Presse : Volodymyr Zelensky versus Alexander Dubček, un courage incomparable
Cette nouvelle revue de presse propose d’abord quelques remarques en lien avec le prix qui porte le nom du protagoniste du Printemps de Prague de 1968 Alexander Dubček, et qui a été attribué au président ukrainien Volodymyr Zelensky. Elle se penche ensuite sur la lassitude qui risque d’accompagner la prolongation de la guerre en Ukraine. Les récentes protestations de ressortissants russes à Prague contre Poutine et l’absence d’un engagement publique des épouses des leaders tchèques sont deux autres sujets traités. Il y sera également question des trois premiers mois du gouvernement de Petr Fiala.
Il y a quelques jours, le président ukrainien Volodymyr Zelensky est devenu lauréat du Prix Alexander Dubček décerné par l’Etat slovaque. Pour le commentateur du journal Deník, cette décision représente « un paradoxe de l’histoire », car Zelensky a fait preuve d’un courage incomparable. Il explique :
« Certes, Alexander Dubček est connu en tant que symbole du Printemps de Prague. Cela dit, le 21 août 1968, le jour où la Tchécoslovaquie a été envahie par les troupes du Pacte de Varsovie, il a invité la population à ne pas s’opposer aux occupants. Il a signé également la capitulation, avec les protocoles de Moscou. Et, un an après, il a donné son aval à la ‘loi matraque’, sur la base de laquelle les soldats avaient le droit d’ouvrir le feu contre les manifestants qui protestaient contre l’occupation. Au bout de cinq semaines de combats des Ukrainiens contre l’agresseur russe, Volodymyr Zelensky représente un symbole différent. Un symbole de ce que même une résistance en apparence désespérée a un sens, et qu’il y a des choses pour lesquelles il vaut la peine de lutter, voire de mourir. Une approche qui donne un exemple et un espoir à de nouvelles générations. »
Selon le commentateur, la mission de Volodymyr Zelensky est loin d’être achevée. « Nous pouvons dès maintenant constater que le niveau de son intrépidité et de son audace est, hélas, largement supérieur à celui du héros tchécoslovaque de l’année 1968 », ajoute-t-il.
Ne pas se soumettre à la lassitude en rapport avec la guerre en Ukraine
La guerre en Ukraine qui dure depuis plus d’un mois devient une réalité à laquelle on commence tant bien que mal à s’habituer, constate l’auteur d’une note publiée sur le site aktualne.cz qui se penche sur les écueils que ce fait va probablement apporter :
« Plus la guerre durera, plus les images et les vidéos atroces de Marioupol, de Kharkiv et des villages anéantis nous paraîtront ‘normaux’. La guerre va provoquer une certaine lassitude qui risque de concerner également les médias. Et ce en dépit du fait qu’en Tchéquie, tant la population que les représentants politiques se sont mis du côté de l’Ukraine et des réfugiés ukrainiens dès le début de l’invasion russe. »
« Mais jusqu’à quand cet intérêt va-t-il perdurer ? », s’interroge le journaliste du site aktualne.cz. Une question pertinente au moment où l’opposition politique commence à dénoncer les démarches du gouvernement et à opposer « les nôtres » aux réfugiés ukrainiens qui fuient la guerre. Dans sa conclusion, le ton du texte est ferme :
« La guerre se prolonge, mais nous devons continuer coûte que coûte à suivre quotidiennement ce qui se passe en Ukraine pour nous rappeler que c’est Poutine qui en est responsable. Il faut tenir compte du fait que l’Ukraine lutte également pour nous, et du fait que Poutine est un ‘boucher’ dont nous pourrions devenir la victime nous aussi. Aux politiciens d’aider au maximum l’Ukraine, à nous d’aider chaque jour les réfugiés ukrainiens, biélorusses et russes. »
Les trois premiers mois du cabinet de Petr Fiala
Cette semaine, cent jours se sont écoulés depuis la formation du gouvernement de coalition du Premier ministre Petr Fiala. Comme le constate le quotidien Deník N, ce moment important a été éclipsé par la guerre en Ukraine. Il y a pourtant, selon lui, quelques points qu’il convient de retenir :
