Un poème illustré par Frantisek Kupka

C'est grâce à Xavier Galmiche, professeur de langue et de littérature tchèques à la Sorbonne, que les lecteurs français ont la possibilité de lire la traduction française de la "Ballade d'un homme et de ses joies", écrite en 1903 par le poète tchèque Antonin Sova. Le livre a été publié aux Editions des Cendres, non seulement à cause du poème, mais aussi grâce à huit gravures qui accompagnent le texte. Elles ont été créées par Frantisek Kupka, peintre considéré comme l'un des pères de l'art abstrait. Voici ce qu'en pense le traducteur Xavier Galmiche :

Dans quelle mesure Frantisek Kupka a réussi à exprimer l'atmosphère et le caractère de la ballade d'Antonin Sova et qu'est ce qu'il a apporté de nouveau?

"Je pense qu'il y a chez Kupka toujours une sorte d'exploitation de tout le réservoir d'images fantastiques, il détourne toujours l'image, il l'interprète dans un sens anarchiste, dans un sens spiritiste, à l'image de toutes les théories qui bourgeonnent au début du XXe siècle. Il est très significatif que pour les gravures qu'il a composées pour cette ballade, il ait insisté chaque fois sur le caractère théâtral, c'est à dire qu'on voit toujours au premier plan de la gravure une sorte de scène et, parfois, un rideau, ce que j'appellerais un phénomène de distanciation, on dirait que Kupka se distancie du texte de Sova qu'il apprécie d'ailleurs. Sova était son ami."

Il a donné à ce travail une dimension très personnelle en se substituant en quelque sorte au héros de la ballade, en lui donnant son propre visage...

"Oui, il y a quelque chose d'autobiographique, si l'on peut dire, dans le traitement que Kupka fait du texte de Sova puisque, comme vous le dîtes, il se portraiture lui-même sous les traits du héros de la ballade. Ce qui me frappe, c'est l'importance du thème du suicide qui clôt la ballade, mais en fait, c'est un thème qu'on retrouve un peu partout dans la culture tchèque de la fin du XIXe siècle. Et je pense qu'il a médité la question de civilisation qu'entraîne la réflexion sur le suicide. On peut penser au livre que Masaryk a consacré à la question quelque quinze ans avant."