Presse : les événements du 17 novembre 1989 ou un autre regard sur la liberté acquise

Novembre 17, 2021

La liberté acquise répond-elle à ce qu’on avait revendiqué il y a 32 ans ? Cette question qui a préoccupé certains journaux à l’occasion de la commémoration de la révolution de Velours est aussi abordée dans cette nouvelle revue de la presse. D’autres sujets traités : le premier engagement gouvernemental du Parti pirate et les inquiétudes liées à l’évolution de l’épidémie de coronavirus en Tchéquie. Un bref regard enfin sur la conférence climatique de Glasgow.

« C’est une perception vulgaire de la liberté qui l’a emporté »

« Ce sont les égoïstes et les activistes qui ont privatisé la liberté. Le legs du 17 novembre est perdu ». Tel est le titre percutant d’un article qui a été publié dans le quotidien Hospodářské noviny à la veille de l’anniversaire des événements qui ont marqué la chute du régime communiste dans l’ancienne Tchécoslovaquie. Son auteur estime que, 32 ans après, le bilan concernant la principale revendication de la révolution dite de Velours, la liberté, n’est pas très encourageant. Il écrit :

« Certes, l’essentiel fonctionne comme il faut, car les libertés politiques et civiques sont garanties. D’un autre côté, il existe au sein de la société de multiples tensions causées par les malentendus au sujet du lien entre la liberté et la responsabilité. La pandémie de coronavirus en donne un dernier témoignage. Une partie de la population est effectivement convaincue de perdre sa liberté en se soumettant aux règles définies et d’avoir le droit à la résistance. Un concept de la liberté qui est proche de l’anarchisme ».

Le commentateur soumet l’idée qu’après Novembre 1989, « c’est une perception vulgaire de la liberté qui l’a emporté, telle une réaction aux contraintes et aux restrictions imposées par l’ancien régime communiste ». Le problème d’une liberté mal gérée touche selon lui également d’autres domaines, dont notamment celui des informations :

« Beaucoup de Tchèques estiment que la ‘liberté’ donne le droit de proclamer et d’écrire tout ce que l’on veut, de diffuser des non-sens et des mensonges. Ils revendiquent l’accès dans les médias publics, protestant contre la prétendue censure. »

L’article de Hospodářské noviny fait enfin mention du contexte générationnel de la date du 17 novembre :

« Pour la nouvelle génération, la liberté est devenue une évidence. Elle en a assez des émotions nostalgiques qui accompagnent cet anniversaire, estimant qu’il devrait en revanche inspirer des réflexions sur l’avenir et sur les problèmes d’actualité ».

Le rappel des événements liés à la chute du régime communiste est dépourvu de réflexion sur le moment présent, estime à son tour l’auteur d’un article intitulé « Les célébrations du 17 novembre comme un monument de l’ignorance », publié dans le journal en ligne Deník Referendum :

« Certes, il est justifié de célébrer cette date pour se rappeler que nous ne vivons plus et ce depuis plus de trois décennies dans un système totalitaire. Pourtant, l’anniversaire du 17 novembre appelle à l’action, non à la sentimentalité. Au lieu de développer les idéaux et les valeurs de la révolution de Velours, nous nous sommes créés un monument imaginaire et kitsch du passé qui nous empêche de voir plus loin. L’heure est désormais à de nouveaux défis dont en premier lieu la défense des droits de l’homme dans le monde. Tel devrait être le principal thème de cette fête ».

Le Parti pirate dit oui à son engagement gouvernemental

La majorité des pirates a voté par le biais d’un référendum interne pour la participation de leur parti à la prochaine coalition gouvernementale. « Ainsi, ils ont confirmé qu’ils voulaient appartenir au ‘système », signale l’auteur d’une note publiée sur le site de l’hebdomadaire Respekt. Il s’agissait, selon lui, ni plus ni moins que de l’orientation future du Parti pirate qui se veut libéral et dont la cote est élevée notamment auprès de la population urbaine :

La coalition SPOLU,  Le Parti pirate et STAN | Photo: Le Parti pirate/Flickr,  CC BY-SA 2.0

« L’adoption de la responsabilité gouvernementale signifie que le Parti pirate se réfère à la politique démocratique instaurée après la chute du régime communiste, au renforcement du système qui cherchait à s’établir au cours des trois dernières décennies. Un éventuel non à la participation à la coalition gouvernementale aurait en revanche renforcé les tendances pirates qui visent à la critique et à la transformation du ‘système’. »

Le commentateur de Respekt admet que ces tendances ont leur raison d’être, d’autant plus que la politique actuelle s’acquitte mal envers certains problèmes clés comme l’écologie, la coopération au sein de l’Union européenne ou la pauvreté. Toutefois, comme il le souligne, le système électoral qui existe en Tchéquie ne permettra probablement jamais au Parti pirate de s’imposer indépendamment.

