Presse : deux leçons électorales, roumaine et slovaque, pour les Tchèques

Calin Georgescu

Cette nouvelle revue de presse se penche d’abord sur deux récentes leçons, roumaine et slovaque, pour la Tchéquie. Autres sujets traités : la crise du logement, l’évolution démographique, la grande popularité de l’émission StarDance et nouvelles mesures envisagées en lien avec les sans-abris.

Le premier tour de l’élection présidentielle en Roumanie, dimanche dernier, a été très suivi par les médias tchèques. Selon le quotidien Hospodářské noviny, la victoire de Calin Georgescu a choqué la majorité des observateurs politiques  roumains et européens. « Ils peinent à imaginer qu’un homme qui fait ouvertement l’éloge de Vladimir Poutine, déclare avoir du respect pour les leaders de guerre fascistes roumains et qui met en doute l’aide des pays membres de l’UE et de l’OTAN à l’Ukraine, devienne chef d’un Etat qui, après la Pologne, est le plus important allié des États-Unis en Europe centrale », écrit-il. Ce résultat, comme il l’indique, est en même temps un avertissement pour la Tchéquie et pour l’ensemble de l’Europe :

« La leçon roumaine est un signe de la popularité croissante de l’extrême droite dans la région. Georgescu, qui sera probablement battu au deuxième tour, doit son ascension à plusieurs facteurs, parmi  lesquels se distinguent l’inspiration par Donald Trump ou l’ignorance de l’histoire moderne du pays. Celle-ci concerne notamment la jeune génération, qui ne comprend pas vraiment ce que représentaient le fascisme et l’Holocauste et d’autres atrocités liées à la Deuxième Guerre mondiale. Même en Tchéquie, on peut voir certains jeunes politiciens émergeants s’amuser en faisant des gestes nazis, une façon de franchir un tabou respecté par les générations plus âgées ».

Or, il ne s’agit pas d’une spécificité roumaine. D’après le journal, ces facteurs sont présents dans tous les États qui n’ont pas réussi à établir des institutions solides et indépendants propres à un État libéral de droit depuis la chute des régimes communistes en 1989 et avant la crise, la pandémie et la guerre en Ukraine.

Robert Fico en mai prochain à Moscou

« Pour un observateur régulier de la politique slovaque, il n’est pas surprenant que le Premier ministre Robert Fico accepte de célébrer l’anniversaire de la fin de la Deuxième Guerre mondiale avec Vladimir Poutine à Moscou en mai prochain », constate l’éditorialiste du site info.cz. L’occasion pour lui de rappeler que l’événement, tel un avertissement, se déroulera à quelque cinq mois des prochaines élections législatives tchèques :

Robert Fico | Photo: TASR/Profimedia

«  Ces élections décideront de la nature de notre démocratie et de notre appartenance géopolitique. La Tchéquie n’est pas le seul pays à être confronté à de nombreuses crises. Nous vivons une période de transition, une période de recherche d’un nouvel équilibre, pendant que de nouvelles sphères d’influence des grandes puissances sont en train d’être définies. Mais s’agissant de la guerre en Ukraine, il est facile de déterminer qui est la victime et qui est l’agresseur. Presque tout le monde civilisé est d’accord sur ce point. Fico, quant à lui, a choisi de collaborer avec Poutine. »

L’éditorialiste du site insiste sur le fait que chacun devrait donc réfléchir très attentivement à qui il donnera sa voix et demander aux hommes politiques à qui ils voudront être désormais attachés. « Ces élections pourraient décider du sort de ce pays pour de nombreuses années à venir », lance-t-il.

Les barrières idéologiques face à la crise du logement

La situation du logement en Tchéquie est extrêmement mauvaise. Les chiffres présentés à ce propos par le journal Deník N sont éloquents :

Photo illustrative: Radio Prague Int.

« L’achat d’un logement en Tchéquie coûte de plus en plus cher. La Tchéquie se classe au deuxième rang des 17 pays européens pour ce qui est de l’inabordabilité d’une propriété. La situation sur le marché de la location n’est pas meilleure. À l’échelle européenne, les logements en location à Prague, par exemple, sont moins abordables que dans les capitales voisines, Varsovie ou Vienne. De plus, la part du revenu que les familles consacrent au logement augmente chaque année. Point étonnant que cette crise touche notamment les jeunes, qui repoussent le moment de fonder une famille de peur de ne pas pouvoir trouver de logement, les personnes âgées, les ménages à faibles revenus, les mères célibataires et les autres groupes vulnérables. »

« Pour améliorer la situation, il faut briser les barrières idéologiques de droite et de gauche », souligne le journal. Par ailleurs, c’est ce qui ressort également de la série de mesures proposées par le Conseil national du gouvernement, qui indique que le logement fait l’objet d’un débat idéologique dans lequel les hommes politiques ne cherchent que des solutions faciles ou partielles.

