L’islamophobe Martin Konvička simule une « invasion islamiste » au cœur de Prague
Profitant des commémorations de l’écrasement du Printemps de Prague, l’islamophobe Martin Konvička et quelques-uns de ses sbires ont à nouveau réussi à faire parler d’eux dimanche en simulant dans le centre de la capitale tchèque une « invasion de l’Etat islamique ». Circulant sur la place de la Vieille-Ville à dos de chameau et en Hummer, en lançant des «Allahu akbar » et en tirant au ciel avec des armes factices, ils ont provoqué un début de panique et la police a dû mettre fin à ce triste spectacle. Une « blague » qui pourrait valoir des ennuis judiciaires à ses auteurs.
Pour mener à bien sa mission, il a tout d’abord été à l’initiative d’un groupe Facebook intitulé « Nous ne voulons pas de l’islam en République tchèque », qui agrègent toutes les informations négatives, les rumeurs, les préjugés et les blagues de mauvais goût voire racistes sur les musulmans. Rassemblant jusqu’à 160 000 « fans », parodié par un groupe répondant au nom de « Nous ne voulons pas de l’Islande en République tchèque », cette page a été supprimée à plusieurs reprises par Facebook car contrevenant aux règles du site.
Surfant sur les peurs liées au terrorisme et aux migrations, elle a connu une première déclinaison politique avec la création à l’été 2015 du groupuscule « Bloc contre l’islam », un mouvement qui a disparu en mai dernier après l’échec du projet d’alliance électorale avec le parti de l’Aube en vue des régionales et des sénatoriales de l’automne. Depuis lors ont été créées « l’Alternative pour la République tchèque », un parti d’extrême-droite s’inspirant de l’Alternative pour l’Allemagne (AfD), ainsi que l’Initiative de Martin Konvička.C’est cette dernière structure qui est responsable de l’action organisée dimanche sur la place de la Vielle-Ville. En début d’après-midi, Martin Konvička y débarque à dos de chameau, avec une barbichette postiche. Il est suivi par un véhicule tout-terrain dans laquelle se dressent des hommes vêtus d’un uniforme kaki et qui arborent de fausses armes et un drapeau noir rappelant celui de l’organisation de l’Etat islamique. Parmi les spectateurs involontaires de cette scène, certains réalisent qu’il s’agit d’une sorte de happening. D’autres prennent réellement peur si l’on en croit le porte-parole de la police de la municipalité de Prague Tomáš Hulan :
« Cela a créé une situation très confuse. Des gens ont commencé à fuir la place, à se cacher là où c’était possible. Quand cette situation exceptionnelle n’a plus été supportable, nous avons commencé à intervenir pour mettre fin à cette action avec la médiation de fonctionnaires de la municipalité. »Martin Konvička et ses acolytes s’apprêtaient alors à simuler l’exécution d’un captif portant un vêtement orange. En ce 21 août, date anniversaire de l’invasion de la Tchécoslovaquie par les troupes du Pacte de Varsovie en 1968, le biologiste voulait ainsi mettre en garde contre la nouvelle menace d’invasion à laquelle les Tchèques feraient face.
Le rassemblement, « un succès » selon son principal protagoniste qui souhaitait « choquer », a suscité des réactions très variées et souvent très négatives. Restaurateur dans le quartier juif de Prague, situé près de la place de la Vieille-Ville, Aaron Günsberger, interrogé par le site iDnes.cz, a peu goûté la plaisanterie : « ils ont causé une honte internationale à la République tchèque ».
Le ministre de l’Intérieur Milan Chovanec, cible récurrente des islamophobes qui critiquent sa politique migratoire, pourtant restrictive, s’est exprimé sur le réseau social Twitter : « L’action d’aujourd’hui sur la place de la Vieille-Ville est l’expression d’un crétinisme civique et politique. » L’expression d’un crétinisme qui, selon Tomáš Hulan, pourrait faire l’objet de poursuites :« Pour l’heure, nous considérons qu’il y a acte délictueux pour diffusion d’une fausse information alarmante. Personne n’a cependant été arrêté et il a seulement été demandé à huit personnes de se rendre auprès des services de police pour fournir des explications. Un appel que ces individus ont respecté. »
Le rassemblement avait bel et bien été notifié auprès des autorités. D’après Vít Hofman, le porte-parole de la mairie, il n’était alors pas possible d’en connaître le contenu exact et il était donc difficile de l’interdire. Pour sa part, la maire de Prague Adriana Krnáčová (ANO), qui évoque un détournement de la mémoire d’août 1968, estime que cette action aura des conséquences judiciaires. Ses organisateurs pourraient être inculpés non pour propagation d’une fausse information alarmante mais pour un trouble à l’ordre public.