus qu’il n’a participé à la moindre bataille lors de la guerre avec la Prusse. Au-delà de ces légendes, l’exposition pragoise permet de se familiariser avec différents aspects de l’œuvre du Douanier Rousseau…
Pour Radio Prague, 2016, c’est terminé, il est désormais temps de se pencher sur 2017, en vous souhaitant une fois de plus à toutes et à tous une excellente année, « Šťastný Nový rok ! ». Et si vous voulez nous combler de joie, n’hésitez pas à prendre la bonne résolution de consulter avec une fréquence accrue notre site internet et de vous abonner à nos pages facebook et twitter !