Un an après la contamination de la rivière Bečva, le flou persiste

La rivière Bečva

Mais qui a bien pu empoisonner la rivière Bečva ? Une question que Radio Prague International a soulevée en janvier dernier, trois mois après la contamination au cyanure de cette rivière qui traverse la région de Zlín, en Moravie centrale. Un an après l’incident, considéré comme la pire catastrophe écologique en République tchèque depuis des dizaines d’années, les responsables n’ont toujours pas été trouvés.

Dimanche 20 septembre 2020, plus de 40 tonnes de poissons ont péri dans la rivière Bečva, dans l’est de la République tchèque. Longue d’une soixantaine de kilomètres, la rivière a été contaminée au cyanure sur un tronçon d’environ 40 kilomètres, entre les villes de Přerov et de Valašské Meziříčí. Les 40 000 poissons destinés à l’équarrissage ne représentent, d’après les experts, que 60% des organismes vivants tués par cette matière hautement toxique.

Stanislav Pernický de la commune de Hustopeče nad Bečvou figurait parmi les pêcheurs qui se sont spontanément mobilisés, le jour de la catastrophe, pour prélever les animaux morts. Il se souvient :

« Sur le pont de la rivière, nous étions plusieurs à observer la situation : des centaines de poissons flottaient sur la surface de l’eau et mourraient sous nos yeux. »

Président de la branche locale de l’Union tchèque des pêcheurs, Stanislav Pernický a immédiatement contacté l’Inspection tchèque de l’environnement :

Stanislav Pernický | Photo: Luděk Peřina,  ČTK

« Les représentants de l’Inspection étaient très réticents. Je les ai appelés à plusieurs reprises, en les suppliant de venir. Mais il ne s’est rien passé. Alors nous avons nous-mêmes prélevé de l’eau dans deux bouteilles en plastique que nous avons ensuite fait parvenir au bureau de l’Inspection. Entre-temps, les pêcheurs et les pompiers de la ville se sont mobilisés pour nettoyer la rivière. Ils avaient tous les larmes aux yeux, parce que c’était une véritable apocalypse. »

La lenteur des autorités, ainsi que d’autres erreurs commises au cours du prélèvement et l’analyse de l’eau contaminée ont été pointés du doigt par une commission spécialisée créée, à l’initiative des partis d’opposition, au printemps dernier au sein de la Chambre des députés : ce lundi, elle a rendu publics les résultats de sa propre investigation dans cette affaire devenue également politique.

L’usine chimique Deza | Photo: Martin Zajíček,  iROZHLAS.cz

Car l’usine chimique Deza appartenant au groupe Agrofert fondé par le Premier ministre Andrej Babiš a également été soupçonnée, un temps, de la pollution de la rivière. Elle figure parmi plusieurs entreprises qui utilisent le canal industriel appelé « rožnovský », par lequel le cyanure s’est déversé dans la rivière. Finalement, la police a engagé des poursuites pénales contre les représentants de l’usine de traitement des eaux usées Energoaqua qui rejettent néanmoins toute responsabilité.

L’usine de traitement des eaux usées Energoaqua | Photo: YouTube

Par ailleurs, les experts interrogés par la commission parlementaire ont remarqué que la police manquait d’indices directs qui permettraient d’identifier le coupable avec certitude, les échantillons de l’eau polluée n’ayant pas été prélevés immédiatement, mais seulement quelques jours après l’incident.

Un an après la contamination, la vie retourne peu à peu dans la Bečva, un affluent de la Morava, qui est la principale rivière de la Moravie. Le repeuplement de la rivière prendra encore plusieurs années. Pour l’instant, les poissons pêchés ne peuvent pas être consommés et doivent être remis à l’eau.

La rivière Bečva | Photo: Luděk Peřina,  ČTK

L’enquête policière sur la pollution de la rivière doit encore être révisée par le parquet régional d’Ostrava. Enfin, la catastrophe écologique a ouvert un débat sur le contrôle insuffisant, par l’Etat tchèque, de l’utilisation des canaux industriels, sur les moyens de les sécuriser et de sanctionner davantage les usines polluantes.

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