« Oh que je suis triste » ou la mélancolie slave… et anglaise

Nous vous présentons un album qui rassemble des cycles de mélodies du compositeur tchèque Bohuslav Martinů et du compositeur anglais Benjamin Britten, interprétées par la mezzo-soprano Markéta Cukrová et le pianiste Ivo Kahánek. Album intitulé « Ej, smutno je mě » (« Oh que je suis triste »), c’est la chanson « Smutný milý » (Triste chéri) de Martinů qui lui a donné son titre.

Markéta Cukrová | Photo: Ilona Sochorová

« Smutný milý » est une chanson empreinte de mélancolie, mélancolie que l’on peut d’ailleurs voir comme le fil conducteur de l’album. Pour l’interprète Markéta Cukrová, d’ailleurs, « la musique la plus belle est la musique triste », car celui qui l’écoute peut « facilement s’identifier à un sentiment mélancolique ou triste ». Selon elle, chez les Slaves, « la mélancolie est présente au quotidien ; elle y constitue un élément dominant ». Par ailleurs, Markéta Cukrová précise que « du point de vue de la technique vocale, avec des mélodies mélancoliques et endeuillées, il est possible de travailler magnifiquement la voix, de développer des phrases, de travailler le vibrato et la couleur de la voix ».

Bohuslav Martinů | Photo: Archives du Musée de la ville de Polička

Bohuslav Martinů est un compositeur tchécoslovaque, naturalisé américain, né en 1890 et mort en 1959. Marqué à ses débuts par la musique française, celle de Maurice Ravel, Albert Roussel, Paul Dukas et surtout Claude Debussy, il reste toute sa vie enraciné dans la culture et le folklore tchèques tout en revendiquant l’héritage du madrigal anglais et du concerto grosso baroque. Edward Benjamin Britten, quant à lui, est un compositeur, chef d’orchestre, alto et pianiste britannique dont les œuvres rendent hommage aux musiques du Moyen Âge et au bel canto. Il est né en 1913 et mort en 1976.

Markéta Cukrová s’est dite surprise par les « points communs en matière de style » qu’elle a trouvés dans les œuvres des deux compositeurs. Il est vrai que tous deux étaient des intellectuels, des personnes éduquées ; par ailleurs, tous deux ont vécu le traumatisme de l’exil. Markéta Cukrová estime que leur musique est tout sauf spontanée ; néanmoins, la rationalité dont elle est faite aboutit à un effet extrême.