« Le nouveau gouvernement a pris ses fonctions dans une situation particulièrement difficile, marquée par l’augmentation des cas de Covid-19 et une hausse sans précédent de l’inflation. Ensuite, la Tchéquie a été appelée à accueillir pratiquement d’un jour à l’autre des centaines de milliers de réfugiés ukrainiens. Chercher des solutions à l’actualité est devenu, dès lors, la principale priorité du gouvernement, qui a eu à laisser de côté les principaux points prévus dans son programme. Cela concerne même les problèmes locaux graves comme la crise énergétique ou le coût de la vie élevé. »
De l’avis des observateurs cités par Deník N, le cabinet a réussi notamment dans les domaines de la sécurité et des affaires étrangères. Un fait que le public tchèque a également fortement apprécié. Le journal indique enfin :
« Ce qui distingue le gouvernement de Petr Fiala, c’est son nouveau style de gestion du pays. Fini le micro-management de son prédécesseur Andrej Babiš. »
Les Russes en Tchéquie contre Vladimir Poutine
Quelques 3 000 ressortissants russes ont protesté à Prague, samedi dernier, contre la guerre en Ukraine et contre le président Vladimir Poutine. Une façon de montrer clairement que les Russes à Prague font partie de la société tchèque et qu’ils ne soutiennent pas le poutinisme en secret. Le journal Hospodářské noviny a expliqué :
« La situation de quelques 40 000 Russes qui vivent actuellement en Tchéquie est loin d’être facile. Cela concerne notamment ceux qui dénoncent ouvertement l’invasion des troupes russes en Ukraine, et qui risquent une riposte dure de la part du régime de Poutine. En plus, les ressortissants russes sont assez fréquemment confrontés à la méfiance et à l’hostilité des Tchèques. La principale ambition des organisateurs de la manifestation, à laquelle participaient également des Biélorusses, des Kazakhs et des Moldaves de différents coins du pays, était donc de sensibiliser la population locale à leur position. »
« De nombreux citoyens de la Russie et de la Biélorussie qui sont établis pour une longue durée en Tchéquie sont tombés après l’invasion russe dans un piège, qu’ils soutiennent ou pas les régimes de Poutine et de Loukachenko », signale dans ce même contexte le journal en ligne Deník Referendum. Il précise qu’ils font l’objet de mesures de restrictions concernant l’obtention ou la prolongation de leur visa :
« Ainsi, désormais, même ceux qui s’opposaient au régime dans leur pays et qui participaient à des protestations appartien« Ainsi, désormais, même ceux qui s’opposaient au régime dans leur pays et qui participaient à des protestations appartiennent à la catégorie des ennemis. La récente protestation contre la guerre en Ukraine qui a eu lieu à Prague est pourtant une preuve éloquente de ce que le principe de la responsabilité collective ne saurait s’appliquer à l’ensemble des Russes et des Biélorusses qui vivent en Tchéquie. »nent à la catégorie des ennemis. La récente protestation contre la guerre en Ukraine qui a eu lieu à Prague est pourtant une preuve éloquente de ce que le principe de la responsabilité collective ne saurait s’appliquer à l’ensemble des Russes et des Biélorusses qui vivent en Tchéquie. »
Lorsque les épouses des leaders se taisent
Une des dernières éditions du quotidien Lidové noviny a fait état du « silence des épouses des leaders politiques », que même la guerre en Ukraine n’a pas rompu :
« La Tchéquie affronte la plus grande vague de réfugiés dans son histoire moderne, mais les épouses des hauts représentants tchèques se sont murées dans le silence. On a du mal à imaginer que dans une situation similaire, les ex-premières dames, Charlotta Masaryková, Hana Benešová ou Olga Havlová n’auraient pas tendu publiquement la main aux enfants et à leurs mères en fuite. L’actuelle première dame, Ivana Zemanová, quant à elle, est devenue entièrement invisible, sa fondation ne réagissant même pas aux questions qui lui sont adressées. Ainsi, contrairement à d’autres pays européens, la ‘section féminine’ tchèque est en retard. »
Le journal cite Ladislav Špaček, ancien porte-parole du président Václav Havel, selon lequel cette absence dans l’espace publique ne signifie pas forcément que les femmes des dirigeants tchèques n’accordent pas d’aide. Il souligne cependant :
« Les femmes, qu’il s’agisse d’épouses ou de politiciennes haut placées, devraient être visibles à l’heure actuelle. Tel est le rôle qui leur incombe. Il ne s’agit pas de ‘se faire voir’ mais de servir d’exemple en termes de compassion et d’empathie à l’égard des personnes en détresse. »