Retraites : mobilisation aussi parmi certains des Français à Prague
Bien qu’à près de mille kilomètres de leur pays, quelques dizaines Français se sont réunis à Prague, le 23 mars, pour manifester contre la réforme des retraites.
C’est face à l’ambassade française, située au cœur de la capitale tchèque, qu’une quarantaine de manifestants, pour la plupart étudiants en échange universitaire, scandaient des slogans dénonçant l’injustice de cette réforme.
Présenté en janvier dernier par le gouvernement d’Élisabeth Borne, le projet de réforme repose principalement sur le report de l'âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans. Aussitôt suivi par une mobilisation sociale inédite, le recours de la Première ministre à l’article 49.3 de la Constitution le 16 mars dernier a, encore, exacerbé les tensions.
Alertés par l’ampleur du mouvement social en France, ces jeunes expatriés souhaitaient agir à leur manière, malgré la distance. C’est le cas d’Arthur, étudiant de 21 ans en Erasmus à Prague :
« Pour beaucoup, nous nous sentions inutiles et frustrés de ne pas pouvoir être présents en France aux côtés des manifestants. Nous avons donc décidé d’organiser un rassemblement ici, à Prague. Nous voulions montrer que les étudiants se sentent concernés et donner un exemple aux Français à l’étranger qui souhaiteraient également se mobiliser. »
Lors de sa dernière allocution, Emmanuel Macron réaffirmait les priorités de son gouvernement : la santé, l’éducation, l’écologie. Peu convaincu, Arthur estime, comme les autres manifestants, que cette réforme est la goutte de trop :
« Aujourd’hui, nous nous mobilisons contre la réforme des retraites mais aussi contre la politique menée en France. »
« Nous nous questionnons beaucoup sur les dérives du pouvoir, qui depuis le premier mandat d’Emmanuel Macron, prennent beaucoup d’ampleur. Plus de 70% de la population française est opposée à la réforme, mais le gouvernement a fait le choix de l’adoption par la force. Cela nous amène à nous interroger sur le fonctionnement global de notre système politique. »
Au moment de former sa coalition politique l’an dernier, le gouvernement tchèque avait annoncé faire de la réforme des retraites une priorité. En ce début d’année 2023, il avait laissé entendre qu’il envisageait de relever de manière progressive l’âge légal de départ à la retraite à 68 ans d’ici à 2060. Le ministre du Travail, Marian Jurečka, a déclaré cette semaine qu’il ne comptait pas modifier l’âge de départ dans le texte législatif en préparation.
Néanmoins, la question du financement des pensions se pose de plus en plus en Tchéquie face au contexte économique et au vieillissement de la population. Il y a quelques semaines, le gouvernement a diminué la revalorisation des pensions, qui étaient jusque-là indexées sur l’inflation. Les syndicats tchèques avaient vivement critiqué cette décision, dénonçant une baisse des pensions de retraites des plus modestes.
Il n’y avait pas que des Français mobilisés jeudi soir devant l’ambassade de France – plusieurs Tchèques étaient présents, dont Jan Macek, qui a tenu à rejoindre le rassemblement initié par ces étudiants français.
Selon lui, les Tchèques et les Français défendent une cause commune :
« Les contestations françaises sont une inspiration pour les citoyens qui se mobilisent ici aussi en République tchèque. Le gouvernement tchèque envisage de repousser l’âge de départ à la retraite à 68 ans. C’est inacceptable. Ils la justifient par le fait que l’on vit plus longtemps ou qu’il n’y a pas assez d’argent. Mais ce ne sont que des mensonges, parce que les niveaux d’espérance de vie des habitants tchèques sont en dessous du niveau moyen européen. Nous pourrions avoir cet argent si des taxes sur les grandes fortunes étaient mises en place. Un système de pensions solidaire est nécessaire pour remplacer le système actuel qui est obsolète. »
Une manifestation, à l’initiative des principales organisations syndicales tchèques et d’autres organisations politiques, est prévue devant le siège du gouvernement à Prague le mercredi 29 mars contre un potentiel recul à 68 ans de l’âge de la retraite.