L’évolution démographique en Tchéquie

« Au cours d’une année, nous avons perdu une ville ». Tel est le titre percutant d’un texte mis en ligne sur le site Novinky.cz qui est consacré à l’évolution démographique de la société tchèque et dans lequel on peut lire :

Photo illustrative: Honza Ptáček,  ČRo

« Le taux de natalité en Tchéquie est en baisse et cette tendance devrait se poursuivre. Selon les démographes, les femmes se concentrent davantage sur leur carrière professionnelle et retardent la conception de leur premier enfant. En Tchéquie, l’âge moyen auquel les femmes ont leur premier enfant a augmenté d’un an au cours des 12 dernières années, atteignant actuellement 29 ans. Avec 91 200 enfants l’année dernière, le pays a connu le nombre le plus faible de naissances depuis 2001. Autrement dit, 10 000 enfants de moins y sont nés par rapport à l’année précédente. Cette différence correspond, en termes d’habitants, aux villes comme Kyjov, Jeseník ou Čáslav. La tendance négative se poursuit également cette année. »

L’âge idéal pour devenir mère pour la première fois est toujours de 25 ans. Toutefois, comme l’indique le site Novinky.cz, l’information générale sur la maternité est presque nulle en Tchéquie.

StarDance (DALS): trêve de polarisation de la société tchèque

À l’instar des années précédentes, la 13ème édition de l’émission Danse avec les stars (StarDance en version locale) a animé le débat sur la question de savoir si de tels programmes de divertissement ont leur place sur les chaînes publiques, accentué cette fois-ci par la polémique politique autour d’une éventuelle augmentation de la redevance. Une question à laquelle une chroniqueuse du quotidien Deník N répond par la positive :

StarDance | Photo: ČT

« Certes, l’émission StarDance réalisée à partir de la version originale créé au Royaume-Uni par la BBC n’est pas un spectacle parfait et intouchable. Pourtant, il doit avoir sa place à la TV publique. Il se peut que son rôle n’y soit pas irremplaçable, car l’émission pourrait très bien être réalisée par une chaîne commerciale. Mais son aspect de service public se traduit, par exemple, par le fait que les participants proviennent de différents secteurs et dont certains, tout en brillant dans leurs professions, sont peu connus. De même, le fait d’être produite par la TV publique permet de lancer des collectes pour des personnes handicapées comme celle de samedi dernier, qui a permis de récolter un montant record de 43 millions de couronnes tchèques grâce aux donateurs. »

La chroniqueuse souligne que les programmes sportifs et de divertissement sont une partie importante de la mission du service public consistant à servir tous les segments de la société et à promouvoir la cohésion d’une société pluraliste. « Plus d’un million et demi de téléspectateurs regardent chaque semaine les danseurs et danseuses en compétition, un chiffre qui n’est pratiquement dépassé que par des contes de fées diffusés à Noël et par la Coupe du monde de hockey sur glace », écrit-elle.

Punir les sans-abris ?

Les gens qui vivent dans la rue doivent se consacrer à des travaux d’utilité publique et gagner leur vie ou se réfugier dans un foyer, sinon ils vont finir en prison. C’est ce que stipule un projet de loi préparé par un sénateur du principal parti gouvernemental, de droite, l’ODS. Ainsi, comme l’indique le journal Mladá fronta Dnes, le sans-abrisme deviendrait un acte délictuel. La proposition qui vise à envoyer les sans-abris derrière les barreaux est critiquée notamment par les associations de défense des droits humains habitués à leur venir en aide. Le quotidien précise à ce sujet :

Photo lllustrative: Michal Záboj,  ČRo

« A l’heure actuelle il y a en Tchéquie près de 24 000 personnes qui sont sans abri et leur nombre augmente chaque année. Les problèmes sur le marché du travail et le prix élevé de l’immobilier risquent d’aggraver encore davantage la situation. Environ la moitié des sans-abris tchèques vivent dans la rue, dans des abris de fortune ou des squats. L’autre moitié préfère dormir dans des refuges et des foyers municipaux pour sans-abris. »