Radka Máchová : une figure tchèque de l'aviation

Radka Máchová

Membre de l'équipe nationale tchécoslovaque de voltige aérienne puis leader d'une équipe sponsorisée par Red Bull,  Radka Máchová s'est imposée dans le paysage de la voltige aérienne. Son équipe, les « Flying Bulls », de renommée internationale, était réputée pour son niveau technique et leur prise de risque maximale : à plus de cent kilomètres à l'heure, dans toutes les positions possibles, mais avec seulement quelques mètres d'écart entre les appareils. Du haut de ses 72 ans, Radka Máchová peut contempler une carrière bien remplie – et qui n'est toujours pas terminée, comme elle l'a confié au micro de Radio Prague International.

Radka Máchová | Photo: Christian Jansky,  Wikimedia Commons,  CC BY-SA 2.5

« J'ai été pilote pour l'équipe « Flying Bulls Aerobatic Team » pendant 13 ans. Je suis tombée dans la voltige juste après mes études à l'Université des transports de Žilina. Là-bas, j'ai obtenu ma licence de pilote, et je me suis formée à la voltige. J'ai été choisie pour intégrer l'équipe nationale de voltige, qui représentait la Tchécoslovaquie. »

Comment êtes-vous tombée dans la voltige aérienne ? A quel moment avez-vous réalisé que vous vouliez faire cela ?

« Les émotions les plus fortes en vol, c'est lorsque l'on se retrouve seul dans l'avion pour la première fois.  Aucun pilote n'oublie ce sentiment. Ensuite, c'est lorsque l'on réalise une figure de voltige pour la première fois. J'ai eu de la chance, parce qu'à l'époque où j'ai commencé à voler, la voltige faisait encore partie de la formation initiale des pilotes. Donc, en réalité, ces deux moments, mon premier vol en solo, et ma première figure, se sont chevauchés. »

D'autant plus que l'aviation, chez vous, c'est un sport familial …

« Littéralement, toute notre famille vole. C'est notre frère qui a commencé, il était de 10 ans mon aîné. Il m'a fait découvrir le modélisme aéronautique, et cela m'a conduit à faire des études de transports. Mes sœurs étaient parachutistes, mon beau-frère également, et mon neveu construit des avions. Nous sommes vraiment une famille de pilotes. »

Flying Bulls | Photo: Portwyn,  Wikimedia Commons,  CC BY-SA 4.0 DEED

Vous étiez, vous l'avez dit, dans la représentation tchécoslovaque. Comment êtes-vous arrivée à ce niveau ?

« Je volais pour l'équipe nationale tchécoslovaque au siècle dernier. Mais j'ai dû arrêter parce que j'ai eu deux enfants, je n'avais plus d'avion et donc, de facto, on m'a renvoyée de l'équipe nationale.

Mais vingt ans plus tard, j’y suis revenue. Et désormais, quand je vole sur des répliques d'avions de la Première guerre mondiale, en l'honneur de jeunes pilotes qui auraient plutôt dû s'affronter lors de compétitions que sur les champs de bataille, l'expérience de la voltige m'est très utile. »

Entre l'équipe nationale tchécoslovaque et les vols que vous décrivez sur les répliques historiques, vous avez été capitaine de l'équipe sponsorisée par Red Bull, les « Flying Bulls ». Est-ce qu'on est venu vous chercher pour ce poste après toutes ces années ?

« A la fin du vingtième siècle, après la chute du régime communiste, je ne volais plus car je n'avais ni avion, ni argent. Mais une offre est arrivée de la part des Flying Bulls. Leur leader devait se retirer pour des raisons d'âge et de santé, et ils se sont souvenu qu'une certaine Máchová existait et qu'elle était compétente en voltige aérienne. Ils m'ont donc contactée, et je me suis dit que c'était une offre qui ne se refusait pas. J'ai renouvelé mes qualifications et mes licences, puis j'ai commencé à voler avec l'équipe. J’y suis restée 13 ans, c'était une période incroyable et j'en garde d'excellents souvenirs. Et maintenant, je vole sur les avions de mon neveu et de sa compagnie, « Pterodactyl Flights ». Ils font des reconstitutions aériennes de la Première guerre mondiale. »

Un Fokker monoplan | Photo: Thibault Maillet,  Radio Prague Int.

