Sur les traces de la révolution de Velours (III) - la place Venceslas et l’esplanade de Letná
Tout au long de cette semaine, en compagnie d'un témoin de l'époque, nous vous faisons découvrir les principaux endroits à Prague où l'histoire s'est écrite en novembre 1989. Dans ce nouvel épisode, nous allons nous rendre sur la place Venceslas et sur l’esplanade de Letná, lieux de manifestations massives qui ont rassemblé des centaines de milliers de personnes venus de tous les coins du pays. Elles étaient animées par Václav Malý, prêtre catholique et dissident. Nous l’avons rencontré.
« Ces manifestations massives étaient un signe que les gens souhaitaient un réel changement. Ce n’était plus seulement quelques milliers de citoyens courageux qui se sont rassemblés, comme cela était le cas auparavant, mais c’étaient des masses. Evidemment, le pouvoir en place devait réagir… »
Dans les jours qui ont suivi la répression de la manifestation étudiante du 17 novembre, la situation a rapidement évolué :
« Nous avons fait un pas dans l’inconnu. Lorsque Václav Havel et nous, ses collaborateurs, nous nous sommes adressés pour la première fois aux centaines de milliers de manifestants réunis sur la place Venceslas, depuis le fameux balcon de la maison d’édition Melantrich, nous ne savions pas encore comment tout cela allait se terminer. L’ancien ministre de la Défense voulait que l’Armée intervienne et disperse la foule… Les troupes des milices populaires de toute la République tchèque étaient convoquées à Prague… En même temps, nous n’étions pas certains que les manifestants eux-mêmes nous acceptent. Finalement, les gens ont très bien réagi, ils étaient tolérants, de bonne humeur et disciplinés. C’était un immense encouragement pour nous. »
« Les événements se sont précipités. Aujourd’hui, avec du recul, on pourrait penser que nous avions le temps de réfléchir, de planifier. Mais ce n’était pas le cas : nous avons improvisé et ça s’est bien terminé. »
Les événements de novembre 1989 sont entrés dans l’histoire sous l’expression ‘révolution de Velours’. Cependant, l’évêque Václav Malý, qui continue à défendre les valeurs démocratiques dans des pays comme la Biélorussie, la Chine, l’Iran ou le Soudan, n’est pas tout à fait d’accord avec cette étiquette :« Il s’est avéré qu’au sein du Parti communiste, il n’y avait aucun groupe capable de reprendre le pouvoir. Alors sous la pression du public, une pression qui était énorme, les communistes ont accepté de passer le pouvoir aux autres. Alors dans ce sens, oui, c’était une révolution douce. Ce que je trouve problématique, c’est l’emploi du mot ‘révolution’ : pour moi la révolution est synonyme d’une pression encore plus grande, de force et de violence. Dieu merci, nous n’avons vécu rien de tel en Tchécoslovaquie. »