Pour la présidence tchèque de l’UE, un budget très réduit qui agace

Photo: Markus Naujoks, Pixabay / CC0

Insuffisant, inadapté ou encore inapproprié. C’est en ces termes que les différents ministères qualifient le projet de financement de la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne, que la République tchèque assurera en 2022. Le Premier ministre Andrej Babiš souhaite en effet que Prague remplisse ses obligations avec un budget et un personnel aussi allégés que possible. Mais sa vision des choses fait grincer des dents, y compris dans les rangs du mouvement ANO.

Photo: Markus Naujoks,  Pixabay / CC0
Dix ans sont passés depuis, mais à Prague comme à Bruxelles, personne n’a oublié que la première présidence tchèque de l’UE au premier semestre 2009, qui faisait suite à celle de la France de Nicolas Sarkozy, avait tourné en eau de boudin. En plus d’un président de la République, Václav Klaus, nationaliste et ouvertement eurosceptique qui refusait de faire flotter le drapeau européen au Château de Prague, dès le mois de mars, le gouvernement du conservateur Mirek Topolánek, sans majorité au Parlement et embourbé dans les scandales, avait été renversé par une motion de censure avant d’être remplacé, deux mois plus tard, par un cabinet de techniciens chargé d’assurer les affaires courantes jusqu’au passage de témoin à la Suède, le 1er juillet. Pour le plus grand soulagement de tous.

Pour l’heure, ce sont surtout les Tchèques eux-mêmes que la perspective de 2022 inquiète. Andrej Babiš souhaite en effet mener une présidence à bas coût. Concrètement, il prévoit des dépenses d’un montant de près de 1,3 milliard de couronnes (50 millions d’euros), un total nettement inférieur aux budgets consacrés par les autres pays membres. A titre de comparaison, la Slovaquie, en 2016, avait investi quelque 70 millions d’euros dans sa première présidence, ou encore le Luxembourg 93 millions en 2015.

De même, le budget dans son état actuel prévoit d’assurer la représentation diplomatique permanente à Bruxelles pendant la présidence avec une équipe composée de cent-cinquante-six personnes, soit là aussi beaucoup moins que ce que font habituellement les autres pays en la matière. La Slovaquie avait ainsi fait passer sa représentation bruxelloise de quatre-vingt-sept à deux-cent-vingt membres lors de sa présidence.

A l’exception de la ministre des Finances, la majorité des autres ministres se plaignent de ces restrictions envisagées. Selon eux, la somme ne permettrait d’employer qu’un tiers des 600 personnes jugées nécessaires pour remplir la mission. L’insatisfaction est manifeste jusque parmi les ministres membres du mouvement ANO dirigé par Andrej Babiš. Des voix se sont même élevées pour dire que le gouvernement ferait mieux de laisser la présidence à un autre pays s’il n’est pas en mesure de garantir un budget qui permette de réaliser un travail de qualité. Le ministre de l’Environnement, Richard Brabec, membre lui aussi du mouvement ANO, n’envisage cependant pas une telle solution, et ce bien que dans le cas concret de son ministère, le gouvernement ne prévoie que quinze nouveaux employés au lieu des quarante-huit espérés, par exemple pour répondre à l’obligation d’organiser une grande conférence sur le climat :

Le parlement européen | Photo: Michal Sänger,  Flickr,  CC BY-NC-SA 2.0
« Nous ne limiterons rien de ce qui importe vraiment même en cas de volonté de faire des économies. Nous sommes bien conscients qu’il y a une limite en dessous de laquelle nous ne pouvons pas descendre, car elle ne nous permettrait pas de respecter nos obligations. Peut-être serons-nous contraints de reconsidérer l’organisation de certaines manifestations notamment à l’étranger, de les déplacer à Bruxelles ou à Prague, mais à partir du moment où nous aurons décidé du montant du budget, cela signifiera que nous sommes en mesure d’assurer dignement la présidence. »

Dès juillet dernier, Andrej Babiš avait réagi aux diverses objections des ministères en faisant savoir qu’il n’entendait pas revoir sa position et que la priorité absolue de son gouvernement était de faire des économies. Selon le vice-ministre des Affaires étrangères en charge des affaires européennes, Aleš Chmelař, convaincu qu’un compromis satisfaisant pour toutes les parties sera trouvé, le gouvernement se doit de prendre une décision définitive d’ici à l’été prochain :

« Nous avons besoin d’employer les gens dès le début de l’année 2021 de façon à ce qu’ils puissent suivre les formations nécessaires et remplir toutes les formalités administratives. Des annonces pour ces différents postes devraient déjà être lancées pour que nous puissions faire passer les entretiens d’embauche. »

En attendant, un vote du gouvernement sur ce projet de budget est prévu la semaine prochaine. Quel que soit le résultat, il sera alors temps de commencer à se pencher plus concrètement sur les préparatifs de cette présidence.