Mondial - Hockey : en France, une (r)évolution en marche
Annoncé comme l’un des principaux événements organisés en République tchèque cette année et une grande fête populaire, le championnat du monde de hockey sur glace est jusqu’à présent une véritable réussite à Prague comme à Ostrava. Félicités par l’ensemble des délégations étrangères et la fédération internationale pour la qualité de leur travail, les organisateurs devraient parvenir à l’objectif qu’ils s’étaient fixés avant le début du tournoi : battre le record d’affluence pour un Mondial avec plus de 700 000 spectateurs. Malgré ses résultats décevants et la perspective d’un match couperet contre la Lettonie pour son maintien dans l’élite ce mardi, l’équipe de France a, elle aussi, bien profité de ce Mondial tchèque. C’est ce que nous a confié, jeudi dernier, Eric Ropert, directeur général d’une fédération française de hockey sur glace (FFHG) qui s’apprête à son tour à co-organiser le championnat du monde avec l’Allemagne en 2017. Une heure avant le match entre la République tchèque et la France à l’O2 Arena, Eric Ropert nous a d’abord donné une idée de ce que représentait pour les hockeyeurs français cette confrontation à Prague :
-Ce jeudi, avant le match, le journal Mladá fronta Dnes, qui est le quotidien d’information le plus lu en République tchèque, a consacré une page pleine à l’équipe de France en rappelant notamment ses victoires contre le Canada et la Slovaquie l’année dernière et en présentant ce qu’il appelle la révolution en marche du hockey français. Ressentez-vous cette reconnaissance des Tchèques et des autres grandes nations pour l’équipe de France et ses progrès réalisés ces dernières années ?
« On le ressent dans le monde des sportifs et des dirigeants des fédérations. Désormais, les grandes nations sont prêtes à venir jouer contre nous en matchs de préparation, ce qui n’était jamais le cas il y a quelques années de cela. On a joué le Canada à Paris, reçu la Slovaquie, la Russie, les Etats-Unis… On ressent donc cette considération au niveau sportif et aussi celui de l’organisation de notre jeune fédération. Nous avons créée celle-ci en 2006 en sortant le hockey de la Fédération française des sports de glace. Et le fait que l’on nous ait attribué l’organisation du Mondial 2017 est justement une reconnaissance de cette évolution d’abord sportive mais aussi de notre capacité à nous développer. Même s’il s’agit d’une co-organisation avec l’Allemagne, qui est une puissance économique du hockey et qui a déjà réalisé quelques performances, cette décision montre que le respect vis-à-vis de la France du monde du hockey évolue. On ne nous regarde plus du même œil. Après, il ne faut pas oublier que l’équipe de France a disputé l’année dernière son premier quart de finale d’un Mondial depuis dix-neuf ans. On n’est pas arrivés. On le voit bien cette année avec des résultats qui sont plus compliqués. Alors, oui, on se développe petit à petit, mais les étapes à franchir sont nombreuses, tant au niveau sportif que de l’organisation, même s’il y a désormais un vrai intérêt pour nous dans les médias tchèques, alors qu’il n’est pas facile de se faire une place pour un sport comme le nôtre. TF1 a fait un reportage sur l’équipe de France à Prague en début de semaine, des journalistes du Monde étaient là… »-Même Radio Prague s’intéresse à vous…
« Absolument ! Nous nous efforçons de nous rendre disponibles, cela fait partie de notre rôle. En plus, nous avons la chance d’avoir des joueurs extraordinaires d’un point de vue humain. Prendre la parole est important pour faire partager notre passion et c’est toujours intéressant. »-Au-delà des résultats de l’équipe de France, quel est votre sentiment sur ce Mondial organisé par la République tchèque ?
« D’un point de vue organisationnel, on est vraiment bluffés. C’est parfait. Il y a toujours des petits problèmes, mais c’est normal. Et surtout, ils sont très vite résolus. Les gens sont efficaces, sympas, souriants. L’accueil… Que ce soit pour les sportifs, notre délégation, les gens qui s’occupent de la presse ou nous, les officiels des fédérations, pour tout le monde, tout se passe à merveille. Comme nous préparons 2017, nous avons beaucoup d’invités à chaque match de l’équipe de France, des médias, des partenaires... Et pour cela, les organisateurs nous mettent une loge à l’O2 Arena gratuitement à disposition. Ils font le maximum pour que tout se passe très bien. Que dire encore ? La salle est pleine, le public est enthousiaste, les animations dans la salle sont très réussies, ça n’arrête pas de bouger… Toutes les délégations s’accordent pour dire que c’est un Mondial hyper bien organisé. Tout le monde a plaisir à être ici. Les organisateurs ont vraiment fait un super boulot. »
-On suppose que votre objectif est de faire au moins aussi bien pour le Mondial 2017.
