Rudolf Pellar, un chanteur à la française

Rudolf Pellar
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Dans la première moitié du XXe siècle, les Tchèques connaissaient, aimaient et chantaient les chansons françaises. Ils savaient apprécier ces petits chefs d'oeuvre musicaux et littéraires, ces poèmes mis en musique. Aujourd'hui, bien sûr, la situation, est différente car la chanson française a dû céder la place au répertoire anglo-américain. Si elle n'est pas complètement oubliée en Tchéquie c'est dû, en partie, aussi au comédien, traducteur et chanteur Rudolf Pellar qui chante le répertoire français depuis des années. Il vient de lancer un disque où l'on trouve plusieurs grands noms de la chanson française, Montand, Gainsbourg, Aznavour, Brel, Brassens, Bécaud, dont les chansons ont été traduites en tchèque.

"La chanson française est la base de mon répertoire, dit Rudolf Pellar. J'ai découvert la chanson française sous la Première république tchécoslovaque, dans les années trente, lorsque j'ai entendu Maurice Chevalier qui chantait 'Avez-vous vu le nouveau chapeau de Zozo, c'est un chapeau d'une forme très rigolo...'. J'en ai été ravi. Outre cela, je lisais des poètes français dans la traduction de Karel Capek et je me sentais donc très proche de la poésie et de la chanson française. Lorsque, dans les années cinquante, Yves Montand est venu en Tchécoslovaquie, c'était comme une apparition pour les chanteurs tchèques. Jusqu'à cette époque-là on chantait, chez nous, costumé et cravaté, sans bouger devant le micro. Et tout à coup, il y avait Yves Montand qui était bien différent, qui faisait même la roue sur scène, qui n'arrêtait pas de bouger et faisait tout comme un homme normal."

Rudolf Pellar aimait non seulement Yves Montand mais aussi Lucienne Boyer et admirait même Yvette Guilbert, bien qu'il ne l'ait connue que dans la littérature parce que cette vedette des cafés-concerts, immortalisée par les tableaux de Toulouse-Lautrec, appartenait à une autre époque. Les choix d'un chanteur tchèque qui interprète le répertoire français sont cependant assez limités par les chansons traduites en tchèque.

"Un certain choix existe, constate Rudolf Pellar. Bien sûr, il n'y a pas beaucoup de chansons qui sont traduites, mais nous avons quelques excellents traducteurs qui ont fait de très bonnes traductions. Ce sont surtout les frères Petr et Pavel Kopta et aussi Jaroslav Jakoubek qui a traduit quatre chansons de Jacques Brel que je chante encore aujourd'hui. Parmi les traducteurs actuels, c'est par exemple Ivo Stuka. Donc les traductions existent et dans la majorité des cas, elles sont bonnes ..."


Sur le disque de Rudolf Pellar on trouve plusieurs grands succès de Jacques Brel, Les vieux amants, Mathilde, Amsterdam, Les bourgeois. Il est évident, et le choix des chansons le démontre, que Rudolf Pellar aime beaucoup Jacques Brel. On dirait qu'il y a quelque chose comme un rapport privilégié entre le chanteur tchèque et le chanteur belge. Pourquoi Rudolf Pellar aime Jacques Brel?

"Je crois que c'est à cause de la qualité de ses chansons parce qu'elles sont toujours intéressantes sur le plan musical et leurs paroles, elles aussi, sont très intéressantes. C'est évident quand on le compare par exemple à Brassens dont les textes sont admirables mais dont les mélodies sont déjà un peu moins attractives."

Pourtant une des chansons du répertoire de Georges Brassens, La mauvaise réputation, figure sur le disque de Rudolf Pellar. Bien que les chansons de Brassens ne soient pas toujours d'un accès facile pour le public étranger, elles ont trouvé chez nous plusieurs traducteurs qui ne se sont pas laissés décourager et ont tenté de les y faire connaître. C'était Pavel Kopta, Jan Rubes et actuellement, c'est le chansonnier Jiri Dedecek, qui est aussi interprète de ses traductions. Rudolf Pellar a choisi la traduction de Pavel Kopta :

"Dedecek a traduit un tas de chansons de Brassens. En ce qui concerne les traductions de La mauvaise réputation, je pense que celle de Kopta et meilleure que celle de Dedecek. Et puis je n'aimerais pas marcher sur les plates-bandes de Dedecek. Comme c'est lui qui le chante, ce ne sera pas moi ..."