« Dommage que Prague soit trop grande pour Héricy : on aurait dû être jumelé ! »
Une cérémonie sera organisée ce samedi 22 octobre en hommage à Pavel Tigrid à Héricy près de Paris, en présence notamment de l’ambassadeur tchèque en France, Marie Chatardová. Une plaque sera dévoilée sur la maison où a habité la famille Tigrid dans cette commune située au bord de la Seine.
Pavel Tigrid est sans doute après Milan Kundera l’un des exilés tchèques en France les plus célèbres. Il a soutenu activement la dissidence, notamment en publiant la revue Svědectví. Après la chute du régime communiste en 1989, Pavel Tigrid est revenu dans son pays natal où il est devenu ministre de la Culture. Mais il est resté très attaché à la France et à la commune d’Héricy, où il a été enterré en 2003. Son ancien voisin, Robert Miard, est pour beaucoup dans la pose de cette plaque à la mémoire de Pavel Tigrid. Il a répondu à quelques questions de Radio Prague :
De quand date votre première rencontre avec Pavel Tigrid ?
« Ça fait une trentaine d’années, on est arrivé presque en même temps à Héricy. Je ne me souviens que vaguement de cette rencontre. C’est une fois que nous avons été à la retraite que nous nous sommes vus plus régulièrement. C’était les meilleurs voisins du coin. »
Avez-vous pu apprendre des choses sur lui et sur son pays ?« On ne parlait pas tellement politique mais à son invitation nous sommes allés à Prague. On a été accueilli par Pavel et Ivana et nous avons dormi dans son logement de fonction au ministère de la Culture. On y a passé presque une semaine et ça a été sensationnel. C’était des gens très simples. Lui travaillait, mais le soir on se retrouvait pour aller boire un pot sur une péniche sur la Vltava. On ne parlait de beaucoup de choses, mais pas tellement de travail… »
Est-ce que quand il était en France à Héricy Pavel Tigrid vous semblait avoir le mal du pays ?
« Il a toujours eu une pensée très profonde pour son pays. Son pays, c’était quelque chose et il a souffert dans son pays… »
En parlait-il de cette souffrance ?« On en a parlé une ou deux fois… Comme il disait, ‘ce n’est pas la même de ressasser les moments difficiles’. Il essayait d’oublier les mauvais moments je crois. »
Est-ce que c’est important pour la commune d’Héricy cette cérémonie et cet hommage rendu à Pavel Tigrid ?
« Moi j’en suis très fier, et croyez-moi que j’ai suivi ça de près depuis un bon moment. J’ai un peu tarabusté M. le maire et son fils pour que ça se fasse, parce que c’était vraiment un personnage. Un personnage important et d’une terrible simplicité malgré leur haute fonction. L’ancien président Vaclav Havel, lorsqu’il est venu à son enterrement, a absolument voulu à passer par les bords de Seine dont avait dû lui parler Pavel Tigrid. Dommage que Prague soit trop grande pour Héricy : on aurait dû être jumelé ! »
Est-ce que la présence de Pavel Tigrid à Héricy a amené son lot de visiteurs hors-pair ?« Je ne sais pas exactement, mais je sais que de temps en temps il y en avait et des fois j’avais pour un peu des difficultés à rentrer à la maison. Ma maison est située juste en face. Quand il était à Prague, c’est moi qui avais les clés et surveillais la maison. Quand la première femme du président, Olga Havlová, venait voir Madame Tigrid, là je savais qu’il y avait quelqu’un parce qu’il y avait deux ou trois policiers en civil au bout de la rue. Mais nous, c’était après les affaires qu’on a passé plus de temps ensemble. »
Après les 'affaires', est-ce qu’il semblait soulagé de ne plus occuper de fonctions ministérielles ou politiques ?« Non, ça lui a fait du mal, ça lui a fait de la peine de ne pas avoir été élu sénateur. On en a parlé et on sentait que ça l’avait marqué. »