Presse : les élections européennes en Tchéquie remportées par les défenseurs du moteur thermique

Přísaha et Motoristé

Le score inattendu réalisé par différentes formations au discours anti-système aux élections européennes en République tchèque fait la Une de la presse nationale ce lundi.

« Un eurodéputé sur quatre que la Tchéquie envoie à Bruxelles est issu du d’un parti ou mouvement contestataire » constate l’hebdomadaire Respekt. Avec le Mouvement des citoyens mécontents (ANO) de l’ancien Premier ministre Andrej Babiš, sorti vainqueur du scrutin avec un peu plus de 26%, « la proportion des partis populistes tchèques prochainement représentés au Parlement européen atteint 60 %. Si ces chiffres reflètent réellement l’ambiance qui règne dans le pays, les partis politiques au pouvoir devraient sérieusement y réfléchir », remarque l’hebdomadaire.

ANO | Photo: Zuzana Jarolímková,  iROZHLAS.cz

« Quel est le résultat de ce scrutin européen, traditionnellement présenté par le leader de l’opposition Andrej Babiš comme un référendum sur le gouvernement ? » s’interroge le site Aktualne.cz, avant de répondre : « la coalition gouvernementale a été mise à mal et ses perspectives dans l’optique des prochaines législatives ne sont pas réjouissantes du tout. Ce sont ses opposants les plus farouches qui ont triomphé, ceux qui critiquent avec virulence l’Union européenne, ne se soucient pas du changement climatique, se prononcent contre l’accueil de migrants et le soutien à l’Ukraine (…) Moscou sera content », estime le commentateur du site.

Dans leur ensemble, les médias tchèques analysent le surprenant succès électoral des coalitions non-parlementaires Serment et automobilistes (Přísaha a motoristé) et Assez ! (Stačilo! ) qui représentent ce courant radical et anti-système sur la scène politique tchèque et ont décroché respectivement deux mandats au Parlement européen. D’après le commentateur du journal économique Hospodářské noviny, c’est en réalité « le moteur à combustion interne qui a remporté les élections européennes en Tchéquie », soit une allusion au thème central de la campagne de la formation Serment et automobilistes, qui a fait de la lutte contre la politique environnementale de l’UE son cheval de bataille.

Filip Turek  (à gauche) de Motoristé et Přísaha | Photo: Michal Krumphanzl,  ČTK

« (Filip) Turek est la star de ces élections » a titré, dimanche soir, le site d’information Novinky.cz. Mais pour le politologue Vít Hloušek de l’Université Masaryk de Brno, l’ancien pilote de course et influenceur controversé qui a été plébiscité par plus de 152 000 électeurs tchèques, soit l’un des meilleurs résultats parmi tous les candidats, « n’est pas l’étoile montante de la scène politique tchèque », mais plutôt « la star d’une campagne électorale ».

D’après le politologue interrogé par la Radio tchèque, Filip Turek cultive une image de leader machiste qui convient, semble-t-il, à une partie importante de l’électorat essentiellement masculin particulièrement sensible à l’interdiction de la vente des véhicules thermiques prévue par l’UE à partir de 2035. « Je ne pense pas qu’il puisse construire une véritable carrière politique autour de ce sujet », estime le politologue.

Kateřina Konečná | Photo: Kateřina Šulová,  ČTK

Selon lui, en revanche, le succès de Kateřina Konečná, euro-députée communiste depuis 2014 et leader de la coalition de gauche Assez ! est le fruit d’une autre stratégie : « la présidente du parti communiste a réalisé un excellent travail au cours de la campagne, notamment lors des débats télévisés. (…) Elle a su se démarquer du Parti communiste qui n’intéresse plus personne et s’allier aux petits partis d’extrême droite. (…) Au cœur de la campagne de cette coalition il n’y a pas eu de grand thème européen, mais la critique du gouvernement. Et ça a marché », a constaté le politologue Vít Hloušek sur le site de la Radio tchèque.

Markéta Gregorová et Ivan Bartoš du Parti pirate | Photo: Vít Šimánek,  ČTK

Du côté des perdants, les médias remarquent notamment le résultat décevant du Parti pirate qui, selon le site Aktualne.cz, « n’a pas su mobiliser les jeunes électeurs » et il est « de moins en moins visible » sur la scène politique tchèque.

« Les résultats des élections européennes doivent toujours être pris avec un certain recul », constate enfin l’éditorialiste de l’hebdomadaire Respekt. « Un faible taux de participation ne reflète pas vraiment la situation politique en Tchéquie, telle quelle sera lors des élections législatives de 2025. (…) Toujours est-il que ces élections européennes organisées un an avant les législatives ont été une bonne occasion pour les électeurs de donner une leçon au gouvernement et de lui signaler, peut-être, son manque de compétence », conclut-il.

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