Une cotutelle de thèse entre Prague et Paris
La musique, c’est du bruit qui pense nous disait Victor Hugo. Une phrase qui a une résonance particulière pour Polina Chodaková, une doctorante en linguistique qui s’intéresse aux musiques urbaines en France et en République tchèque. Si la sociologie s’est largement emparée de la pensée véhiculée par le rap ou le reggae, il restait selon elle à s’occuper du bruit, avec la phonétique. Et Polina Chodaková décortique donc désormais les grilles rythmiques de ces deux genres dans le cadre d’une cotutelle internationale de thèse entre les laboratoires de linguistique de l’Université Paris Diderot – Paris 7 et de l’Université Charles de Prague, une cotutelle dont elle a expliqué les modalités au micro de Radio Prague.
Pourquoi vous êtes-vous lancée dans une cotutelle ? Qu’est-ce que cela apporte par rapport à une thèse « normale » ?
« C’est très intéressant d’étudier dans deux universités à la fois parce que c’est très enrichissant au niveau culturel et social. En plus, cela me permet d’être encadrée par deux laboratoires différents avec des procédés différents. »
Votre sujet touche à une comparaison entre la musique française et la musique tchèque. Est-ce courant que les doctorants dont les sujets impliquent deux ou plusieurs pays fassent des cotutelles ?
« Ce ne sont pas tous les doctorants qui s’inscrivent en cotutelle. Mais nous sommes à peu près une dizaine à faire ce cursus, surtout en phonétique. Il y a une longue tradition entre nos universités partenaires. Cet accord entre les deux départements de phonétique est le premier accord de ce type à l’Université Charles de Prague. »Comment cela se passe concrètement de vivre sur deux pays ? Comment vous vous organiser ? Y a-t-il des bourses pour vivre entre Prague et Paris ?
« L’organisation pratique est partiellement encadrée par l’organisation qui s’appelle Campus France. La mise en place de la cotutelle est soutenue, et par le ministère de l’Education tchèque, et par le ministère des Affaires étrangères français. Les doctorants en cotutelle bénéficient à la fois d’une bourse d’admission tchèque et d’une bourse du gouvernement français. »
Et comment vous vous organisez pour passer une partie de l’année en République tchèque et une autre en France ?
« Je trouve cela facile à gérer, c’est très intéressant et les difficultés liées aux fréquents déménagements ne me dérangent pas du tout car les avantages sont plus nombreux que les inconvénients. Si je pouvais refaire mon choix il y a trois ans, je ferais la même chose. Je pense que l’encadrement et l’accueil du laboratoire partenaire sont très chaleureux. »
Le laboratoire de linguistique de l’Université Paris Diderot - Paris 7 a l’expérience des cotutelles ?
« Oui, il y a toujours des Tchèques qui sont dans le laboratoire et je me suis faite beaucoup d’amis. Le laboratoire est très international, il y a des gens de tous les continents et on s’entend bien quand on travaille ensemble. En plus, en France, l’université est plus grande, il y a par exemple des Journées des doctorants. Il y a trois fois plus d’étudiants à l’Université Paris 7 qu’à l’Université Charles à Prague. Un tiers de ces étudiants à Paris sont des doctorants. Donc cela fait beaucoup de doctorants et l’organisation du milieu de recherche m’apparaît bien réussie. Le travail avec les autres doctorants dans le domaine de la phonétique et de la phonologie est très stimulant parce que j’ai des retours directs de la part de mes collègues. C’est intéressant car chacun travaille sur la phonétique comparée avec le français et sa langue maternelle. »
Comment se passera la soutenance de thèse ?
« La thèse donne place à une seule soutenance avec un jury international composé des deux parties, française et tchèque. Il y a aussi un seul examen de synthèse à la fin. La soutenance aura lieu normalement à Prague, en français. J’espère soutenir d’ici un an et demi. »