Selon l’auteur d’un commentaire publié dans le journal en ligne Forum 24, les pirates ont pris une décision sage. Il explique :

« C’est justement pour le voir au gouvernement que les gens ont voté pour ce parti.  Il y a quelques mois encore, les pirates pouvaient croire qu’ils allaient composer le nouveau cabinet. Faute de résultats électoraux satisfaisants, ils ne constitueront pourtant que l’élément le plus faible du cabinet. Mais l’important, c’est qu’ils y seront. Une entrée dans l’opposition composée par les ‘babišistes’ et le parti populiste SPD signifierait une chute dans l’oubli ».

Lorsque l’épidémie de Covid-19 remonte en puissance

« Avant les élections législatives d’octobre, les représentants politiques tchèques n’ont rien fait pour empêcher la propagation de l’épidémie de coronavirus. Aujourd’hui, on en porte les conséquences ». C’est ce dont fait part une note publiée mardi sur le site Seznam Zprávy en rapport avec l’enregistrement mardi du plus grand nombre de cas de contaminations en une journée, depuis le début de la pandémie. Son auteur est catégorique :

Photo: Matěj Skalický,  ČRo

« Le silence au sujet du covid avant les élections annonçait la tempête actuelle. Début octobre, lorsqu’il y avait des signes clairs de la détérioration de la situation pandémique, tant le gouvernement d’Andrej Babiš que l’opposition de l’époque évitaient le problème, pour ne pas déranger ou inquiéter les gens. Une hypocrisie dont le prix à payer au moment où les hôpitaux risquent de se transformer en ‘covidariums’ sera immense. Les chiffres record atteints à ce jour ne semblent pas, hélas, définitifs. A en croire les modèles établis, on pourra s’attendre à quelque 60 000 nouveaux cas par jour ».

La seule démarche que le cabinet sortant a mis en valeur, c’était l’abolition des tests gratuits pour les non-vaccinés. « Une bagatelle insignifiante », remarque l’éditorialiste en attendant des restrictions plus sévères suivant le modèle bavarois qui sont prévues à partir de lundi prochain.

« La folie anti-vaccination prouve que nous avons perdu une nouvelle bataille avec le Kremlin ». Un constat dressé, toujours en lien avec la situation pandémique en Tchéquie, par le site hlídacípes.org. Voici son explication :

« A la lumière de la très mauvaise situation pandémique et du nombre de personnes non-vaccinées et de vaccino-sceptiques, une chose s’avère évidente : après le refus d’implantation sur le sol tchèque d’un radar américain et l’explosion d’un dépôt de munition à Vrbětice dont les circonstances demeurent inexpliquées, la Tchéquie est perdante face à une troisième attaque hybride qu’il y a lieu d’attribuer au Kremlin. Celle qui consiste dans la diffusion de fausses nouvelles anti-vaccins contre lesquelles nous n’arrivons pas à nous défendre d’une manière déterminée et efficace. »

La Conférence de Glasgow : un optimisme prudent

La majorité des commentaires locaux consacrés au sommet climatique de Glasgow ont été prudemment optimistes. Tel est aussi le ton de celui qui a été mis en ligne sur le site aktualne.cz et qui a rapporté :

La Conférence de Glasgow | Photo: Alberto Pezzali,  ČTK/AP

« La réduction de la dépendance aux énergies fossiles ou encore la déforestation dans les tropiques constituent des problèmes beaucoup trop complexes et de longue durée pour pouvoir être résolus par une seule conférence. Les tâches qui sont énormes doivent être réparties pour être résolues successivement, une par une. De ce point de vue, la conférence de Glasgow a marqué un grand pas en avant. L’important, c’est que le monde a désormais une motivation plus forte de s’entendre qu’auparavant. Le changement climatique est perçu comme plus urgent qu’il y a dix ou vingt ans. Les pays de l’Europe centrale, par exemple, ont connu les étés les plus secs de l’ère moderne. »

A noter aussi, selon le chroniqueur du site aktualne.cz, que l’on voit se dessiner des solutions pertinentes. « Le chemin emprunté est satisfaisant », conclut-il.