L’eau de Pâques

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Salut à tous les tchécophiles de Radio Prague - Ahoj vám všem, milovníkům češtiny Radia Praha ! En ce week-end pascal, nous allons nous plonger, et c’est le cas de le dire, dans l'étude des expressions en rapport avec un élément indissociable des fêtes de Pâques – Velikonoce, à savoir l'eau - voda. Même si la tradition est moins d’usage en République tchèque, à l’exception de la Moravie, en Europe centrale, cependant, et notamment en Pologne, Hongrie et Slovaquie, le lundi de Pâques est le jour de l’eau. Le plus souvent, ce sont les jeunes garçons qui arrosent les jeunes filles, manière symbolique pour eux de transmettre leur énergie vitale à l’être aimé. Elément indispensable à la vie, l'eau est aussi matière à une cascade d'expressions et de comparaisons. Et la langue tchèque ne fait pas exception à la règle…

Puisque nous sommes entrés dans le mois d’avril, commençons tout d’abord avec un dicton qui se justifie particulièrement cette année puisque l'ensemble du territoire de la République tchèque a été recouvert de neige – sníh, pendant les trois premiers mois. Ainsi donc, selon ce dicton, beaucoup de neige en janvier équivaudrait à avoir peu d'eau en avril – « Hojný sníh v lednu, málo vody v dubnu ».

Photo: Commission européenne
Toujours en restant dans l’idée de quantité, pour désigner une personne qui parle beaucoup, on pourra dire « má řečí jako vody », soit littéralement « il a des paroles comme de l'eau », ce qui, en fait, équivaut aux expressions françaises « moulin à paroles » ou encore « tenir le crachoir ». Dans un autre domaine, le célèbre proverbe français « Bon sang ne peut, ou ne saurait, mentir » trouve son équivalent en tchèque avec « krev není voda », soit « le sang n'est pas de l'eau ». Dans le même ordre d'idée, si quelqu'un est indifférent à toute chose, indolent, apathique, inactif, on pourra dire « je netečný jako by v něm ani vody, ani krve nebylo », soit « il est indolent comme s'il n'y avait ni eau, ni sang en lui ». Enfin, pour souligner l'indifférence manifestée par une personne, on peut dire d'elle « má v žilách vodu místo krve », c'est à dire, mot à mot, « avoir de l’eau dans les veines à la place du sang ». Lorsqu’un travailleur gagne un salaire misérable, notamment parce qu'il n'est pas très dégourdi, actif, habile, on peut dire de lui « ani na vodu si nevydělá », soit « il ne gagne pas assez pour avoir, se payer de l'eau », ou encore « nevydělá si ani na slanou vodu » - « il ne gagne même pas suffisamment pour avoir de l'eau salée ».

En fait, ces deux dernières expressions signifient qu'il ne gagne pas de quoi vivre. Dans ces cas-là, on peut éventuellement lui venir en aide en le « tenant au-dessus de l'eau » - « držet někoho nad vodou », c'est à dire le protéger d'une disparition, d'une faillite. Cependant, parfois, si cette même personne ne parvient pas à surnager seule, à se maintenir, qu'elle est dans une mauvaise situation, bref qu'elle va mal, ou que, comme disent les Tchèques, « l'eau lui coule dans les chaussures » - « voda mu teče do bot », alors « nepomůže mu ani svěcená voda » - « même de l'eau bénite ne peut pas l'aider ». Et ce, même si cette personne vit très modestement, par exemple en « cuisinant avec de l'eau » - « vařit z vody ». Pour en rester avec les expressions relatives au sens figuré à la « cuisine », pour désigner quelqu'un qui n'est pas bête, idiot, mais plutôt intelligent, malin, on pourra le complimenter en disant « není z vody vařený », soit littéralement « il n'a pas été cuisiné avec l'eau », l'équivalent, donc, de « il n'est pas né de la dernière pluie ».

Au sens propre, pour ce qui a donc, cette fois, tout à fait rapport avec la cuisine, une boisson ou une soupe sans goût particulier, éventuellement mauvaise, peut être comparée à de l'eau : « nápoj, polévka je jako voda ». A l'inverse, lorsque quelqu'un consomme sans modération une bonne boisson comme s'il y en avait des tonneaux ou qu'elle était gratuite, on pourra lui faire remarquer « piješ to jako vodu » - « tu bois ça comme de l'eau ». Et si c'est une boisson alcoolisée, il y a des risques pour que le consommateur finisse par « être sous l'eau » - « být pod vodou », c'est à dire, comme vous l'aurez compris complètement ivre.

Photo: CTK
C'est donc dans l'ivresse de l’eau et de la joie de Pâques que prend fin ce « Tchèque du bout de la langue ». En attendant de vous retrouver dès la semaine prochaine, portez le soleil printanier en vous - slunce v duši!, portez-vous du mieux possible - mějte se co nejlíp!, salut et à bientôt - zatím ahoj!