La couronne tchèque demeure une monnaie fonctionnelle
Lidové noviny, Mladá fronta Dnes, Respekt. Voici les périodiques dans lesquels nous avons cherché des sujets pour cette émission bi-mensuelle consacrée à l’actualité tchèque, telle qu’elle est vue par les médias. Ceux-ci ont retenu, entre autres, des réactions à une nouvelle édition intégrale de l’oeuvre majeure de Marcel Proust ‘A la recherche du temps perdu’.
« Il y a vingt ans, le 8 février 1993, les Tchèques et les Slovaques ont pu ressentir pour la première fois de façon flagrante le fait de vivre dans deux Etats différents, en raison de la partition de l’union monétaire tchéco-slovaque ».
Pour Pavel Páral de l’hebdomadaire économique EURO, cet anniversaire offre une bonne occasion d’analyser l’évolution de la monnaie tchèque qui reflète celle de l’ensemble de l’économie nationale, ainsi que sa capacité de concurrence et la confiance des citoyens en leur Etat. De ce point de vue, le bilan paraît plutôt favorable, en dépit des plaintes qui veulent que tout ce qui a été fait au cours des vingt dernières années ait été mauvais. Nous citons :
« Aujourd’hui, le pouvoir d’achat de la couronne tchèque est de près d’un tiers supérieur à ce qu’il était il y a vingt ans... L’évolution de la monnaie montre que l’économie tchèque au cours des deux dernières décennies n’était pas en déclin. Il s’avère aussi que l’existence de leurs monnaies nationales a offert aux deux Etats, la Slovaquie et la République tchèque, un important instrument doté d’une grande efficacité ».
En conclusion, l’auteur de l’article écrit :
« La monnaie tchèque a servi les bons et les mauvais jours et elle est capable de servir encore à l’avenir. Je pense que même les incrédules admettent désormais qu’une monnaie nationale n’est pas une relique nationaliste, mais un important instrument économique ».
La récente élection présidentielle et la victoire de Miloš Zeman ne cesse d’alimenter la presse. L’éditorial publié dans la dernière édition de l’hebdomadaire Respekt remarque que cette première élection présidentielle au suffrage universel direct a non seulement provoqué des émotions peu communes, mais qu’elle semble avoir donné lieu à un certain mouvement sur la scène politique, ainsi qu’au sein de la société. Son auteur a écrit :
« Il faut noter l’animation qui concerne une partie de la société tchèque et qui s’interroge sur comment mettre à profit l’expérience acquise et l’énergie déployée. Elle ne compte pas entrer dans la vie politique ou soutenir un certain courant idéologique, mais elle a tout simplement envie de faire quelque chose. On ne peut pas savoir, pour l’instant, de quoi il s’agira. Mais on peut s’attendre à ce que beaucoup de ces personnes trouvent un objectif et qu’elles veuillent l’accomplir. Cela pourra profiter à toute la société ».
Dans le quotidien Lidové noviny, Jiří Peňás s’est récemment penché sur le « thème allemand », un des thèmes qui a été soulevé lors de la campagne présidentielle. Une occasion pour lui de constater que « l’évolution et la situation de l’Allemagne (ou du moins d’une de ses deux parties) dans la deuxième moitié du XXe siècle constitue un immense succès dans l’histoire moderne de l’Europe ». Il explique :« Après la catastrophe causée au monde, ce pays a instauré un ordre qui pouvait servir au fur et à mesure d’espoir et d’inspiration à tous ceux qui aspiraient à la liberté et à la démocratie. Pendant près de soixante-dix ans, l’Allemagne et les Allemands ne nous ont causé aucun mal, pendant que des dizaines de milliers de Tchèques y ont trouvé refuge sous le communisme. C’est un pays qui se comporte à notre égard correctement et avec sympathie. »
L’auteur de l’article rappelle qu’il existe entre les Tchèques et les Allemands des liens qui ont été tissés et renforcés pendant des siècles de cohabitation et que la frontière qui existe entre les deux pays nous ouvre la porte vers l’Ouest. Malgré cela, il existe chez nous un climat qu’il décrit comme suit :
« Avouer des sympathies pour ce pays et cette nation n’est cependant pas bien vu chez nous. Bien au contraire : il est courant de manifester à son égard son mépris, son dégoût, voire même un sentiment de supériorité ».