« Effectivement, mais je ne sais pas si on y arrivera. Pour nous, l’objectif en 2017 est de faire passer un cap au hockey en France. L’idée est de faire partager et découvrir ce sport au plus grand nombre. La nature du hockey fait que quand les gens ne le connaissent pas tellement mais le voient en vrai depuis les tribunes, ils repartent séduits. C’est plus difficile à la télévision parce que la vitesse notamment du palet rend la chose plus complexe. C’est donc ça le grand objectif de ce Mondial à Paris : faire connaître notre sport, nous montrer sous notre meilleur visage et avoir aussi ce côté sympa avec des bénévoles engagés et sympas comme c’est le cas ici en République tchèque. On sort d’ailleurs de deux jours de réunion avec les organisateurs de Prague et d’Ostrava pour partager les expériences. »« Il y a plein de choses que nous avons notées. Par exemple comment ils ont pensé le fan village à côté de la salle, comment ils ont planifié les animations, comment ils ont recruté et formé les bénévoles, etc. C’est important de discuter avec un organisateur qui a du succès. Cela permet de voir ce qui est vraiment propriétaire et ce qui l’est un peu moins. Ce matin, nous avons également visité toutes les installations. Et cette salle de Prague est assez phénoménale avec beaucoup d’espaces qui permettent de bien organiser l’accueil des journalistes et des équipes. Cela va nous permettre de mieux envisager l’accueil dans la salle à Bercy pour que chaque ‘population’, que ce soit les spectateurs, les sportifs, les arbitres, les médias, soit satisfaite au maximum et reparte en gardant un bon souvenir non seulement de Paris, une ville déjà attractive en elle-même, mais aussi du hockey français et de son organisation de ce type d’événement. »
-Quelle est la présence française à Prague durant ce Mondial ?
« Nous avons vingt-deux journalistes accrédités, ce qui est plutôt pas mal et nous place par exemple au niveau des Allemands, alors que le hockey de la ligue allemande est très fort. Nous avons également invité un certain nombre d’entreprises. Thalys, la société ferroviaire qui relie Cologne et Paris, les deux villes où se tiendront le Mondial 2017, a signé un contrat de partenariat avec l’équipe organisatrice. D’autres entreprises sont venues, notamment avec la région Ile-de-France et la Ville de Paris. Il n’y a rien de phénoménal, mais il n’y a jamais non plus de miracle dans ce type d’activités, sauf si on était champions du monde et champions olympiques. Tout cela demande du temps. Quelque chose se développe petit à petit. On a signé un nouveau partenaire pour l’équipe de France cette année, justement parce qu’il y aura le championnat du monde en France derrière. Il y a un petit cercle vertueux qui se met en place, mais une maison se construit brique après brique. On fait encore de l’artisanat. »-On l’a dit, l’équipe de France a bien progressé ces dernières années, mais l’équilibre reste fragile. Que signifierait pour vous une éventuelle relégation du groupe Elite lors de ce Mondial ? Serait-ce une catastrophe ?
« Ce serait forcément un gros problème. Au niveau sportif, ce serait très embêtant. Et puis au niveau du dynamisme global du projet forcément : on peut être les meilleurs en marketing, en communication, en relations presse et dans tout ce qu’on veut, s’il n’y a pas de résultats sportifs, il ne se passe rien. Mais vous savez, à la tête de la FFHG, on est tous des anciens joueurs et on aime les challenges. Donc, si l’équipe de France était reléguée, on ferait tout pour que remonter le plus vite possible et que les projets que nous avons lancés puissent continuer. »-On parle de l’intérêt grandissant des médias et du public, mais quid des licenciés, surtout que le hockey est un sport qui nécessite un certain nombre d’équipements comme des patinoires et dont la pratique coûte relativement cher. Ce n’est pas évident pour tout le monde. Cela pose problème même en République tchèque. Qu’en est-il en France ?
« On a une progression non pas importante mais relativement intéressante depuis que nous avons créé la FFHG. Nous avions alors moins de 17 000 licenciés et nous venons de dépasser les 20 000 pour 120 clubs de hockey en France. C’est faible pour une population de 65 millions d’habitants, mais le vrai enjeu pour nous est de continuer à crédibiliser notre sport pour justifier les investissements dans des patinoires. On pense qu’avec les patinoires existantes, et à la condition de bien travailler avec les clubs, on pourra difficilement faire beaucoup plus que 24 ou 25 000 licenciés, tout simplement parce que le volume horaires pour le hockey sur glace est limité. Les patinoires accueillent toutes les pratiques et disciplines sportives sur glace. Nous avons un projet de construction de patinoires. Nous avons financé un groupe de consultants et sorti une petite patinoire modèle avec ses budgets de réalisation et d’exploitation. Quand on rencontre des collectivités locales et qu’on leur parle de l’équipe de France, on leur présente notre projet en leur expliquant qu’avec un investissement raisonnable de l’ordre de 3 à 6 millions d’euros, on peut faire pratiquer des sports de glace en France. C’est un des sujets majeurs pour le développement de notre sport en France. »