Printemps arabe : en République tchèque, les Arabes font entendre leur voix

Bahreïn, photo: CTK

L’association Baraka, qui vise à développer la compréhension des pays du Proche-Orient et de l’Afrique du Nord et qui entend lutter contre les préjugés, organisait récemment à Prague un débat intitulé : « Le Printemps arabe : quelle est la vision des Arabes en République tchèque ? ». A travers cette discussion, il s’agissait de faire entendre la voix des ressortissants arabes qui vivent en République tchèque à propos de la situation qui prévaut désormais dans les pays arabes après les révolutions de l’an passé.

Le débat portait principalement sur le vécu et la vision des personnes issues de la société civile face à ces événements qui ont bouleversé le paysage politique de nombre de pays arabes, emportant notamment les dirigeants autoritaires de la Tunisie, de l’Egypte ou encore de la Lybie. Les intervenants se sont également intéressés à la lecture faite par les médias et la société tchèque de ce fameux « Printemps arabe ». Le président de la Chambre de commerce tchéco-arabe, George Karraa, d’origine palestinienne, juge ainsi que les médias tchèques commettent souvent la même erreur :

« Ils oublient souvent le lien entre les souffrances du peuple et les intérêts portés par les grands rassemblements politiques dans les pays arabes. Je pense que les médias devraient souligner de manière plus forte le rôle, les intérêts et la vision de chacun de ces rassemblements dans les événements. Au lieu de ça, ils parlent de manière trop générale et il me semble que c’est nuisible. »

Liban,  photo: CTK
Le Palestinien a également précisé que le commerce entre la République tchèque et les pays arabes avait été affecté par les révolutions car il existait des connexions établies de longue date avec les pouvoirs en place. Il y aurait cependant espoir que la situation se rétablisse assez vite.

De manière générale, les différents interlocuteurs étaient d’accord pour estimer que les médias tchèques ne s’intéressaient pas assez aux révolutions arabes et qu’ils ont longtemps ignoré la situation dans les pays en question. La plupart des débatteurs ont souhaité sensibiliser l’opinion publique tchèque face à la détresse des populations vivant dans des régimes autoritaires. Il y avait également un consensus pour dire que les médias et la société tchèques abordaient le sujet presque uniquement sous l’angle de la menace islamiste. C’est selon eux une peur irrationnelle car il n’y aurait aucune crainte à avoir sur un hypothétique retour de la chari’a, un système de normes islamiques. Les divisions seraient politiques et non religieuses.

Syrie,  photo: CTK
Les réactions concernant le monde politique tchèque sont légèrement plus nuancées. A propos de la prudence de la classe politique tchèque face à la révolution en Libye, le médecin libyen Abdel-Baset Hafuda a l’avis suivant :

« Je pense que la réaction des politiques tchèques a été particulière. Ils ne semblaient pas croire que la révolution puisse vaincre et que le régime de Kadhafi puisse tomber. Nous, au contraire, étions tous convaincus dès le début de la victoire de la révolution et qu’il n’y avait pas d’alternative à la chute du régime dictatorial. »

Pour sa part, l’artiste syrienne Saadat Ramadan commente à sa façon le récent discours à l’ONU de Václav Klaus. Le président tchèque est fidèle à un principe de non-ingérence dans les affaires des autres pays :

Bahreïn,  photo: CTK
« Je pense que lorsque le président a dit qu’il était nécessaire de laisser la Syrie tranquille, il ne voulait pas dire qu’il faut laisser mourir les gens. Je pense qu’il voulait dire que les gens doivent régler leurs problèmes eux-mêmes et pour cela il est indispensable que la Russie cesse d’envoyer des armes là-bas car les citoyens syriens risquent d’être démunis face aux massacres commis par le pouvoir en place. »

Malgré l’émotion qui a pu parfois dominer les débats, la soirée s’est bien déroulée et s’est terminée en musique avec l’artiste syrien Marwan Al-Solaiman.