Prévisions variées et monnaie unique

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2010, 2013, 2050... Non, il ne s'agit pas d'un nouveau volet de "l'Odyssée de l'espace" mais de quelques hypothèses de date pour l'adoption de l'euro en République tchèque. La monnaie unique est plus que jamais d'actualité et les études et analyses, pas toujours concordantes, se font de plus en plus nombreuses. A quand l'euro ?

La Banque nationale tchèque et le Premier ministre Jiri Paroubek ne sont apparemment pas d'accord sur l'état de préparation du pays pour adopter l'euro. Pour Paroubek, la République tchèque est prête à remplacer la couronne sans difficultés majeures tandis que la Banque nationale parle de plusieurs années avant que cela ne soit possible.

Le désaccord a tourné en controverse publique lorsque le ministre des Finances Bohuslav Sobotka a condamné les propos de Pavel Rezábek, de la Banque nationale. Il lui reproche son défaitisme quant aux capacités du pays à entrer dans la zone euro. Rezábek a, de son côté, clairement interpellé le gouvernement, l'accusant d'entreprendre des réformes financières en vue de l'adoption alors que l'économie n'est, selon lui, pas prête pour le grand saut.

Un ensemble de détails techniques ferait obstacle à toute précipitation, comme par exemple le manque d'équipements. Rezábek pointe aussi les difficultés, pour les institutions publiques, à jongler rapidement entre la couronne et l'euro dans le même temps. Il ajoute que la République tchèque risque de connaître les mêmes problèmes que la France et l'Allemagne en cas d'arrivée de l'euro.

Bohuslav Sobotka,  photo: CTK
Pour sa défense, le ministre des Finances, Sobotka, met en avant le respect par le pays de l'inflation définie à Maastricht ainsi que des standards de convergence de l'UE. Des éléments qui rendent, selon lui, la République tchèque capable de se convertir à la monnaie unique dès 2010. Pour l'heure, Bohuslav Sobotka a réagi aux propos de Pavel Rezábek, qui a, selon ses propos, « placé la Banque nationale dans une période fantaisiste, celle-ci ayant déjà convenu avec le Premier ministre et le ministre des Finances de fixer aux alentours de 2010 l'accession à la zone euro ».

La Banque nationale est en fait elle-même traversée de courants divers. En août dernier, le gouverneur de la Banque nationale avait effectivement convenu avec Jiri Paroubek de coopérer activement à la préparation pour l'euro. Mais dans le même temps, diverses voix au sein de la Banque et des milieux économiques se sont élevées contre la perspective d'un passage rapide à la monnaie unique. Dès juin, le vice-gouverneur de la Banque nationale, Ludek Niedermayer, réagissait aux propos du gouvernement et évoquait à son tour un long chemin avant la possible adoption. D'autres leaders économiques mettent en avant les risques de ralentissement de la croissance en cas d'euro.

D'après une enquête menée par l'agence européenne Eurobaromètre, les Tchèques sont en majorité pour la monnaie unique. Le pourcentage de partisans, avec ses 63 %, dépasse même de 4% la moyenne des pays membres. Pourtant, de nombreux analystes du commerce international restent convaincus que 2010 est une prévision trop optimiste.

En tout état de cause, le Premier ministre considère la sphère économique prioritaire dans la construction européenne. La monnaie unique s'ajoute aux récents appels à plus d'ouverture aux candidats d'Europe centrale à l'embauche à l'ouest. L'intégration politique est donc a priori une préoccupation plus lointaine. En juin dernier, lors d'une conférence de presse, il déclarait ainsi, après le référendum français sur la Constitution : « (Au vu du résultat), nous estimons que les pays ont besoin de plus de temps pour la ratification. Ce ne serait pas la première fois que cela arrive dans l'histoire de l'UE ». Si Paroubek exprimait alors tout haut ce que de nombreuses personnes dans les institutions européennes pensent tout bas, le décalage avec l'impératif de la monnaie unique est notoire.

Nous parlions, dans notre édition précédente, de l'étude menée par une banque privée, la Ceska sporitelna. Celle-ci semble apporter sa note au débat public, en penchant a priori plus du côté des prévisions gouvernementales. Elle fixe à 2013 l'adoption de l'euro par la République tchèque, précisant même le taux de change. Résultat plus qu'inattendu, la Slovaquie serait, selon les mêmes analystes, la plus proche de l'entrée dans la zone euro parmi les quatre pays du groupe de Visegrad. Pour l'agence en ligne Euractiv, c'est bien la République tchèque qui arrive en tête du respect des critères de Maastricht (4 au compteur) au sein des 10 pays récemment entrés dans l'UE.