Nous réalisons cet entretien dans un meeting aérien, et il est aisé de constater que le monde de l'aviation est encore un univers majoritairement masculin. En tant que capitaine d'une équipe de voltige, comment étiez-vous reçue ?

Flying Bulls en 2006 | Photo: Christian Jansky,  Wikimedia Commons,  CC BY-SA 2.5

« Dans mon équipe, l'avantage, c'est qu'ils m'avaient appelée, ils m'avaient choisie, je ne me suis pas imposée. Mais c’est vrai qu’on me posait cette question à chaque interview. Mais comme je l’ai dit, on m'avait choisie et je n'ai donc eu aucun problème. J'ai dû apprendre à diriger l'équipe et m'adapter, évidemment, mais sur notre groupe il n'y a rien à redire, et l'équipe était vraiment excellente. Je n’ai pas de quoi me plaindre, et nous avons fait un joli travail dans la voltige. »

Pour que l'on se rende bien compte, comment décririez-vous un spectacle de voltige ? Et comment prépariez-vous ces enchaînements de loopings, de vrilles …

« Notre équipe, les « Flying bulls », était largement inspirée par « Les quatre de Chrudim ». L'idée principale de leur leader, que l'on a reprise, était de voler à quatre avions comme s'ils ne faisaient qu'un. Nous faisions toutes les figures de base de la voltige : des loopings, des vrilles, de la chute libre et du vol renversé, la tête en bas. Mais nous en avons également utilisé d'autres, comme le looping à 90° et plein d'autres figures qu'aucune autre formation ne faisait avant nous. Le plus compliqué est toujours d'être le premier. Quand nous réalisions une figure, comme « le miroir », les autres groupes voyaient que c'était possible et ils essayaient de le faire eux aussi.

A part cela, on ne s'entraînait pas tous les jours : une fois que nous maîtrisions les figures, et que nous y étions habitués, nous ne nous retrouvions qu'avant le spectacle, une fois par semaine. On ne peut pas faire ça tous les jours, ça doit mûrir dans la tête, et il faut se rendre compte de ses erreurs et les corriger. »

C'est une discipline très dangereuse. A quelle vitesse volez-vous ?

« En voltige, la vitesse importe peu. Ce qui compte, c'est le type d'avion, et à quelle vitesse ce type d'avion parvient à réaliser les acrobaties. Nous volions sur des avions Zlín Z50 LX, et pour ces appareils, la vitesse va de 110 à 220, voire 250 km/h. Mais chaque figure se fait à une certaine vitesse. »

Aujourd'hui vous êtes retraitée, mais pas retirée du monde de l'aviation. Est-ce que vous pouvez nous parler de ce que vous faites avec les « Pterodactyl Flight » ?

Radka Máchová dans le Fokker Eindecker E-III | Photo: Portwyn,  Wikimedia Commons,  CC BY-SA 4.0 DEED

« Quand j'ai quitté les « Flying Bulls », car de toute façon je n'aurais pas pu faire de la voltige éternellement,  j'ai intégré le groupe de mon neveu, « Pterodactyl Flight ». Je vole sur une réplique de Fokker Eindecker E-III. Cet appareil est totalement instable, et toute mon expérience de la voltige est vraiment utile. C'est un avion que j'aime mais qui est très dur à contrôler, mais ce type d'aviation est beau et il continue de m'apporter de la satisfaction et de donner du sens à ma vie d'aviatrice. »

*Pour aller plus loin, Radka Máchová avait participé à une conférence TEDx, disponible sur Youtube (en tchèque).