Un nouveau gouvernement, oui, mais pour combien de temps ?

Photo: ČTK

Ca y est. Fini le provisoire. Depuis ce mercredi, la République tchèque possède un nouveau gouvernement. Un peu plus de trois mois après la tenue des élections législatives, le cabinet dirigé par le Premier ministre social-démocrate Bohuslav Sobotka a été nommé, ce mercredi, par le président de la République, Miloš Zeman. La coalition tripartite composée des sociaux-démocrates, du mouvement ANO (Action des citoyens mécontents) et des chrétiens-démocrates succède au gouvernement intérimaire de Jiří Rusnok, finalement resté en place plus de six mois.

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On ne peut jamais être sûr de rien avec la politique tchèque, l’éclatement d’un nouveau scandale ou les discordes au sein d’une coalition étant susceptibles de faire tomber un gouvernement à tout moment. Si l’on remonte jusqu’à l’affaire du financement du Parti civique démocrate (ODS), en 1998, qui avait alors entraîné la chute de Václav Klaus, aucun Premier ministre tchèque, à l’exception d’un certain Miloš Zeman entre 1998 et 2002, n’est resté en poste durant la durée supposée de quatre ans de son mandat.

Néanmoins, à compter de ce mercredi et ne serait-ce que pendant les prochains mois (et plus si affinités), on n’entendra plus parler de gouvernement intérimaire, de gouvernement démissionnaire mais toujours en place, de probable future coalition gouvernementale, de candidats aux fonctions ministérielles probablement prochainement nommées ou encore de deux Premiers ministres, comme cela était le cas depuis le 17 janvier dernier avec Bohuslav Sobotka et Jiří Rusnok. Non. Qu’on se le dise, la République tchèque est désormais dirigée par un gouvernement en bonne et due forme, par une coalition légitime fruit des négociations qui ont suivi les élections anticipées d’octobre dernier.

Dès ce mercredi, aussitôt la cérémonie de nomination de ses seize ministres, parmi lesquels trois femmes, achevée au Château de Prague, ce gouvernement s’est réuni pour se mettre au travail.

Bohuslav Sobotka,  Andrej Babiš,  Miloš Zeman,  photo: ČTK
« Nous devons procéder rapidement. Trois mois après les élections, nous avons déjà perdu suffisamment de temps comme ça. Nous ne pouvons donc pas nous permettre d’hésiter et de prendre encore plus de retard. »

L’objectif pour Bohuslav Sobotka est désormais de présenter sa déclaration de politique générale dans les plus brefs délais à la Chambre des députés, afin d’obtenir la confiance de celle-ci. Pour cela, le gouvernement, fort d’une confortable majorité à la Chambre basse (111 sièges sur 200), dispose, selon la Constitution, de trente jours à compter de sa nomination. Il ne s’agira donc là, a priori, que d’une formalité.

Ce qui le sera beaucoup moins, ce sera le respect des priorités établies par ce nouveau gouvernement pouvant être qualifié de centre-gauche et franchement plus pro-européen que le précédent cabinet de Petr Nečas, il est vrai particulièrement eurosceptique. La relance de la croissance économique, le soutien à l’emploi, une meilleure collecte des impôts et utilisation des milliards d’euros en provenance des fonds européens, ou encore plus généralement l’amélioration des services publics mis à la disposition des Tchèques, sont quelques-unes de ces priorités.

La composition de la coalition formée par Bohuslav Sobotka laisse toutefois d’ores et déjà planer certains doutes sur sa viabilité même et celle de son programme. Si la réunion des sociaux-démocrates et des chrétiens-démocrates au sein d’un même cabinet ne représente pas une première, la présence du mouvement populiste ANO constitue toujours une énigme. La question qui se pose pour beaucoup aujourd’hui est de savoir ce qu’il convient d’attendre de la formation dirigé par le milliardaire Andrej Babiš, homme d’affaires influent nommé à la tête du ministère des Finances. Fondée en 2011, son Action des citoyens mécontents a séduit les Tchèques (près de 20% de suffrages lors des législatives, deuxième meilleur score juste derrière les sociaux-démocrates) en promettant d’abord de mettre de l’ordre dans la conduite de l’Etat, plus concrètement en réduisant le gaspillage et bien entendu en luttant contre la corruption et le clientélisme qui ont miné les gouvernements de droite de ces huit dernières années. Tout un programme…