Transparent : l’association qui lutte pour les droits des personnes transgenres

Photo illustrative: Daydreamerboy, CC BY-SA 3.0

Elle entend défendre et promouvoir les droits des personnes transgenres au niveau législatif mais également travailler à la compréhension et à l'acceptation des transgenres dans la société. Afin d’en savoir plus, nous nous sommes entretenus avec un de leurs membres, Jan Vácha.

Malgré l’existence de plusieurs projets sur la transidentité comme TakyTrans sur instagram, Transparent est la seule organisation en République tchèque qui se concentre uniquement sur les problématiques que vivent les personnes transgenres et non-binaires. Elle a été créée en 2015 par Damian Machaj et Viktor Heumann qui ont réuni un groupe d‘activistes dans le but d’améliorer la représentation des personnes transgenres, mais aussi et surtout leur vie, et notamment leur accès aux soins. En effet, la Tchéquie fait partie des pays qui requièrent toujours la stérilisation pour les personnes souhaitant changer d’état civil. Elle a d’ailleurs été condamnée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme en 2015 pour cela, mais rien n’a changé pour autant comme l’explique Jan Vácha.

« La République tchèque a perdu cette affaire et devait retirer la stérilisation de la loi. Il y a eu une proposition au ministère de l’Intérieur je crois mais ça ne semble pas être la priorité de ce gouvernement qui n’a pas de ministère des Droits de l’Homme. La dernière fois que le projet pour retirer la stérilisation de la loi a été déposé, la ministre de la Justice a dit que la société n’était pas prête pour ça, et c’est absurde. En quoi la société n’est pas prête à bannir la stérilisation forcée ? Même quand j’en parle à des conservateurs, ils sont choqués. Mais au Parlement, ils pensent que les transgenres sont des monstres et des violeurs… »

« Je pense que la transidentité n’est pas un sujet habituel pour les gens. La plupart ne connaissant pas de personne transgenre. Il y a un stéréotype selon lequel les femmes trans seraient des hommes avec une perruque. Les femmes trans sont plus souvent victimes de transphobie que les hommes trans. »

Si l’organisation fait de la lutte contre la stérilisation forcée sa priorité, elle dénonce également les autres violences que peuvent subir les personnes trans sur le plan médical, lorsqu’ils souhaitent par exemple commencer leur transition. Les membres de Transparent ont donc élaboré des projets, et travaillent sur ces derniers avec l’aide de plusieurs partenaires :

« On coopère évidemment avec Amnesty International. Il y a aussi Prague Pride, cette année nous allons avoir une discussion sur les problèmes que rencontrent les personnes intersexes. Et nous collaborons avec l’Institut National de la Santé Mentale sur la création d’un manuel à destination des docteurs, psychologues et sexologues qui travaillent avec des personnes trans mais aussi pour les personnes trans elles-mêmes. Ce manuel est censé améliorer les soins de santé des trans car pour l’instant, nous avons quasiment une stérilisation forcée, et les médecins n’ont pas les capacités suffisantes pour répondre à leurs besoins. Les personnes trans n’ont pas beaucoup le choix quant aux médecins qu’ils peuvent aller voir, et nous savons que certains d’entre eux profitent de leur position pour demander aux patients des choses inappropriées. Nous avons enregistré un cas d’harcèlement sexuel perpétré par un médecin. Ils savent qu’ils sont en position de force car les patients n’ont personne d’autre vers qui se tourner pour obtenir une prescription pour leurs hormones. Peu de gens osent prendre la parole et c’est pour ça que nous travaillons avec des médecins qui souhaitent améliorer les choses. Nous sommes des êtres humains, et pour l’instant, nous n’avons pas l’impression d’être traités comme tels. »

La Pride ayant lieu dans quelques semaines, Transparent organise pour cette occasion une discussion sur les problèmes que vivent les personnes intersexes, bien souvent invisibilisées. Ces personnes sont nées avec des caractères sexuels qui ne correspondent pas aux définitions binaires types des corps masculins ou féminins.

« Il y a la discussion sur les problèmes que vivent les personnes intersexes. Partout dans le monde, quand une personne intersexe naît, les médecins décident d’enlever certains de leurs organes pour que la personne corresponde à un genre, soit fille soit garçon, et ça arrive parfois sans que les parents le sachent. Mais même lorsque les parents sont au courant, on peut se demander si ça devrait arriver ou si ça ne serait pas plutôt aux personnes concernées de décider pour elles-mêmes. »

Source: Midori Friedbauer,  CC BY-SA 4.0

En plus de ces projets tentant d’améliorer le traitement et l’accès aux soins des personnes trans, l’organisation travaille également avec les médias afin de construire une image positive et réaliste des personnes trans.

« Nous n’avons pas vraiment de projet mais ce que nous essayons de faire est de fournir des histoires sur les trans aux médias. Avec ce qui s’est passé avec J.K. Rowling, nous avons été invités à une interview mais c’est compliqué. Nous avons un guide pour les journalistes sur comment aborder le sujet mais ils ne semblent pas le respecter, ce qui mènent à des questions idiotes entrainant un discours idiot. Parfois certains veulent parler de la transidentité car cela semble être progressif pour eux mais ils ne font pas de recherches et posent des questions qui ne sont pas liées à ce que nous vivons. Ce dont nous voulons parler est le cas de la stérilisation mais la plupart ne sont pas au courant, donc nous recevons des questions sur ce que nous avons entre nos jambes mais pas comment la stérilisation nous impacte. Par exemple, j’aimerais travailler avec l’Unesco ou l’OCDE au Moyen-Orient mais je ne peux pas y aller car c’est écrit que je suis une femme sur mes documents d’identité et avec mon physique maintenant, ça ne passera pas. »

Enfin, Transparent est également présent dans le domaine du travail, un domaine à ne pas négliger lorsque de nombreuses études font ressortir que les personnes transgenres sont en général beaucoup plus touchées par le chômage comparé au reste de la population, et ce dans tous les pays.

« Transparent a un programme oui. Si une entreprise souhaite créer un guide interne qui soit trans-friendly, alors nous sommes prêts à les aider pour le rédiger et le mettre en application. Nous mettons également en place des ateliers pour savoir quel langage utiliser. »

Concernant leurs projets à venir, Transparent souhaite se professionnaliser et coopérer davantage avec Prague Pride et le ministère de l’Education, en lien avec l’actuelle réforme du système scolaire en République tchèque.

Présent dans plusieurs villes, Transparent a organisé des discussions dans des régions où ont été créés des groupes de soutien locaux pour des personnes parfois très seules :

« Le nom Transparent est bien car il peut être utilisé de plusieurs façons. Le mot « Trans » vient évidemment du mot « transgenre », mais le mot « parent » peut aussi signaler que c’est une organisation qui est là pour servir toutes les personnes de la communauté trans, un peu comme des parents le feraient car souvent les personnes trans se font mettre à la porte par leurs parents et ils n’ont aucun endroit où aller. Donc Transparent n’est pas seulement là pour plaider la cause des trans mais également pour accompagner les individus. C’est pour cela que nous avons des groupes de soutien tous les mois. Parfois les groupes sont ouverts aux parents. »