Quatre-vingts ans se sont écoulés ces jours-ci depuis la fondation des fameux studios cinématographiques de Barrandov qui ont derrière eux une histoire à la fois mouvementée et riche en succès. Ils ont vu créer, entre autres, plusieurs films oscarisés. Le quotidien Mladá fronta Dnes en a fait un bref rappel historique :
« Le commencement de l’édification des studios de Barrandov, initié par l’entrepreneur Miloš Havel, l’oncle de l’ex-président tchèque Václav Havel, remonte à l’an 1931. Le complexe moderne bâti sur la colline de Barrandov, sur la rive gauche de la rivière Vltava, a connu une période glorieuse et prospère jusqu’à l’occupation allemande, pendant laquelle les studios ont été confisqués par les Allemands pour réaliser leurs films de propagande. Après la fin de la guerre, les studios ont été nationalisés, puis privatisés au début des années 1990. Aujourd’hui, ils appartiennent à la société Moravia Steel ».
Au total, les studios de Barrandov comptent désormais quatorze ateliers et possèdent également un des plus grand ateliers à l’échelle européenne, de 14 mètres de haut et de 100 mètres de long. Le journal cite certains des films qui y ont été tournés, dont en premier lieu Le miroir aux alouettes (Obchod na korze) de Ján Kadar et Elmar Klos et Les Trains étroitement surveillés (Ostře sledované vlaky) de Jiří Menzel, les deux ayant remporté dans les années 1960 un Oscar du meilleur film étranger. Le film Amadeus de Miloš Forman, réalisateur américain d’origine tchèque a été également oscarisé. Des productions étrangères sont également souvent présentes à Barrandov. Le journal rappelle, par exemple, le tournage dans ses studios de la dernière adaptaion de L’Homme qui rit d’après Victoir Hugo, avec Gérard Depardieu dans la rôle titre, et ajoute :
« Les studios de Barrandov possèdent une collection hors du commun, comptant plus d’un quart de million de costumes, de chaussures et de divers accessoires que les différentes équipes de tournage peuvent emprunter. Des milliers de meubles d’époques différentes et d’armes historiques sont également à disposition. »
« La maison d’édition Rybka a osé avant Noël un acte exceptionnel en publiant une collection des sept volumes de l’oeuvre monumentale de Marcel Proust ‘A la recherche du temps perdu’. C’est ce que constate le dernier supplément Orientace du quotidien Lidové noviny qui a réuni quatre spécialistes tchèques de la littérature pour leur demander si Proust était effectivement un auteur si difficilement accessible, comme on aime le prétendre. Selon Jiří Pelán, lire Proust n’est certainement pas facile:
« ‘A la recherche du temps perdu’ demande un lecteur assidu qui a beaucoup de temps. Moi, j’avais la chance de lire cette œuvre sous la normalisation communiste, à l’époque, où ses différents volumes paraissaient à tour de rôles tous les deux ans. Je suis curieux de voir comment cela va se passer maintenant avec la parution de l’ensemble des sept volumes. Je recommande pourtant de l’essayer et de ne pas se laisser décourager ».
La Tchéquie doit-elle quelque chose à Proust ? A cette question, Jiří Pelán donne une réponse univoque :
« De ce point de vue, nous sommes irréprochables. La première traduction de la fin des années 1920, qui était exellente, est parue rapidement. Et je pense que rares sont les cultures européennes comparables qui puissent se targuer d’une deuxième traduction de cette oeuvre, comme c’est le cas de celle de Prokop Voskovec et Jiří Pechar qui vient de paraître ».
En conclusion, il remarque :
« Même les lecteurs qui ne vont jamais lire ‘A la recherche du temps perdu’ peuvent apprécier Proust, car fort probablement et sans s’en rendre compe, ils ont lu pas mal de livres que l’on peut caractériser de proustien. La trilogie autobiographique de Bohumil Hrabal en est un exemple. »