Nouveau président Petr Pavel : ses premières interviews

Petr Pavel

« La première chose que j’ai dite à ma femme en me réveillant ce matin a été : ‘Hier, c’était un rêve ?’ » Une anecdote pour commencer, le nouveau président tchèque Petr Pavel était de bonne humeur au lendemain de son élection, samedi 28 janvier, pour sa première interview accordée à la Radio tchèque.

Ancien général et ex-chef du Comité militaire de l’OTAN, Petr Pavel est bien devenu le 4e président de la République tchèque, après Václav Havel, Václav Klaus et Miloš Zeman, dont le deuxième mandat s’achèvera le 8 mars.

L’officier à la retraite, âgé de 61 ans, a remporté ce scrutin, considéré par de nombreux politologues comme « un référendum sur Andrej Babiš », avec près d’un million de voix de plus que l’ancien Premier ministre et milliardaire.

Samedi soir, fraîchement élu, le nouveau président a d’abord quitté son quartier général de campagne pour se rendre au Musée national de Prague où, dans un studio improvisé, il a répondu aux questions de la Télévision tchèque. Alors qu’une foule composée de ses partisans l’attendait à l’entrée du bâtiment historique, Petr Pavel a alors livré ses premiers sentiments :

« Je ressens du soulagement et de la joie évidemment… Mais le sentiment qui prédomine, c’est le respect et le poids de la responsabilité. »

Petr Pavel au Musée national | Photo: ČT24

Avec le recul, qu’est-ce qui est le plus difficile : sauver 53 soldats français en danger de mort en ex-Yougoslavie ou gagner l’élection présidentielle ?

« C’est difficile à dire. Je me dis parfois que je préférerais retourner sur le champ de bataille. Je ressens une immense responsabilité, mais également une énorme fierté. Je n’avais jamais imaginé qu’une telle chose puisse advenir dans ma vie. Malheureusement, mes parents ne sont plus là. Ils auraient été fiers de moi. »

« Voir tous ces gens qui vous expriment leur soutien, tant de gens qui croient en vous, est aussi un moment de joie… Quand j’y pense, je me dis qu’il ne s’agit pas seulement d’une responsabilité, mais aussi de l’espoir que vous pouvez leur apporter. »

Vous êtes sans aucun doute un homme expérimenté. Mais quand même : comment en arrive-t-on à se dire ‘Je veux être président’ ?

Petr Pavel | Photo: ČT24

« Je ne dirais pas que je me suis réveillé un beau jour en me disant que je voulais devenir président. J'ai été motivé par une certaine demande de la part du public. (…) Dans les débats avec les étudiants auxquels j’ai participé lorsque j’ai quitté mon poste à l’OTAN, nous avions discuté de ce que la citoyenneté signifie pour les jeunes et nous en étions arrivés à la conclusion qu’il ne faut pas hésiter à se présenter à des fonctions publiques lorsque l’on estime avoir des choses à offrir aux autres. Et l’un des étudiants m'avait alors demandé quand je prendrais mes responsabilités civiques et me présenterais aux élections. (…) »

Je pensais être un meilleur candidat qu’Andrej Babiš

« Ce qui m’a définitivement convaincu, c’est quand le président Miloš Zeman a évoqué Andrej Babiš comme son potentiel successeur. Je suivais le comportement d’Andrej Babiš, ses relations amicales avec Viktor Orbán, sa manière de mener les négociations politiques… Et je me suis dit que je ce n’était pas le futur que je souhaitais pour notre pays. Cela m’a donné envie de proposer autre chose. Je n’ai jamais pensé être un meilleur qu’un autre candidat, par contre j’étais convaincu de pouvoir être meilleur candidat qu’Andrej Babiš. »

Petr Pavel | Photo: Vít Šimánek,  ČTK

« Revenir à plus de dignité dans la politique » : c’est ainsi que Petr Pavel a, lui-même, formulé son objectif pour les prochains mois. Au micro de la Radio tchèque, le nouveau chef de l’État a été plus concret :

« Tout d’abord, je veux dissiper les doutes qui sont apparus lors de la campagne électorale, selon lesquels mon élection, par exemple, marquerait le début d’un nouveau régime totalitaire, que sous ma présidence, nous nous rapprocherions d’une guerre ou encore que les Tchèques mécontents et critiques ne seraient plus entendus et défendus par personne. Rien de tout cela n’est vrai. Je veux prouver, dès mes premières démarches, que je suis prêt à écouter, à communiquer avec ceux qui veulent faire avancer les choses, qui ont des solutions rationnelles aux problèmes actuels. Je veux aussi être à l’écoute de tous les citoyens, sans prendre en considération pour qui ils ont voté. »

L’expérience de la guerre me rend plus prudent

Ainsi, Petr Pavel veut prochainement se rendre dans les régions défavorisées de Karlovy Vary, d’Ústí nad Labem et de Moravie-Silésie, où son adversaire Andrej Babiš est sorti vainqueur du deuxième tour. Il entend également rencontrer, dans les prochains jours, les représentants du gouvernement et de l’opposition, tout en établissant, avec son équipe, le calendrier de ses déplacements à l’étranger.

Zuzana Čaputová | Photo: René Volfík,  iROZHLAS.cz

« Je me réjouis très sincèrement du fait que dans notre région et, plus généralement, en Europe, nous aurons un nouvel chef d’État qui respecte les valeurs démocratiques et dont la force réside dans le calme », a déclaré, samedi en fin d’après-midi, lors de sa visite surprise au quartier général de campagne de Petr Pavel, Zuzana Čaputová. C’est avec la présidente slovaque que le nouveau président tchèque compte se rendre en Ukraine, au printemps, sur invitation de leur homologue Volodymyr Zelensky.

A la question des journalistes de savoir dans quelle mesure la carrière de l’ancien chef de l’État-major de l’Armée tchèque et de l’ex-haut représentant de l’Alliance atlantique pourrait influencer l’exercice de ses fonctions de président de la République, Petr Pavel a répondu :

« Certainement pas dans le sens où je serai plus disposé à envoyer des soldats en mission ou, au contraire, plus réticent. Il est important de faire ce qui est juste. Je suis convaincu qu’en situation de danger, il faut, tout simplement, y faire face. C’est pour cela que nous avons une armée et les forces de sécurité. Laisser le mal agir sans réponse peut vraiment se retourner contre nous de manière terrible. Il y a donc malheureusement des situations où il n’y a pas d’autre solution, mais précisément parce que j'ai vécu ces situations moi-même, je penserai certainement très soigneusement la solution à choisir. Parce que décider de déployer une armée peut sembler être une décision facile, mais si vous savez ce que cela implique, ce n’est pas évident du tout. Je suis très heureux d’avoir l’expérience de la guerre, car elle me rend beaucoup plus prudent. »

Pour en savoir plus sur le parcours de vie de Petr Pavel, nous vous invitons à lire son portrait ici : https://francais.radio.cz/petr-pavel-president-de-la-caserne-au-chateau-de-prague-8773396

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